Cauchemar éveillé [Feat. Isaiah E. Navarro]

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Johan avait hésité quelques minutes une fois que l'élève en question lui avait transmis le message. Déjà d'une part parce qu'il n'avait pas le champ libre étant donné que les grands avaient décidé de lui mener la vie dure à l'abri des regards, mais surtout, parce qu'il n'avait aucune envie de revoir ce professeur qu'il tenait pour responsable de l'incident qu'il venait d'y avoir.

Au fond de lui, le jeune garçon savait qu'il n'y était pour rien, tout comme lui, il avait simplement sauté trop de classes pour être perçu comme un élève normal alors qu'il n'avait que treize ans et que tous les autres autour de lui avaient entre quinze ans pour les jeunes et parfois vingt ans pour ceux ayant redoublé certaines classes. Il est clair que lui avec ses treize ans, il faisait tâche.

Au bout du compte, l'allemand avait décidé de sortir des vestiaires pour rejoindre le professeur, il ignorait si sa décision était la bonne et encore plus ce qui l'avait motivé à ne pas quitter le gymnase, mais il était désormais debout devant lui. Ses yeux turquoises plantés dans les siens dans l'attente qu'il brise le silence. Voyant qu'il ne semblait pas vouloir le faire, c'est avec des mots doux et tendres qu'il s'exprima en direction de cet homme qu'il tenait pour responsable de l'humiliation subit quelques instants plus tôt.

Une fois qu'il eut dit ce qu'il avait à dire, il s'apprêtait à quitter le bâtiment pour tenter d'oublier ce qui venait d'arriver, mais rapidement ses côtes lui rappelaient d'éviter tout mouvement brusque. Il aurait pu faire comme tous les autres enfants, quitter l'établissement scolaire pour rentrer chez lui, mais il n'avait pas de chez lui, il n'en aurait probablement jamais. Mais avant qu'il ne disparaisse complètement, la voix du professeur arriva jusqu'à ses oreilles. Il avait deviné ce qui se passait, c'était le moment pour le garçon de pouvoir avoir une épaule sur laquelle s'appuyer, mais il avait appris à se débrouiller seul, sans famille, sans amis.

" - De quoi vous parlez ?" fit-il comme s'il était dupe et qu'il n'avait pas compris de quoi il s'agissait.

Le jeune homme voulait l'aider, mais comment pourrait-il lui venir en aide ? En prévenant le proviseur et en prenant des sanctions contre les responsables ? Ça finirait par lui retomber dessus, il ne comptait pas souffrir encore plus. Il avait tenu jusqu'ici, il pourrait bien tenir encore quelques mois dans ces conditions ? Peut-être pas finalement, peut-être qu'il serait tenté de faire un geste qu'il regretterai, Johan n'était pas très rationnel par moment.

" - Vous pouvez rien faire de toute façon, c'est toujours la loi du plus fort qui l'emporte. Si ce n'est pas ici, ce sera ailleurs."

Qu'il s'estime heureux c'était la première fois que Johan avouait à demi-mot les violences qu'il subissait, c'était sans parler du harcèlement et des moqueries au goût assez morbide qu'avait ces mêmes personnes qui l'avaient pris pour cible dès son arrivée. Une main sur ses côtes, son sac sur son épaule, Johan grimaça de douleur, il allait devoir trouver un moyen pour ne pas trop souffrir, mais se pointer chez le médecin serait bien trop dangereux pour lui. Il vivait comme un criminel, il se cachait sans cesse tout en vivant dans l'illégalité.

Johan & Isaiah

Cauchemar éveillé

You don't need to feel bad about who you are

Dans un premier temps, je faillis croire que ma supposition était totalement fausse et que le souci était dans mon cours au moment où Johan prit un air interrogateur, comme si j’étais complètement à côté de la plaque. Ne le connaissant pas tant au bout du compte, puisqu’il avait su se faire on ne peut plus discret, présent ou absent, je ne pouvais pas dire s’il mentait ou pas. Et ne voulant pas insister au point de lui manquer de respect, j’étais prêt à me rétracter, mais il vint à dire quelque chose qui me mit la puce à l’oreille, venant en quelques sortes me confirmer ce que je pensais déjà. Enfin, il ne le fit pas directement, mais le fait qu’il s’avoue vaincu, se plaçant en position d’infériorité comparativement aux autres, comme s’il était obligé de se mettre dans une telle posture, tel un condamné. Et pour moi, c’était suffisant pour que je comprenne que quelque chose clochait, clairement, et je ne pouvais pas passer à côté. Je voulus alors répliquer, mais je me rendis compte qu’il semblait tout sauf à l’aise, là à se tenir les côtes, peinant à tenir debout. Finissant de le rejoindre, je lui dis donc: « Viens t’asseoir, là. » Je lui montrai un autre banc qui se trouvait non loin, puis comme pour l’encourager à le faire, je m’y installai également. Et cette fois-ci, probablement pour la première fois depuis le début de ce fameux cours, je pris quelques secondes, secondes pendant lesquelles je restai en silence, histoire de bien réfléchir mes propos, trouver les mots justes, comme si c’était la dernière chance qui m’était accordée. D’une certaine façon, c’était un peu comme tel, parce que je devais me rattraper, mais aussi le rassurer, lui venir en aide, et tout ça en même temps. Ressentais-je de la pression ? Oui, quelque peu, et ayant toujours été plus porté sur l’action et la réflexion intérieure que les gestes - d’où le fait que jamais je ne m’étais vengé de ma femme alors que j’aurais pu, des centaines, des milliers de fois - ce ne fut pas le plus adroitement du monde que je lui dis: « Tu sais, je ne voulais pas que tu subisses quoi que ce soit d’humiliant en te demandant d’aller te joindre à une équipe. Tout ce que je voulais, c’est que tu aies une chance, comme les autres. Et ce qui arrivé là, ce n’est pas normal. » Je marquai une pause, tentant encore une fois de réfléchir à ce que je dirais par la suite, mais n’y parvenant pas aussi bien que je l’aurais voulu dans un premier temps, je me retrouvai à tomber dans le personnel, en le masquant bien évidemment, lorsque j’ajoutai: « Tu n’as pas à prendre pour acquis que tu dois être traité de la sorte. Tu n’as rien demandé, et ils n’ont pas à te manquer de respect de la sorte, tu ne mérites pas ça… » Oui, c’était personnel parce que limite, j’étais aussi en train de me parler à moi-même, à parler de ma propre situation de laquelle j’étais en train tout juste de me défaire, sans toutefois trouver le bout, sans être capable de tirer un trait dessus. Mais ça, Johan n’avait pas besoin de l’entendre. Qu’avait-il besoin d’entendre exactement ? Je n’en étais pas certain, mais plutôt que tenter de lui lancer des promesses en l’air, je m’avouai, en quelques sortes, vaincu, et je lui dis: « Après, je ne peux pas te dire que j’ai la solution parfaite. En fait, je n’ai pas de solution précise. Mais si tu le souhaites, j’aimerais t’aider à en trouver une, ou plusieurs, faire le nécessaire pour t’aider… » C’était un gros mandat que je venais de me donner là, mais on dirait que depuis que je commençais à accepter mon statut de victime et que j’acceptais de tenter de m’en sortir, j’avais ce désir d’aider les autres. Ce n’était pas complètement nouveau, mais c’était plus concret que jamais pour le coup, comme je venais de le prouver, comme je venais de me le prouver surtout.

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Johan aurait pu tourner dans des petites séries ou même des pubs, il était très convainquant quand il le voulait, il était peut-être jeune mais il savait déjà comment tourner les choses à son avantage. Des mensonges ? Il lui arrivait souvent d'en dire, mais dans le but de blesser qui que ce soit, simplement pour se sortir de situations complexes. Et il avait bien vu dans le regard de cet enseignant qu'il avait failli y croire, qu'il avait failli le laisser partir.

Au fond de lui, tout ce que le garçon demandait, c'était un peu d'amour, mais il faut croire que même ça, c'est trop demandé. Peut-être qu'il n'a pas le droit d'être heureux après tout, ça expliquerai beaucoup de choses. Toute cette violence dont il était victime, il avait fini par croire qu'il le méritait, qu'il n'était pas à sa place et que c'est de cette manière qu'on le lui faisait payer.

Finalement, le professeur lui intima de venir s'asseoir auprès de lui sur le banc. Un coup d'oeil en direction des vestiaires pour s'assurer que personne ne les regardait et surtout, que personne ne pouvait entendre. Le jeune allemand savait parfaitement comment ce type de moment pourrait être interprété par ses camarades. Une simple photo, une légende bidon et hop c'est parti pour lancer une rumeur. Il en était déjà l'objet de plusieurs concernant sa soi-disant homosexualité. La vérité c'est qu'il n'avait pas l'âge de se poser des questions à savoir si les femmes ou les hommes l'intéressaient. Il s'en fichait pas mal, tout ce qu'il voulait c'est avoir une vie à peu près normale et dans l'immédiat, c'est loin d'être le cas.

Par correction, il s'assit aux côtés de l'homme tout en s'assurant de laisser une distance raisonnable. Il avait toujours peur qu'on lui tende des pièges, il était si méfiant depuis le décès de sa mère qu'il ne faisait plus confiance à qui que ce soit, encore moins à des adultes.

" - Je ne suis pas comme les autres et je ne le serai jamais.." fit-il en évoquant ce qu'il jugeait comme étant son handicap : être un enfant surdoué.

Le professeur ne devait pas se sentir coupable, il ne l'était pas. Si ces adolescents étaient débiles ce n'était pas de sa faute, mais ils s'en étaient pris à l'allemand parce qu'il avait rejoins leur équipe sous ordre du professeur. Alors Johan le jugeait en tant que responsable de l'incident, même s'il n'en était rien. Ça aurait pu être n'importe qui d'autre à sa place. Il continua d'écouter ses propos et il y décéla quelque chose, comme si son discours avait quelque chose de personnel, mais ne voulant pas s'avancer, et surtout refusant de s'immiscer dans la vie de son professeur, il décida de ne pas relever ce qu'il avait remarqué.

" - Je ne mérite peut-être pas ça, mais je ne mérite rien de bien mieux. Faut jamais se fier aux apparences, je suis pas quelqu'un de bien."

Devoir voler dans les commerces pour manger, dormir dans une station de métro ou dans un squat entouré de drogués. Non. Johan était définitivement pas un bon gamin et il le savait, il avait honte de sa vie, mais malheureusement, on ne la choisit pas.

" - Et vous comptez faire quoi ? Aller parler au proviseur pour rapporter le comportement de ces imbéciles ? Ils n'en valent pas la peine. La seule solution serait que je quitte cet établissement, je sais même pas pourquoi j'ai mis les pieds là-dedans."

Si, il le savait, il n'avait pas le choix parce que l'école est obligatoire, mais personne ne pouvait l'y obliger, il était seul contre les autres depuis bien des années. La solitude était devenue sa meilleure et unique amie. Il n'avait cependant pas refuser l'aide de son enseignant, ce qui était déjà une bonne chose étant donné qu'en temps normal, il serait déjà parti sans même prendre le temps d'écouter ce qu'il avait à lui dire.

Johan & Isaiah

Cauchemar éveillé

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Je ne pouvais nier que je trouvais cela particulièrement triste, voir à quel point le jeune homme dégradait sa personne, minait son estime personnelle. Peut-être cela était du à sa maturité, au fait que tout semblait pire compte tenu du fait qu’il était plus jeune que les autres. Parce que même si certains plans, ça ne se voyait pas, il n’en demeurait pas moins que dans des cas comme ça, moi, je pouvais le percevoir, parce que je sentais qu’il manquait de confiance en lui, signe comme quoi il n’était pas prêt à se mêler aux autres. Après, ça n’expliquait pas tout, mais j’avais un doute comme quoi ça venait changer certaines choses, faire pencher la balance un minimum. Sauter des années après tout, ce n’était pas chose simple, même si Johan devait avoir des capacités intellectuelles exceptionnelles pour en être arrivé là. Par contre, il ne pouvait pas être en contrôle de toute situation, et c’était tout à fait normal, il n’y avait pas moyen de lui en vouloir. Décidant de ne pas me fier qu’à cela, je me retrouvai malheureusement à ne pas savoir quoi dire, et ce ne fut pas mieux au moment où il en vint à penser qu’il ne méritait pas mieux que ce qui lui arrivait. Plus encore, je me sentais quelque peu concerné par ses propos, non pas que je me sentais coupable, mais parce que maintes fois, alors que j’étais un adulte, je m’étais senti comme tel. Enfin, ce n’était pas concernant ma relation avec mes collègues ou au lycée, mais encore et toujours avec ma femme, quand je pensais à partir, à changer de vie, mais que je finissais par me résigner en me disant que peut-être je ne pourrais pas avoir mieux et que je pourrais me contenter de mon simple sort. Mais n’osant pas vraiment m’aventurer sur une histoire personnelle, je cherchai encore et toujours quoi répondre, n’osant pas en venir à lui poser une question qui était susceptible d’être qualifiée comme étant indiscrète. Je voulais l’aider, faire mon possible, mais je ne voulais pas lui faire prendre peur, ou bien qu’il vienne à croire que j’étais trop insistant ou un truc du genre. Tentant de garder ma contenance, ce fut toutefois trop à ses derniers propos, quand il en vint à parler de s’enfuir, changer d’école, je compris que je ne devais pas rester sans rien dire. Passant outre toutefois les possibles solutions, parce qu’il était évident que je ne pourrais pas rester sans avertir la direction, mais après, je ne savais ce que je pourrais faire, je préférai lui demander: « Pourquoi dis-tu que tu n’es pas quelqu’un de bien ? Pourquoi parles-tu ainsi de ta personne ? » Je savais que je sonnais plus comme un psychologue plutôt qu’un professeur de sport, et je n’étais pas certain que cela me seyait correctement, amis ce que je voulais savoir surtout, c’était si ces élèves avaient miné son estime personnelle à ce point, ou bien s’il y avait autre chose, et si c’était la seconde option, si je pouvais l’aider. Après, encore fallait-il qu’il veuille bien se confier et m’en parler plus amplement, autrement ce ne serait juste pas possible de faire quoi que ce soit, et pour le faire réintégrer le cours de sport, ce serait loin d’être gagné.

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Depuis des années, Johan n'avait plus confiance en lui, et cela ne risquait certainement pas de s'arranger avec ce qu'il subissait tous les jours au lycée. Il était conscient que son handicap d'enfant surdoué ne l'aidait pas. Personne ne lui avait jamais appris à l'apprivoiser et aujourd'hui il avait beaucoup de mal à vivre avec. De nombreuses fois les parents présents dans sa famille d'accueil lui avaient signifié que ce n'était pas un handicap, il devait au contraire en faire sa force. Peut-être même qu'à l'avenir il allait voir son "don" de la sorte, mais pas tant qu'il serait dans cet établissement scolaire, c'était une certitude.

Le jeune garçon avait toujours eu du mal à avoir confiance en lui, d'une part parce qu'il avait perdu ses repères lorsqu'il était encore qu'un gosse, pas de père, aucun repère masculin et aujourd'hui, il n'avait pas le choix que de devoir avancer seul sans aide. Enfin, c'est de la sorte qu'il voyait son existence, il lui suffisait de demander de l'aide, chose qu'il n'avait fait. Par fierté ou simplement par peur d'être utilisé, manipulé.

" - Pourquoi ? Parce que c'est la vérité."

Johan ne le connaissait pas, et même à des personnes qu'il côtoie il n'a jamais raconté dans quelles conditions il vivait ici. C'était trop dur et ça l'exposerai directement aux yeux des autres pour pouvoir le faire encore plus souffert. L'allemand ne s'était jamais plains, mais ce n'est pas pour autant qu'il est content de la vie qu'il mène aujourd'hui. Quitte à choisir, il aurait préféré être monsieur tout le monde, se fondre dans la masse et vivre son petit bonhomme de chemin auprès de ses deux parents. Mais il faut croire que la vie n'est pas clémente avec tous et que Johan en fait partie. Il essaye simplement de survivre du mieux qu'il peut.

" - Ça vous ai jamais arrivé de vous lever le matin en vous demandant pourquoi vous êtes encore là ? Pourquoi chaque jour vous vous battez pour atteindre vos objectifs ? Et bien c'est ce qui m'arrive tous les matins quand je me lève, ou du moins quand j'ai réussi à dormir quelques heures."

Il avait beau avoir que treize ans, il ne demeurait pas moins qu'il avait déjà des problèmes d'adultes. S'il continuait sur le chemin qu'il empruntait il risquait même d'avoir de gros soucis. Pour le moment, ça avait toujours été des petits vols sans violences ni conséquences, mais à jouer avec le feu, on s'y brûle. Et s'il a un casier judiciaire il sait parfaitement qu'il peut faire une croix sur ses études de droit pu du moins, son ambition de devenir avocat.

" - La vérité c'est que je me demande pourquoi je viens en cours, la seule véritable raison est sans doute l'obligation de la scolarité, mais si je n'y vais pas, il n'y aura personne pour me forcer à y retourner. J'ai toujours été seul et ça ne change pas aujourd'hui".

À l'entendre parler, on pourrait croire qu'il fait sa crise d'adolescent, mais c'est bien plus grave que ça, il est en dépression depuis tant d'années que c'est devenu son mode de vie normal, il considère ça comme un simple passage à vide, mais ça fait des années qui est dans ce tourbillon sans pouvoir s'en sortir.

" - Si vous allez voir la direction et qu'ils l'apprennent ce sera encore pire. Ils m'en ont fait la promesse et je sais de quoi ils sont capables, ils ont déjà fait bien pire depuis le peu de temps où je suis ici. Tout cela ne se calmera que si je pars, et c'est peut-être la seule chose de bien que je ferai dans ma vie."

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Cauchemar éveillé

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Si d’un côté, il semblait fragile et vulnérable comme un enfant, de l’autre, Johan tenait des réflexions que certains adultes ne parvenaient pas à faire encore, au vu de leur caractère psychologique et philosophique. Il vint à me le prouver non pas quand il vint à réitérer qu’il n’était pas une bonne personne, mais quand il vint à me demander si je me remettais en question parfois, précisant que lui, c’était ce qu’il faisait chaque jour, venant me confirmer mon hypothèse déjà bien établie comme quoi son estime de lui-même était complètement minée, à croire qu’il ne serait pas possible de la reconstruire de quelconque façon. Après, éternel optimiste malgré le fait que je trouvais la situation on ne peut plus triste, je ne comptais pas baisser les bras de si tôt, même s’il était vrai que la route serait loin d’être facile. Mais pour y parvenir, encore fallait-il que je trouve les bons mots, même si ce n’était clairement pas la chose la plus simple à faire. Toutefois, je décidai de me magner à lui répondre un peu plus clairement, lui fournir des réponses, même si ce n’était pas parfait, même si c’était maladroit. Tout ce que j’espérais, c’était que je n’allais pas dire quelque chose de trop maladroit susceptible de tout gâcher. Prenant mon courage à deux mains, je répondis à ses questions en lui disant, aussi sincèrement que possible: « Oui, ça m’est déjà arrivé. » Et c’était la vérité. Mais encore une fois, c’était par rapport à mon mariage plus qu’autre chose, pas par rapport à mon métier ou quoi que ce soit du genre, au contraire, c’était ce qui m’avait permis de m’accrocher aussi longtemps, puisqu’autrement, je ne savais pas ce que je pourrais faire. De ce fait, j’en vins à la conclusion bien rapidement qu’une potentielle solution était que Johan trouve quelque chose à quoi s’accrocher pour passer à ce qui semblait être des temps difficiles, que ce soit un cours qui lui plaisait, un projet personnel ou quoi que ce soit, mais avant que je ne puisse lui parler dans ce sens, il reprit la parole, venant quelque peu miner ma théorie en me disant que s’il venait en cours, c’était surtout parce qu’il était obligé et rien d’autre. Bon d’accord, ce n’était pas tout perdu, mais trouver de quoi le faire accrocher en ces lieux, ce ne serait pas l’idéal. Déglutissant, je ne sus répondre aussi rapidement que j’aurais voulu le faire, le laissant alors renchérir comme quoi le mieux pour lui était de partir. Là, ce ne fut pas très long pour que je rétorque, m’opposant à cela comme étant une solution: « Partir va signifier qu’ils ont gagné et qu’ils ont raison d’agir ainsi alors que ce n’est pas le cas. » Je ne voulais pas traiter le jeune homme de lâche non plus, mais je voulais que ce soit clair que non, ce n’était pas une solution, et j’y tenais fermement. Me radoucissant par la suite, je continuai en disant: « Après, si tu veux… Aller ailleurs, pour d’autres raisons, sache que je ne peux te retenir. Enfin, techniquement, je ne peux pas… » Mais où pourrait-il aller ? Le lycée le plus près n’était pas si près que ça, alors s’il habitait dans le coin, ce ne serait certainement pas l’idéal pour lui… Fronçant les sourcils, je décidai de considérer la question autrement, et lui demander: « Il y a quelque chose qui te plait ici ? Peut-être un cours, une activité ? » C’était peut-être petit comme idée, mais si cela pouvait aider ne serait-ce qu’un peu, alors ce serait là un petit pas vers le progrès, et je ne pourrais certainement pas m’en plaindre.

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Johan a beau avoir parfois certaines réflexions que des adultes auraient pu tenir, parce qu'il n'a pour ainsi, pas eu d'enfance. D'abord le décès de sa mère, ensuite son placement en foyer pour jeunes et pour finir une famille d'accueil. Est-ce vraiment la vie rêvée pour un gamin de treize ans ? Certainement pas. Mais en dehors de certaines réactions matures qu'il peut avoir dû à son vécu, le jeune allemand reste tout de même un enfant, un enfant qui a souffert et qui souffre toujours. Ce masque qu'il enfile pour faire croire que tout va bien n'est qu'une façade. Au fond, il est fragile et ne demande qu'à être aidé et soutenu.

Johan savait parfaitement que peu importe la décision qu'allait prendre le professeur pour "régler cette histoire", ça finirait par lui retomber dessus. Parce que les plus grands et les plus populaires du lycée voyaient en lui le petit nouveau, celui qui n'a pas d'amis et qui fait une cible idéal pour s'en prendre à lui sans avoir de problèmes. D'autant plus que, comme si l'allemand pensait mériter ce qui lui arrivait, il ne cherchait pas à se défendre, il se laissait faire, parfois même, lorsqu'un groupe de trois ou quatre élèves s'en prenaient à lui, il restait immobile, attendant que son sort lui tombe dessus.

Si Johan était venu à Washington, ce n'était pas réellement par plaisir, il voulait retrouver son père biologique, se faire au moins une idée de ce à quoi il ressemblait, et pourtant, il avait l'impression que quoiqu'il fasse, cela n'aboutirait jamais. Finalement il aurait peut-être dû rester en Allemagne, là où il avait ses repères, là où, malgré une existence pas forcément joyeuse, il avait un toit, des personnes qui prenaient soin de lui. Il avait tout quitté pour retrouver cet homme, qui si ça se trouve n'en aurait que faire de lui. Chaque jour, il ne cessait de se demander s'il avait bien fait de quitter sa vie d'avant pour l'inconnu.

" - Si je suis venu ici, c'est simplement parce que je voulais retrouver quelqu'un, mais aujourd'hui je crois que c'est du temps perdu. Je n'ai aucun repère, aucune connaissance dans cette ville."

En somme, rien pour se rattacher à la vie et l'envie de se battre. Puis, il écouta les propos de son enseignant. Techniquement il ne pourrait pas le retenir, mais en avait-il vraiment envie ? Pourquoi s'attarder sur un gamin comme lui ? Dénué d'intérêt et cible des plus grands, il n'y avait pas grand chose à en tirer.

" - Dans cet établissement ? Non. Ce que je veux c'est étudier le droit. Devenir avocat, c'est la seule chose dont j'ai réellement envie."

Mais il savait aussi que pour cela, il fallait avoir un bon dossier scolaire et un casier judiciaire vierge, ce qui n'allait pas être le cas s'il continuait de subtiliser des choses pour manger chez les commerçants. Johan jouait avec le feu devant son arrivée, tôt ou tard, il allait s'y brûler, que ce soit en se faisant prendre par les forces de l'ordre, en se faisant agresser parce qu'il a piqué le territoire d'un sans-abri. Sa vie ne tenait qu'à un fil.

" - Pendant les cours ici je m'ennuie.. Tout ce qui est programme je le connais déjà, ou quasiment en tout cas. J'ai pas besoin de m'attarder des heures pour apprendre des leçons, il me suffit de les lire une fois ou même de mémoriser un visuel et ça me suffit."

Johan venait d'avouer à demi-mot le "don" qu'il possédait, ce qui expliquerai sans doute beaucoup de choses. Dont le fait qu'il préfère se faire passer pour un mauvais élève qu'un brillant garçon avec des notes excellentes. C'était sa manière à lui de cacher le fait qu'il soit surdoué. Ce qui, il n'en doutait pas, lui causerait encore plus de soucis vis-à-vis des plus grands.

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Je dus avouer que je fus quelque peu surpris d’entendre le jeune étudiant m’avouer qu’il était venu en ville pour retrouver une personne. En vérité, je ne savais même pas qu’il venait tout juste d’arriver, si c’était le cas, considérant le fait qu’il venait d’entrer au lycée, comme bien des élèves dont je ne connaissais pas la provenance non plus, et c’était tout à fait normal, surtout à la première année. Mais était-il venu de son propre chef ? N’était-il pas avec quelqu’un ? Un parent ? Un tuteur légal ? Un paquet de questions se formaient dans ma tête, sans que j’y trouve une réponse. Pire encore, ce n’était pas comme si je pouvais vraiment me permettre de lui poser ces question. Enfin, techniquement, rien ne m’en empêchait, mais mes principes faisaient en sorte que je refusais de le faire, et je me disais que c’était logique, dans le sens où encore et toujours, je refusais de le faire fuir. Heureusement pour moi, il me donna de quoi lui répondre quelques instants plus tard, au moment où il me dit qu’il avait pour ambition d’étudier le droit, devenir avocat. Pour la première fois depuis le début de cette discussion, voire même depuis le début du cours, j’esquissai un petit sourire. Cependant, par souci de politesse, je ne le laissai pas plaqué sur mes lèvres bien longtemps, histoire de montrer que je ne voulais pas me moquer de la situation, qui était on ne peut plus sérieuse à mes yeux. Reprenant ma contenance, ce fut quand même sur un ton doux, mais plus optimiste, que je lui répondis: « C’est un très beau projet que tu as là… » Malheureusement, tout ne pouvait pas être aussi simple. J’avais beau être du genre à prendre le côté positif des choses, il n’en demeurait pas moins que j’étais réaliste, et là, je me devais de l’être, et de me résigner à lui dire: « Mais pour y parvenir, tu dois terminer le lycée… » Après, jamais il ne m’avait dit qu’il n’allait pas terminer ses études, mais il était évident que la motivation pour cette étape de sa vie n’était pas là, malgré cette ambition, et pour lui, elle paraissait encore plus difficile, mais pas parce qu’il manquait d’intelligence. S’il était là alors qu’il était si jeune, c’était pour une raison, raison dont on ne m’avait pas fait part, mais que je pouvais deviner. Et le tout me fut confirmé quand il vint à m’avouer que pour lui, tout était simple, trop simple même, et que ça venait à l’ennuyer. Jamais je n’avais été confronté à une telle situation, mais je pouvais quand même comrpendre que pour cette raison, le plaisir d’apprendre n’était plus là au bout d’un moment, parce qu’il n’était pas assez mis au défi. Mais comment pallier à ce don qu’il avait, en quelques sortes, dans un lycée public, sans trop de ressources ? Fronçant les sourcils, je réfléchis un peu, et je dis: « Tu as déjà tenté… De demander à tes enseignants de te donner du travail supplémentaire ? » Ça semblait étrange, même pour moi, une telle proposition, mais j’essayais comme je peux de trouver une idée, une solution. Puis, en y songeant, je constatai que ce n’était pas si horrible comme idée, plus exactement quand je repensai à un enseignant en particulier, ce qui me poussa à ajouter : « Je sais qu’il y a un enseignant en sciences, monsieur Watson, je ne sais pas si tu l’as, mais il travaille toujours sur un paquet de projets et d’expériences… Il semble un peu seul dans son délire, mais je suis certain que si ça peut intéresser quelqu’un, rien ne lui ferait plus plaisir… » Je n’allai pas plus loin sur la question, ignorant à la base s’il avait cet enseignant, décidant de la tourner autrement, toujours en allant plus loin dans ma proposition, en disant, dans un haussement d’épaules: « Et puis… Si tu veux en savoir plus sur les règlements des sports qu’on pratique en classe… Je peux t’en parler, ça ne me gênera pas… » Après, je savais que le sport n’était pas son truc, mais peut-être la théorie serait préférable à la pratique ? Et qui sait, peut-être pourrions nous trouver une alternative ? Prioriser les examens écrits à la pratique ? Il ne me serait pas possible de complètement la retirer, mais si je pouvais trouver de quoi compenser, je ne dirais pas non, surtout si cela pouvait l’aider.

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Johan ne cessait de se demander si finalement il avait eu raison de venir pour retrouver l'homme qui lui avait donné la vie. En réalité, il n'y croyait plus, il ne le retrouvera probablement jamais, comment cela pouvait être possible avec le peu d'informations dont il disposait ? La vie est un long combat où la chance ne compte pas, donc il ne devait pas baisser les bras, et pourtant, quand il est au plus bas, il ne peut s'empêcher de penser à ceux qui ne sont plus là, à sa mère en l'occurrence. Aurait-elle aimé qu'il retrouve cet homme ? "Tout vient à point à qui sait attendre, il faut croire en soi car les gens avec toi ne seront pas tendres" ce n'est qu'aujourd'hui qu'il comprend vraiment l'impact des paroles de sa mère.

Pendant un moment, le jeune allemand avait l'impression que son projet de devenir avocat et d'étudier le droit avant toute chose était démesuré, encore plus lorsqu'il perçu le sourire sur le visage de son enseignant. Est-ce qu'il se moquait de lui ? Est-ce que c'était un sourire censé pouvoir l'encourager dans son ambition de projet professionnel ? Il n'en savait trop rien, et pour une fois, il décida de ne pas tirer de plans sur la comète afin de ne pas mettre le feu aux poudres alors que l'enseignant ne semblait pas lui vouloir de mal. Bien malgré lui, Johan n'arrivait tout de même à lui faire entièrement confiance, bien trop souvent les personnes avaient fini par profiter de sa jeunesse. Jeune peut-être, mais il était loin d'être naïf, ça c'était une certitude.

Les propos de son professeur failli le faire sortir de ses gonds. Il le savait qu'il devait terminer le lycée pour faire ce qui lui plaisait. Johan ne vivait pas sa vie avec passion et plaisir, il subissait chaque jour qui passaient, redoutant un peu plus le prochain. Non seulement il venait en cours pour se faire reprendre à l'ordre par les professeurs parce qu'il ne faisait rien en cours, passant son temps à rêver, il se fait à moitié tabasser par ses soit disant camarades de classe avec les moqueries enfantines et pour finir, venir dans cet établissement lui coûtait beaucoup après avoir passé une nuit dans la rue.

" - À quoi bon leur demander ça ? Ils se sont mis en tête que j'étais un bon à rien et que j'arriverai à rien."

Bon il était tout aussi fautif parce qu'il avait largement contribué à cette image que ses enseignants s'étaient fait de lui. Il avait fait en sorte qu'ils pensent qu'il était incompétent plutôt de leur avouer qu'il s'ennuyait dans chaque cours auquel il participait. Il se doutait bien qu'entre eux, ils avaient dû évoquer le cas perdu qu'il était, mais aucune mesure n'avait été prise. Johan était un bon à rien, un incapable qui n'arrivera à rien dans sa vie. Voilà ce qu'il entendait de certains professeurs qui essayaient de le faire réagir d'une manière plutôt brutale.

Le garçon écouta les paroles de son professeur lorsqu'il lui parla d'un certain professeur de sciences. Son professeur de sciences. Il n'avait pas échapper au traitement que Johan réservait à ses professeurs. Il ne participait jamais, assit au fond de la classe, laissant son esprit divaguer en regardant par la fenêtre. Il n'avait jamais preuve d'un quelconque intérêt pour sa matière, est-ce que ce serait lui manquer de respect que de lui demander de l'aide maintenant ?

" - Je doute que ce soit une bonne idée.. Je n'ai jamais fais quoique ce soit pendant son cours, je ne pense pas qu'il appréciait que je me réveille seulement maintenant.."

Puis soudain, face à l'alternative que lui proposait le jeune homme, Johan crut qu'il se moquait de lui. Est-ce qu'il pensait vraiment ce qu'il venait de dire ? Si c'était le cas, ce pourrait intéresser l'allemand d'en savoir plus sur les sports pratiqués bien que les pratiquer lui-même ne lui plaisait pas.. En vrai, c'est surtout parce qu'avec sa silhouette toute fine, il savait qu'il n'avait aucune chance contre ces brutes qui ne feraient qu'une bouchée de lui. Peut-être que si c'était un autre sport, Johan aurait pu faire des efforts, mais pas dans cette séance.

" - Vous êtes sérieux ?"

Pendant un moment Johan allait accepter, avant de finalement se rétracter.

" - Non oubliez, ça vous donnera du travail en plus et de toute façon je ne peux pas faire des devoirs en rentrant chez moi."

Chez lui était un bien grand mot, il n'y avait pas deux nuits d'affilée où il pouvait dormir au même endroit. Ça aussi c'est un facteur de stress supplémentaire qui ne lui donne pas envie de se rendre au lycée.

Johan & Isaiah

Cauchemar éveillé

You don't need to feel bad about who you are

J’étais conscient que mon idée n’était pas très organisée, n’était pas du déjà-vu - pas me concernant en tout cas - et que peut-être il faudrait du temps et de l’organisation pour que tout se mette en place, mais avant de passer à l’action, encore fallait-il que le jeune homme soit d’accord, sauf que bien malheureusement, celui-ci semblait tout sauf peu convaincu. Premièrement, concernant ses autres enseignants, il ne se voyait pas le demander, puisqu’il avait déjà décidé de jouer le rôle de celui qui ne comprenait rien. Pourquoi ? Pour ne pas se faire embêter davantage ? Pour ne pas que les enseignants viennent à exiger plus de lui ? Pour qu’ils ne soient pas vexés s’ils venaient à savoir qu’il comprenait tout du premier coup et qu’il ne devait pas rester bien longtemps dans la classe ? Je ne saurais pas le dire, et je ne pouvais pas vraiment le comprendre, sachant que si j’avais eu un tel don, personnellement, je n’aurais pas réagi de la sorte. Mon premier réflexe aurait été certainement d’aider les autres dans les matières où j’étais le plus fort, mais ça, je me ravisai de le dire. Persévérant, j’avais choisi de continuer sur ma lancée, en venant même à rapporter l’idée au cours de sport, lui proposant une alternative, alternative que s’il acceptait, je serais prêt à faire, même si cela me prenait plus de temps à organiser. De toute façon, ce n’était pas comme si je manquais du temps ces derniers temps. Je ne me plongeais pas volontairement dans le travail, mais disons que rester à l’école pendant la soirée et la nuit me poussait à prendre de l’avance, à une vitesse faramineuse comparativement à ce que j’avais fait les années précédentes. Mes plans de cours se ressemblaient d’une année à l’autre, c’était évident, mais je tentais toujours de changer, histoire de ne pas tomber dans la monotonie non plus. Et normalement, je n’étais pas prêt des masses d’avance, juste suffisamment pour ne pas être complètement perdu. Par exemple, à cette période de l’année, mon programme était souvent prêt jusqu’aux vacances de Noël, pour tous les niveaux auxquels j’enseignais, sauf que là, pour certains, j’avais terminé le programme jusqu’à la fin de l’année scolaire. Par conséquent, ça me donnait du temps libre, temps libre que je pourrais très bien utiliser pour faire de plus amples recherches, d’autant plus que ce ne serait pas très complexe, sachant que je connaissais les règles des sports que j’enseignais. Je ne connaissais pas tous les détails, les exceptions, mais je pourrais toujours les apprendre par la même occasion, ce n’était pas un problème. De ce fait, lorsque Johan en vint à me demander si j’étais sérieux, je ne pris pas la parole, mais je lui fis savoir que oui, d’une façon que j’estimais plutôt claire, c’est-à-dire avec un hochement de tête positif et un haussement d’épaules, ce dernier étant destiné à lui montrer que cela ne me gênait pas le moins du monde. Sur ce, je continuai à le regarder en attendant sa réponse, espérant que celle-ci soit positive, et pendant un bref instant, je crus voir une petite étincelle inédite dans ses yeux, me faisant croire qu’il serait capable d’accepter mon aide. Malheureusement, cette étincelle s’éteignit aussi rapidement qu’elle était venue, puis il refusa. Quelque peu désappointé, je ne sus pas quoi dire. Devais-je insister en lui disant que ce n’était pas du tout du travail de trop pour moi ? Ou bien lui demander pourquoi il disait ne pas pouvoir travailler une fois chez lui ? Pinçant les lèvres, je décidai de faire quelque chose qui ne me plut pas tant, soit lâcher prise. Non sans être totalement confortable avec cette idée, je lui répondis: « C’est toi qui vois… » Après tout, que pouvais-je faire d’autre ? L’obliger ? Lui demander de changer ses habitudes ? Ce n’était pas moi. Tout ce que je voulais, c’était aider, ne pas lui imposer un truc susceptible de le dégoûter encore plus de l’école au final. Par contre, refusant de lâcher prise comme ça, sans rien ajouter, je dis par la suite: « Mais si jamais tu changes d’avis, tu sais où me trouver… » Je savais que ça ressemblait à une fin de conversation, même si je n’étais pas certain que ça en soit une. Laissant mes dires en suspens, j’attendis quand même avant de dire ou faire quoi que ce soit d’autre, au cas où Johan voulait ajouter quelque chose, changer d’idée, ou juste s’en aller.

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