Un rendez-vous qui nous laisse sur nos gardes. ○ Tommy

Il y a quelques semaines de cela, un conseiller avait eu comme idée d’acheter un des hôtels les plus réputés de la ville ou plutôt, l’annexer à la chaîne. Dans un premier temps, personne n’avait voulu l’écouter, puisque personne ne comprenait pourquoi il tenait tant à faire une chose pareille, moi le premier. Cependant, parce que je me rappelais chaque fois qu’on m’avait donné une nouvelle chance en ces lieux alors que peut-être, je n’en méritais pas, j’avais décidé d’écouter ses arguments, y réfléchir, considérer ses documents, tous ces plans qu’il avait créés pour prouver son point. Décidant de prendre son parti, sachant que ce serait une alliance qui aurait du bon non seulement pour l’entreprise, mais aussi pour cet hôtel qui, si j’avais bien compris, était indépendant, j’étais finalement parvenu à convaincre le reste du conseil d’administration de procéder aux négociations pour cette annexion. Évidemment, cela n’avait pas fait plaisir à tout le monde, sans que je comprenne pour moi, si bien que pour faire taire la majorité de ces gens, j’avais décidé d’aller payer une visite à la propriétaire de l’hôtel moi-même. Jouant de mes contacts, j’étais parvenu à obtenir un rendez-vous qui avait lieu aujourd’hui. Compte tenu que celui-ci avait lieu en matinée, je n’avais pas jugé nécessaire de me rendre à mon bureau avant. J’avais pu me lever un peu plus tard, et surtout, me préparer un peu plus soigneusement. Ce n’était pas mon genre, et pour sûr, cela ne me faisait pas plaisir de me regarder dans un miroir et me sentir transformé en un de ces hommes d’affaires trop formels, trop coincés, mais pour la cause, c’était nécessaire. Cependant, je n’en fis pas trop non plus, me contentant d’un pantalon noir, d’une chemise blanche et d’un veston noir des plus élégants, sans mettre de cravate, ce qui donnait, en mon sens, un air quand même distingué, mais pas trop formel non plus. Satisfait, j’avais quitté ma demeure non pas dans mon camion habituel, mais plutôt dans ma voiture de luxe, celle que je gardais pour les occasions particulières, comme celle-ci. Enfin, ce n’était pas une soirée ou quoi que ce soit du genre, et je ne voulais pas paraître vantard, mais je me disais que pour le coup, ce serait un signe de confiance, comme quoi l’entreprise était solide, bien installée financièrement, et moi aussi par la même occasion. Garé devant l’hôtel, j’y entrai, m’annonçant et mentionnant le rendez-vous à l’accueil. Peu de temps après, on me conduisit dans un bureau, celui de Madame Queens, propriétaire des lieux. Lorsque je me trouvai devant elle, ce fut un peu plus en confiance que je considérai son sourire, et ce fut de façon polie que je lui répondis:  « Madame Queens. » Parce que j’avais beau être un gamin dans ma tête, je savais quand même comment me tenir… Parce qu’on m’avait appris comment faire, essentiellement. Pour cette même raison, je ne me fis pas prier pour m’asseoir lorsqu’elle m’invita à le faire, déposant l’attaché-case que j’avais apporté avec moi - bien que j’aurais préféré un sac à dos - au sol, non loin, sachant qu’éventuellement, j’en aurais probablement besoin. Puis, je reportai mon attention en sa direction, et je dis:  « Oui, merci. » De nature loquace pourtant, je ne vis pas l’intérêt de m’éterniser sur cette question. Ce n’était pas comme si j’étais parti de New York pour venir ici. Vingt minutes de ma demeure et c’était chose faite, d’autant plus que l’hôtel était non loin de l’immeuble de Grayson Towers - une autre raison pour procéder à l’annexion, mais ça, j’allais en parler plus tard. Puis, après une brève pause, je décidai de dire, le sourire aux lèvres, histoire de ne pas me montrer agressif ou quoi que ce soit du genre, parce que même si j’étais plus formel que d’habitude, je ne voulais pas me comporter comme une personne que je n’étais pas:  « Je suppose que vous savez déjà pourquoi j’ai demandé à vous rencontrer aujourd’hui… » Je n’allai pas plus loin dans mon propos, attendant de voir ce qu’elle me dirait, espérant que ses propos aideraient à orienter ce que j’allais affirmer par la suite.