Donnez, donnez moi ! (Tommy x Edmund)

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donnez, donnez moi !

Vérifiant une dernière fois –comme toujours- qu’il n’avait rien oublié derrière lui, Edmund quitta son appartement, plusieurs dossiers dans sa serviette, et prit la direction de l’université. Quiconque croit que la vie des professeurs semble s’arrêter pendant les vacances et ne devenir qu’un vaste moment de détente (s’il a tout de même raison dans le cadre d’un certain nombre d’enseignants) néglige tout le travail administratif et organisationnel d’une poignée de professeurs zélés et ayant à cœur de bien faire leur travail. Edmund était de ceux-là, et pendant son été, il avait multiplié les allers-retours avec son bureau (d’ailleurs il ne s’en plaignait pas, il aimait son travail, et puis, il arrivait qu’un de ces trajets soit agrémenté de rencontres plutôt agréables). Aujourd’hui, il devait rencontrer Monsieur Grayson, un riche homme d’affaire assez en vue, avec lequel d’ailleurs pas mal de snob devaient rêver de pouvoir discuter un peu. Il y avait ce soir à l’université une réception pour les mécènes qui permettaient aux projets les plus ambitieux de l’Alma Mater de se réaliser, et pendant laquelle une partie des fonds destinés à la recherche était dépensée en petits fours pour remercier les généreux donateurs, qui pour certains s’intéressaient réellement à ce qu’ils finançaient, mais pour la plupart s’intéressaient à un moyen intéressant de réduire leur imposition ou de se faire une bonne publicité : financer des études, des recherches ou des évènements très sérieux aide à donner une bonne image de soi, surtout pour ces quelques nouveaux riches qui ont fait leur fortune d’une manière jugée peu valorisante pour la bonne société à laquelle ils appartiennent maintenant, et dont ils doivent adopter les codes pour y être acceptés.

Ainsi, Edmund avait dû travailler à l’organisation de plusieurs évènements. En tant que prof de philo, les évènements dont il avait la charge étaient plutôt restreints comparés à ceux qu’organisaient les facultés de sciences et de médecines avec leurs expériences plus que dispendieuses : il faisait pâle figure à côté de ses brillants collègues scientifiques. Néanmoins, l’organisation, même d’un colloque philosophique, s’avérait être particulièrement désagréable, fastidieuse et agaçait tout à fait Edmund qui détestait être noyé dans les papiers. Il arriva donc avec ses trois dossiers, et se dirigea vers la salle de réunion où il recevrait Monsieur Grayson pour discuter avec lui. Il fallait mettre au point le financement de ses projets : rien de franchement faramineux, mais l’université avaient des coûts de fonctionnements élevés, et les budgets qui restaient pour financer des projets supplémentaires allaient très rarement en direction de la philosophie ou des sciences du langage qui, il faut le dire, sont loin d’être les matières les plus séduisantes qu’on enseigne, et ne déplacent que rarement les foules.

Ed arriva donc en salle de réunion –elle était beaucoup plus vaste que son bureau, même s’il avait la chance d’en avoir un des plus grands de la fac- et sortit ses dossiers de sa serviette. Après être allé vérifier s’il restait à boire dans la petite remise contigüe, il ressortit et se dirigea vers le hall d’entrée du bâtiment où il recevrait Monsieur Grayson pour l’accompagner jusqu’au lieu de leur entrevue (qu’il ne trouverait jamais tout seul vu le dédale de couloirs, qu’Edmund avait mis un certain temps avant de maîtriser).

-Ah Monsieur Grayson, comment allez-vous ? Si vous voulez bien me suivre, je vous conduis à la salle de réunion. La salle où nous nous étions rencontrés la dernière fois est occupée aujourd’hui, et nous nous sommes donc retrouvés parachutés ici…

Aucune doléance dans la voix d’Edmund qui ne déplorait pas que lui ait échu cette salle plutôt qu’une autre, mais une simple constatation. En réalité, l’éloignement ne lui déplaisait pas, il aimait bien être au calme, loin de l’agitation, alors cette salle de réunion un peu perdue dans ce bâtiment presque vide, c’était plutôt une bonne chose. Parce qu’en face de ça, le bâtiment principal était grouillant, plein, et de petite mains qui s’afféraient pour la réception de ce soir, et de professeurs ou d’autres personnels de l’université qui, ainsi qu’Edmund, planchaient sur leurs dossiers de financement et d’organisation.

-Nous y voilà. Je vous en prie, installez-vous. Avant que nous ne commencions, peut-être aimeriez-vous boire quelque chose ? Il y a là du café, du thé… à moins que vous ne préféreriez un whisky ? J’imagine qu’un homme tel que vous doit avoir accès à des flacons d’une autre classe que celui-là, mais je crois pouvoir dire qu’il est loin d’être médiocre.

Edmund pouvait le dire parce qu’il avait lui-même fait l’achat de ce flacon et l’avait apporté ici, lassé de n’avoir droit qu’à un breuvage infâme acheté par un collègue particulièrement radin (et qui ne s’y connaissait pas) et qui n’avait même pas trouvé cela criminel que d’empoisonner le corps professoral avec un digestif pas très digeste. Alors que lui-même était pourtant plutôt économe, l'avarice des autres lui était insupportable -surtout lorsqu'il s'agissait d'un collègue.

-Bon, j’ai trois dossiers sur la table… ce ne devrait pas être trop long ; bien que nous ne soyons pas pressé, la soirée ne commence qu’à dix-neuf heures… avez-vous des questions ou voulez-vous abordez un point en particulier avant que nous ne commencions ?

(c) chaotic evil

Edmund & Tommy

Donnez, donnez-moi !

Depuis que je m’étais finalement décidé à reprendre l’entreprise familiale pour de bon et en faire quelque chose qui me ressemblait un peu plus, histoire de ne pas rester dans l’ombre de mon paternel, dans l’ombre de la déception de ma mère que ce soit moi et pas mon frère à la tête de la compagnie, j’avais fait plusieurs changements qui, pour le moment, me plaisaient, et ne faisais plus tant de remous, même si dans un premier temps, les choses n’avaient pas été des plus simples. Par contre, dans ses changements, j’avais compris bien rapidement qu’il y avait certaines choses que je ne saurais modifier, que ce soit par principe, parce que ça ne m’affectait pas tant, ou bien parce que je n’avais aucune raison valable de le faire. Par exemple, j’étais conscient que mon père faisait plusieurs dons en son nom personnel, au nom de l’entreprise, à des oeuvres caritatives, ou bien des institutions. Même si je savais que le concernant, c’était pour surtout bien paraître et se donner une bonne image, il n’en demeurait pas moins que je ne me voyais pas tout cesser pour autant, compte tenu du fait que ce n’était pas le genre de chose qui ferait sombrer l’entreprise, ou même mes revenus personnels. Couper les vivres serait en fait surtout égoïste et de ce fait, j’avais continué dans cette voie, même si cela impliquait que parfois, il me fallait me plier à des formalités, avec lesquelles je n’étais pas toujours très à l’aise. Mais n’ayant pas le choix, je m’y conformais, comme aujourd’hui, j’allais me rendre à l’université pour laquelle l’entreprise faisait toujours un don pour la recherche, ce genre de trucs. On m’avait déjà expliqué à quoi servait le montant, mais fidèle à moi-même, je n’avais pas été des plus regardants, et je n’avais pas été celui qui s’en était précisément souvenu. Quel était le point, après tout, sachant que cela changeait probablement à chaque année ? Ne m’en faisant pas trop avec cela, je me rendis sur le campus, comme je l’avais fait l’année précédente. Certains pourraient dire que j’étais d’avance, puisque la petite soirée pour célébrer le dit don n’avait lieu que plus tard, mais il était prévu que je rencontre un représentant pour parler de ce en quoi le tout allait consister. Pour tout dire, je me serais simplement contenté de cette rencontre, sans cérémonie par après, mais puisque je ne choisissais pas et que j’avais les mains liés, alors j’allais m’y plier, tout simplement. Une fois arrivé sur le campus, je me rendis à l’entrée principale, là où j’étais attendu par un professeur, le même que l’année dernière, si je me souvenais bien. Le tout me fut rapidement confirmé par le principal intéressé. Formellement, je lui serrai la main, lui répondant d’un ton poli: « Je vais bien merci, et vous ? » Puis, à sa remarque concernant la salle où aurait lieu la rencontre, je me contentai simplement d’accuser réception d’un hochement de tête, ne voyant pas d’inconvénient, prêt à le suivre. Peu de temps après, nous arrivâmes dans la dite salle, qui, en mon sens, n’avait rien d’une salle de seconde main. Après, je ne m’y connaissais pas des masses, alors j’étais mal placé pour faire quelconque commentaire, devant simplement me fier sur mon opinion, opinion qui n’était probablement pas utile dans le cas présent. M’installant comme il m’invita à le faire, je le laissai aller au bout de ses suggestions pour prendre quelque chose à boire. J’aurais pu opter pour de l’alcool, je n’étais pas celui à qui ça déplaisait, mais sachant aussi qu’il me faudrait quelque chose pour me garder éveillé en prévision de cette soirée, je préférai demander: « Un café, ça ira, merci. » Et puis, je me doutais bien que ce ne serait pas le genre de soirée où il n’y aurait pas quelconque boisson, alors je savais que j’aurais tout le temps de me rattraper. Considérant plutôt les dossiers, écoutant le professeur me demander si j’avais quelconque question, ou sujet à aborder, je fronçai les sourcils, signe que j’y pensais, et me rendant compte que non, pas vraiment, et que de plus, j’étais plus que mal placé de ce côté, au vu de mon manque de connaissances, je me contentai de simplement dire: « Je crois qu’on peut commencer. » Puis, avec un sourire poli, je m’installai un peu plus confortablement dans le siège, attendant de voir ce que le jeune homme allait me dire.