new member of the family w/lennon

Pourquoi ? Voilà la seule question, le seul mot qui pouvait résumer toutes mes interrogations par rapport à la dernière conversation que j’avais eue avec ma soeur aînée. Pourquoi ne pas faire appel à un médecin ? Pourquoi insister pour venir dans la base militaire ? Pourquoi penser que je pouvais lui venir en aide d’un point de vue médical ? Dans ma tête, rien ne faisait du sens. Zara était médecin - mes parents me le rappelaient bien souvent. Elle connaissait plusieurs médecins qui pouvaient lui venir en aide, dans un endroit pas mal plus approprié, et surtout beaucoup plus hospitalier. Pourquoi voudrait-elle donc de mes services, venant de moi, banal infirmier ? Le plus triste, c’était que je n’avais même pas eu le courage de le lui demander. Et dans le flou depuis ce moment, me rappelant cette conversation où je n’avais fait qu’accepter, sans argument pour appuyer l’avis contraire, j’en étais maintenant nerveux. Maintenant parce que ces derniers jours, j’avais pu l’oublier, mais le moment étant presque venu, je savais que je ne pouvais le nier et me dérober. Prétendre que je n’allais pas bien et tout annuler, ce n’était pas mon genre. J’aimerais bien que là, ce le soit, mais non, pas aujourd’hui. Ce que je pus faire seulement, c’était de tenter de composer avec ce stress, commencer ma journée comme si rien n’était, même si oui, il y avait de quoi me stresser. Et limite, ma condition était un avantage aujourd’hui, puisque la nervosité étant un trait caractéristique de ma personne, quiconque vint me demander ce qui n’allait pas, et honnêtement, ça m’arrangeait. Gardant tout cela pour moi jusqu’à maintenant, ça ne vint pas m’aider à me calmer quand le moment fatidique arriva, ce moment où j’entendis la voix de mon aînée surgir dans le couloir. Sourire poli, air nerveux, je lui répondis:  « Salut… » Je fus obligé de faire preuve de retenue pour ne pas lui demander tout de suite cette fameuse question qui me chicotait depuis ce qui me paraissait être une éternité. Mais à peine eussè-je fait quelques pas que ça me parut insupportable, alors je demandai:  « Tout… Tout va bien ? » Cela paraissait idiot, mais je me congratulai limite d’avoir dit que ça, et non pas avoir sorti quelconque pensée qui m’était passée par la tête ces derniers temps, même si, pour sûr, mon visage trahissait ma confusion, mais aussi, bien malgré moi, une certaine inquiétude, sachant que Zara ne faisait rien pour rien, et que malgré les tensions, elle restait, et resterait toujours ma soeur, une personne à qui je tenais, et à qui je ne souhaitais que du bien.

 « Ça… Ça va. » J’avais beau être rassuré par les propos de ma soeur comme quoi il n’avait rien de mal avec elle qui puisse justifier sa présence, mais elle n’avait pas pris le temps de me préciser pourquoi elle était ici pour autant, me laissant dans le flou, me laissant incertain, d’où le fait que ma réponse se voulut incertaine au passage, d’où le fait que je ne cherchai pas à faire la conversation par la suite, attendant de voir ce qu’elle allait me dire. Elle devait me connaître un minimum, puisqu’elle ne prit pas une éternité avant de m’expliquer pourquoi elle était là, pour avoir mon aide, pour confirmer… Écarquillant les yeux, j’étais persuadé de ne rien avoir compris. Et comme pour voir si j’avais bien entendu, je secouai la tête, murmurant:  « Attends, tu es… » mais je ne parvins pas à terminer ma phrase, faute de trouver les mots, faute d’avoir le temps, puisqu’elle ne tarda pas à m’expliquer qu’elle voulait me demander à moi plutôt qu’à un médecin. À retardement, je compris que je n’avais pas mal entendu, associant le terme « échographie » à ce que j’avais entendu plus tôt. Il me fallut encore un petit temps pour comprendre pourquoi elle me demandait à moi plutôt que quelqu’un d’autre, et même si c’était troublant venant de Zara, d’une façon, ça me touchait, si je pouvais le dire ainsi. Un rire nerveux s’échappa de ma bouche, nerveusement, je vins à me gratter la nuque, et je me mis à réfléchir à toute vitesse, disant:  « Il faudra alors te faire une prise de sang… Et… Une échographie, oui… » C’était tout moi ça; quand je ne savais que dire et que je le pouvais, je me renfermais dans mes termes médicaux, parce que c’était ma zone de confort. Puis, doucement, je tentais de revenir à un discours un peu plus normal, et là, je le fis en regardant ma soeur, et en disant:  « Je crois que… Je peux… Faire ça… » C’était hors de mon champ d’expertise en temps normal, et heureusement que je savais qu’en cas de temps mort, il pouvait y avoir des exceptions comme celle que je m’apprêtais à faire, mais je savais manipuler la machine, faire une prise de sang, lire des résultats. Et au pire, ma soeur, elle, était médecin. Saurait-elle m’aiguiller au besoin ? J’espérais que oui en tout cas, même si pour sûr, je ne voulais pas briser sa confiance, je ne voulais pas que ce rendez-vous devienne source d’humiliation auprès de ma famille non plus.  « On ferait mieux… D’aller… Dans la salle d’examen… » D’une main un peu tremblante, je lui désignai une pièce adjacente, là où on pourrait procéder à tout ça, et là où je pourrais peut-être être un semblant plus à l’aise avec ma soeur, puisque là, dans le couloir, là où un collègue pourrait me voir à tout moment, ce n’était juste pas possible.