Eric&Micah + Lost puppy

Il y avait quelques semaines de cela, j’étais allé laisser Spike, ce chien que j’entraînais pour devenir un chien-guide, à l’association qui me l’avait confié dans un premier temps. Voilà un moment que je l’avais, un moment que je m’étais attaché à celui-ci, et le laisser m’avait brisé le coeur, même si je savais depuis le début que je devais le laisser depuis le début, même si j’avais été rassuré en rencontrant la personne qu’il allait servir pour me confirmer qu’il serait dans une bonne famille. Le déchirement n’avait pas été des plus agréables, et pour ça, je n’avais pas songé reprendre un autre chien, mais finalement, une présence animale avait commencé à me manquer. Et ayant apprécié l’expérience de former un chien pour une bonne cause, sachant très bien que je ne pourrais pas emmener partout avec moi un chien qui n’était pas destiné à être entraîné ainsi, j’avais décidé de faire l’expérience une nouvelle fois. Ça ne pourrait pas être pire que la première niveau déchirement, n’est-ce pas ? Enfin, ce fut ainsi que je tentai de m’en convaincre, de me rassurer, alors que j’entrai dans les bureaux de l’association pour aller signer les papiers et rentrer chez moi avec ce chiot qui m’avait été attribué. Et rapidement, je ne regrettai pas mon idée, craquant pour ce chiot qu’on m’emmena, qui ressemblait à Spike, plus petit, avec un air un peu plus espiègle, j’en avais l’impression. Ou était-ce parce qu’il était plus jeune ? Je ne saurais pas le dire, ça restait à déterminer. Le mettant en laisse, je m’assurai que tout convenait, puis je sortis des bureaux, avec un Shadow - c’était son prénom - qui était bien excité et qui, bien rapidement, se mit à tirer sur la laisse, se rendant à la rencontre de toute personne, toute chose qui était sur son chemin. Et là, il se mit à presque courir vers une personne passant là, me faisant lâcher un:  « Shadow ! » dans l’espoir de le rappeler à l’ordre, mais trop tard, il s’était trouvé un nouvel ami, que je tentais tant bien que mal de rattraper, en espérant que la dite personne ne soit pas effrayée, allergique ou quelque chose comme ça.

Le soleil et la chaleur commençaient à revenir progressivement. L’hiver et son froid glacial laissait place peu à peu au printemps et à ses fleurs en bourgeons. Je devais bien reconnaitre que ce changement de saison faisait un bien fou. Pour le moral, pour l’humeur, pour beaucoup de choses. Le soleil et la chaleur contribuent énormément au bien-être personnel de tout un chacun. A tel point que j’avais décidé de sortir m’aérer l’esprit pendant ma pause déjeuner. Mon prochain patient n’arrivant que dans une heure trente, j’avais pas mal de temps devant moi pour prendre l’air et manger un morceau dans le parc non loin de mon cabinet. Assis sur un banc, un sandwich entre les mains et un bouquin sur les genoux, j’appréciais ce petit moment de détente au soleil. Me plongeant dans mon roman et avalant progressivement mon repas, je me laissais porter par mon récit. M’aérant autant l’esprit que le corps, cette pause me faisait du bien. Cependant, alors que j’arrivais vers la fin de mon sandwich, un petit chien arriva vivement vers moi et posa ses deux pattes avant sur mes cuisses en remuant la queue. D’abord surpris, un sourire finit par se dessiner sur mes lèvres. J’avais toujours aimé les animaux mais je n’avais jamais eu l’occasion d’en avoir dans ma jeunesse puisque mon père ne les supportait pas, ni par la suite, par manque de temps, principalement. Riant légèrement, je caressais la tête du jeune chien. « Bonjour toi, toi aussi tu as un petit creux ? » Relevant la tête, je vis un homme dans la vingtaine arriver vers nous. Je découpais un petit morceau de pain pour le donner au chien qui ne se fit pas prier pour l’avaler rapidement. « En voilà un petit glouton ! » En même temps, n’importe quel chien était un estomac sur pattes. Je relevais la tête vers le jeune homme qui était arrivé à notre niveau pour lui adresser un sourire.

@Micah Landry-Palmer

Ce chiot avait beau être relativement petit par rapport à la taille qu’il aurait une fois adulte, il avait quand même une force considérable. Je savais que je n’étais pas le plus musclé qui soit, mais j’avais l’habitude de ces animaux pourtant, ayant déjà eu un chien en entraînement avant aujourd’hui. Du coup, je ne parvins pas vraiment à le retenir, pas tant qu’il ne se rendit pas à la rencontre de cet individu qui, heureusement, vu la distance, ne sembla pas mal le prendre. Il s’adressa au chiot d’une façon qui me parut courtoise, ce qui me fut confirmé quand je le vis lui tendre un morceau de nourriture. Un bout de pain, je fus assez près pour le constater, et ce fut rassurant, parce que je ne me serais pas vu retourner à l’organisme ou même chez le vétérinaire en leur annonçant que Shadow était malade et que le tout était arrivé deux minutes après en avoir pris possession. Parce que bien sûr, je mettrais ça sur ma faute, pas celle de l’homme désormais devant moi, parce que c’était moi qui n’étais pas parvenu à le retenir dans un premier temps. Rassuré de voir que la nourriture avait semblé le calmer et que maintenant, je pouvais raccourcir la laisse et m’assurer qu’il ne restait pas moins, je pus m’attarder un peu plus longuement sur l’individu qui, en fait, avait été mon sauveur, lui disant:  « Je suis vraiment désolé. » Parce que oui, pour moi, c’était primordial de m’excuser de ce qui venait d’arriver. Plus encore, je trouvai que mes mots ne furent pas suffisants, donc je poursuivis:  « Je ne pensais pas qu’il était aussi fort… J’espère vraiment qu’il ne vous a pas trop embêté… » Non, pas encore suffisant. Mais là, je pris quand même une pause pour retrouver mon souffle, à défaut de ne pas avoir ne serait-ce que songé à le faire précédemment, puis je dis:  « Merci, c’est grâce à vous qu’il s’est arrêté, je crois bien. » Je conclus mon propos avec un petit rire nerveux, ne sachant même pas si mon hypothèse faisait du sens, mais je tenais à ce qu’il sache que j’avais apprécié l’aide indirecte, sachant très bien qu’il aurait tout simplement pu le repousser ou s’en aller. Maintenant, j’allais m’arrêter, histoire de ne pas le déranger trop longtemps, au cas où il voulait continuer son chemin, ce qu’il était parfaitement en droit de faire.

Comme tous les enfants, j’avais voulu un chien dans ma jeunesse. Etant déjà en froid avec mon paternel à cette époque, ce fut ma mère qui avait subi mes demandes insistantes pour avoir un chien à la maison. Malheureusement, nous n’en avions jamais eu et une fois adulte, l’envie m’était passée. Je m’étais rendu compte qu’avoir un animal sous son toit requérait beaucoup de temps, d’énergie et d’implication. Chose que je n’avais jamais eue. Cependant, je ne détestais pas les animaux. Au contraire même. J’avais toujours respecté chaque être vivant sur cette terre. Le chien qui avait accouru vers moi avait l’air jeune à en juger par sa taille et sa fougue. Attendri par sa bouille, je n’avais pas pu m’empêcher de lui donner un morceau de pain. Je savais qu’il ne craignait rien à en manger. Contrairement au chocolat qui était mauvais pour lui. Souriant comme un gamin et caressant sa tête, je n’avais pas remarqué immédiatement qu’un jeune homme nous avait rejoints. Sans aucune doute son propriétaire. Sans surprise, il s’excusa. Je relevais la tête vers lui en souriant. « Ce n’est rien, ne vous inquiétez pas. » Il n’y avait pas mort d’homme après tout. Pourtant, il poursuivit ses excuses, visiblement embêté de la potentielle gêne occasionnée. « Non non, ne vous inquiétez pas, vraiment. Il est adorable. » Il avait l’air essouffle le pauvre garçon. « Ça va aller ? » Il ne faudrait pas qu’il fasse un malaise quand même.

Il finit par me remercier d’avoir stoppé l’élan de son chien et je ne pus m’empêcher de rire légèrement. « L’appel de la nourriture était trop forte pour lui visiblement. » N’importe quel animal était attiré par tout ce qui était comestible. C’était bien connu. « Il a l’air jeune, non ? » Je connaissais la réponse, du moins je le supposais. Le chien me paraissait petit alors j’imaginais sans mal qu’il était jeune. Et puis, il semblait bourré d’énergie. « C’est votre chien ? » La question n’était pas dépourvue de sens. Après tout, il pouvait très bien être un de ces dog-sitters qui gardent et s’occupent des chiens des autres contre de l’argent. C’était de plus en plus courant et ça expliquerait le fait qu’il ne lui obéisse pas vraiment. Ou peut-être l’avait-il eu récemment.

@Micah Landry-Palmer

N’importe quel propriétaire de chien ordinaire serait bien ravi d’entendre quelqu’un dire que leur animal de compagnie était adorable, mais personnellement, je ne savais pas comment me sentir par rapport à ça. Évidemment que Shadow était mignon comme tout. Dans un chenil, il aurait fait des jaloux, je n’en doutais pas une seconde, mais là, il ne se devait pas d’être mignon. Enfin, il ne devait pas être perçu qu’ainsi. Passant outre pour le moment, parce que clairement, il était bien loin d’être au bout de son entraînement, je repris la parole que pour répondre à l’individu:  « Oui ça ira. » Je ne mentais pas, et même si ce n’était pas le cas, certainement que j’aurais eu une réponse similaire. Mais là, comme pour le prouver, je soufflai un peu, servant un sourire timide à mon interlocuteur avant de le remercier de m’être venu en aide. Lui servant un air à la fois décontenancé et amusé à son propos concernant la nourriture, je ne pus m’empêcher de lui dire:  « C’est comme ça pour beaucoup d’animaux. » Le premier exemple qui me venait en tête étant les animaux avec qui je travaillais au quotidien. Ils feraient n’importe quoi pour un petit quelque chose à manger de plus. Passant outre l’idée de le mentionner, je répondis plutôt à sa question, disant:  « Il a tout juste trois mois. » En effet, c’était à l’âge où il pouvait être sevré et indépendant, de ce qu’on m’avait dit. Ayant déjà travaillé avec ce groupe avant, je savais que les chiens étaient bien traités. Par conséquent, je leur faisais entièrement confiance. Vint ensuite une question qui aurait pu être purement rhétorique, mais qui, dans mon cas, ne l’était pas tant. Mais comme je ne me le cachais pas et que je n’avais pas honte de ce que je faisais, je n’eus pas de mal à répondre, affirmant:  « Oui et non. C’est un chien que j’entraîne pour devenir chien-guide. Je viens tout juste de le récupérer. » D’où le fait que je n’avais pas un si bon contrôle sur lui en ce moment. Je m’en voulais, c’était évident, même si je savais bien qu’il y avait d’autres facteurs qui entraient en jeu. Mais j’allais m'en sortir, je ne voulais pas que ce soit autrement de toute façon. Pour ça, j’étais bien têtu.  « Vous avez des animaux, vous ? » Voici comment je finis par reprendre la parole, le demandant candidement, par simple curiosité. Pour tout dire, si c’était le cas, cela ne m’étonnerait pas, au vu de comment il avait interagi avec Shadow, mais peut-être était-il juste bien à l’aise. Je n’allais pas me faire de fausses idées pour rien.

Je n’avais jamais eu d’animaux à la maison. D’une part parce que mon père n’en avait jamais voulu quand j’étais plus jeune. Il n’aimait pas ça. Il n’en avait jamais voulu sous son toit même s’il passait la plupart de son temps à son travail. Par la suite, en emménageant chez moi, je n’avais jamais éprouvé le besoin ou l’envie d’en adopter. Non pas parce que je n’aimais pas ça. C’était surtout une question pratique en fait. Je n’avais pas le temps de m’en occuper. Et puis soyons honnête, j’étais suffisamment maniaque pour supporter un animal sous mon toit. Les animaux étaient mieux chez les autres. « Oh, il n’y a pas que les animaux. Je connais des gens qui ne résistent pas à l’appel de la nourriture également. » Ma nièce notamment. Elle était un véritable estomac sur pattes. A première vue, le chien m’avait semblé être jeune. Quand il me donna son âge, cela me confirma mon idée. « Ah oui en effet, il est vraiment jeune. A cet âge-là ça court partout. » Il ne devait pas avoir quitté sa mère depuis longtemps. Toute son éducation était encore à faire. Ce jeune homme en avait du boulot qui l’attendait.

Il me donna un peu plus de précision quant à son lien avec son chien. Je fus assez surpris de constater qu’il ne lui appartenait pas réellement. « Oh, je vois. Vous les entraînez depuis leur plus jeune âge ? Vous utilisez toujours la même race ? Est-ce que les meilleurs chiens sont sélectionnés ou sont-ils choisis plus ou moins au hasard ? » Je me stoppais, me rendant compte que je posais sans doute trop de questions. Je ne voulais pas non plus lui faire perdre son temps. « Pardon, je suis peut-être trop curieux, mais je dois bien avouer que c’est un sujet qui m’intéresse. Je me suis toujours demandé comment ça se passait ce genre d’éducation. » Après tout, j’aimais comprendre les choses de la vie et j’étais toujours intéressé pour apprendre de nouvelles choses. Le savoir était une chose importante à mes yeux. « Oh non, je n’ai pas d’animaux, je n’ai pas vraiment le temps de m’en occuper. » Je me levais finalement pour tendre ma main vers lui. « Pardon, avec tout ça j’oublie les bonnes manières. Je m’appelle Eric. »

@Micah Landry-Palmer

Sourire amusé à son commentaire sur la nourriture, réponse à sa question, accusé de réception à son commentaire, c’était dans un premier temps un échange banal, rien de plus. Et je ne m'en plaignais pas, j'estimais que c’était la normale des choses et que bien rapidement nous allions reprendre la route chacun de notre coté. Mais ce ne fut pas ce qui arriva. En effet, dès que j’expliquai que cet animal de compagnie que j'avais n'était pas totalement le mien, je semblai piquer la curiosité de mon interlocuteur, à un point qui était presque perturbant. Bouleversé, je gardai le silence. Pas tant que je ne voulais pas répondre, mais pour tout dire, je ne savais pas par où commencer. Mon silence sembla être un peu mal pris, puisque l’individu s’excusa. Ce fut là que je réagis, secouant la tête pour essayer de lui montrer que je ne lui en voulais pas. En fait, je ne détestais pas de parler à quelqu’un qui était curieux, puisque trop peu souvent je parlais de ce processus. Je n'en parlai pas tout de suite, le laissant me répondre qu'il n'avait pas d’animaux, puis se présenter. Ce fut à la fin de son dernier propos que je repris la parole, commençant par lui dire:  « Micah. », estimant que c'était suffisant pour me présenter. Ensuite, j'attendis une seconde, et j'ajoutai:  « Et ça ne me gêne pas du tout d’en parler, bien que je ne sois pas un expert. » En effet, je ne travaillais pas pour l’association, je ne faisais que participer à distance.  « En fait on me confie un chiot pour environ un an et demi, et je dois l'apprendre à bien se comporter et socialiser selon leurs standards. Comme là, je viens tout juste d'aller le chercher. » Donc oui, ils commençaient plutôt jeunes, et je pensais que ça venait répondre à la question. Ensuite, j'ajoutai:  « Généralement ils prennent des races similaires, et pour le meilleur chien ou quoi, ça je ne sais pas. Outre pour les suivis réguliers, je ne suis pas vraiment impliqué dans le processus. » Et les suivis, c'était pour voir si le développement était bon, s’il était prêt, si je devais le garder plus longtemps et si oui, sur quoi je devais travailler. Je laissais ces détails de coté, attendant de voir s'il avait d’autres questions, ou si j'avais pleinement satisfait sa curiosité.