Sujet: perfect strangers (ft nikita) Dim 2 Avr - 15:58
perfect strangers
ft nikita & marnie
Un repas de famille, ce n'est pas forcément un moment qu'on attend tous. En tout cas les grands repas de famille, avec les membres qu'on a pas vu depuis longtemps. Il y a toujours ces moments gênants où quelqu'un fait une remarque qui plombe l'ambiance ou qui est le point de départ d'une dispute. Repas de famille qu'attendait impatiemment Marnie, mais aussi redoutait. Parce que c'est le moment où elle peut potentiellement voir ce demi-frère, le rencontrer réellement, après toutes ces années. Frère qui ressemble plus à un fantôme, à un souvenir. Frère dont elle n'entend parler que par les souvenirs racontés par son beau-père. Frère qu'elle a simplement vu sur des photos. Mais peut-être qu'aujourd'hui, après toute ces années, elle allait rencontrer ce fantôme. Peut-être qu'elle aurait pu le faire avant. Aller le voir et se présenter. Et à chaque fois qu'elle prenait cette initiative, elle reculait, elle faisait demi-tour. Parce qu'elle allait le déranger. Parce qu'il devait faire autre de plus intéressant. Et peut-être aussi, peut-être qu'il n'avait pas envie de la voir. La peur du rejet, c'est ce qui prenait le dessus. Là, c'était différent. Il était obligé de venir. Il n'allait pas rater l'anniversaire des dix ans de mariage. Et Marnie, elle attend près de la porte, à attendre son arrivée. Les invités arrivaient un par un et pas de Nikita. Une fois de plus, il était absent. Sourire qui s'effaça rapidement. Elle devait s'y faire. Elle avait l'habitude. Repas de famille qui était beaucoup trop long. Repas de famille qui s'éternisait, mais elle ne pouvait pas partir comme ça. Ça ne se faisait pas. Le repas était enfin terminé et la nuit était tombée. Les invités étaient partis, laissant derrière eux un tas de reste. Trop de restes. Une fois de plus ils avaient prévu beaucoup trop. Marnie qui part comme d'habitude avec des sacs de nourriture qui lui permettrait de ne pas faire de course durant une semaine.
Et Marnie qui repart chez elle, qui prend les transports en commun et passe par Anacostia, qui passe devant cet immeuble. Il habite là. Elle le sait. Elle a entendu son beau-père en parler. Et ce n'était pas la première fois qu'elle passait devant. Sauf que pour une fois, elle ne faisait pas que passer. Pour cette fois, elle allait s'arrêter. Marnie qui descend du bus pour s'y rendre. Elle en avait le courage. Cette fois, elle y arriverait. Elle ne devait pas avoir peur. Ils sont de la même famille après tout. Courage qui commençait à partir au fur et à mesure qu'elle montait les escaliers. Elle sentait son cœur battre de plus en plus vite à chaque fois qu'une marche était gravie. Et puis, elle s'était retrouvée devant cette porte. Elle ne pouvait plus reculer à présent. Peut-être que si. Après tout, personne ne pouvait savoir qu'elle s'était trouvée devant la porte. Personne ne savait pas qu'elle avait passé cinq bonnes minutes à juste regarder cette porte, à avoir un débat intérieur. Durant ces cinq minutes, son cerveau lui disait clairement de fuir, de s'en aller, de rentrer chez elle. Et au bout de cinq minutes, son corps avait décidé autre chose. Elle avait frappé. Geste qui disait que maintenant, il était bien trop tard pour faire marche arrière. Et les bruits de pas qui se faisaient entendre. Panique qui commençait à arriver. Il n'y avait qu'à poser la nourriture et partir. Personne ne saurait. Sauf que ses jambes ne bougeaient pas. Elle restait sur place. Et la porte qui s'ouvre enfin. Elle se trouvait à présent face à la personne qu'elle attendait tant de rencontre. Elle le fixait sans rien dire. Elle le regardait juste, souriant un peu bêtement et avec les larmes aux coins des yeux. Puis au bout de quelques secondes – de longues secondes – elle s'était rendue compte de ce qu'elle faisait. La panique revenait. Elle lui avait tendue les sacs de nourriture avant partir à reculons. Mauvaise idée, lorsqu'on connaissant la maladresse – presque légendaire – de la jeune femme. Marnie qui rencontre le sol un peu trop violemment. Comment faire une bonne première impression.
Can you remember who you were before the world told you who you should be?
Tu n’as jamais été très famille. Enfin, si, tu mentirais en disant que c’était toujours le cas pourtant. Depuis le décès de ta mère, depuis que tu as emménagé seul, que ton père a retrouvé une vie, tu ne fais plus attention, à personne, tu ne vas pas aux repas de famille, tu vois ton père et ton beau-père seulement quand ils s’invitent chez toi et que tu ne peux rien faire d’autre que de leur ouvrir la porte. Toujours mal à l’aise, tu le seras sans doute toujours, ton père qui avait aimé cette femme qu’avait été ta mère, cet homme qui avait retrouvé l’amour tu ne sais comment, parce que pour toi l’amour c’est vaste, c’est grand, c’est beau, et surtout ça n’arrive qu’une fois, l’amour vrai qui durera toute une vie. T’es peut-être naïf, peut-être que tu crois un peu trop aux contes de fées et que tu devrais arrêter de te faire des illusions, mais tu ne peux pas, tu ne sais pas si tu pourras arrêter de croire au concept d’âmes sœurs un jour, parce que tu aimerais que ça soi vrai, que l’amour dure toujours et pas seulement un temps, pas l’espace d’un ou deux mois, pas moins longtemps que cinquante ans, jusqu’à la mort, parce que c’est comme ça, tu as dans la tête un idéal que personne ne comprend. Peut-être qu’au fond ton père et ta mère n’étaient pas faits pour être ensemble ? Peut-être que le destin l’a guidé vers sa vraie âme-sœur, peut-être, mais ça te fait mal de l’imaginer, mal de le penser. Alors tu rates les repas, passent ton temps les yeux dans le vide et vers les étoiles, parce que pour toi elle est là, ta mère, précieuse, douce, brillante, une boule de gaz en feu, magma s’écoulant de ses yeux et de ses lèvres, toujours les mêmes images, toujours la même peur, tu n’y arrives pas. T’as peur d’être comme elle, malade, t’as peur que ça soi génétique, t’a peur de te retrouver à cracher du sang et à le tousser, t’aies peur de saigner du nez et de ne plus savoir te relever, pur d’être malade, peur de ne plus être en état de te battre. Dix ans, c’était l’anniversaire des dix-ans de mariage, dix-ans qu’il avait oublié ta mère et ça te donnait l’envie malsaine de rire et de pleurer dans le même temps, parce que tu étais amer, ton cœur qui se tâchait d’un noir plus sombre que la plume de corbeau et que l’encre d’anciennes lettres. T’es la combinaison d’angoisse et de peur, de colère et de tristesse, bombe prête à exploser quand il le faudra, tu te fais peur toi-même. Tard le soir, Hazel qui n’est toujours pas rentrée, l’angoisse qui te bouffe les jointures dont tu mords, que tu sers, que tu fais saigner, la télévision allumée et le son coupé, pour guetter le moindre son à l’extérieur de l’appartement, l’angoisse de ne pas le voir revenir aussi, peur d’être seul avec la boîte remplie de pansements de désinfectant, peur d’être seul. Alors un son qui alerte, des pas qui se dirigent vers la porte. T’as des cernes immondes comme si on t’avait frappé, des cernes qui tirent vers le violet, et le sourire qui n’est sur ton visage que quand tu le vois. Fatigué, tu es fatigué, tu te laisses crever et tu le sais, mais tu n'as pas le courage, peut-être plus le courage, les tâches ménagères, le boulot, les heures que tu passes à bosser, les heures que tu passes à attendre. Les heures que tu passes à lui demander ce dont il a besoin, ce qu’il veut, ce que tu peux faire pour lui, les mains que tu passes sur son visage pour le dégager et le laisser se purger en paix, les sourires fatigués, exténués, mais des sourires, pour qu’il voit que tu ne te laisses pas, que t’es là, que ça va. Les larmes dans les yeux dépareillés que tu essaies de faire disparaître, mais t’y arrive pas, t’y arrive jamais. Inlassable prénom qu’il hurle, murmure, prénom d’un frère disparu, d’un frère qui savait tout, et tu t’en veux de ne pas réussir à l’apaiser autrement qu’en se blottissant dans ses bras pour lui montrer que t’es là, que tu ne le lâches pas, parce que tu peux rien faire de plus. Alors quand quelqu’un toque à la porte t’œuvres avec une appréhension certaine, tombe sur un visage que tu n’as vu qu’en photo, t’es bouche bée, tu ne t’y attendais pas, en plus t’as une tête de droguer sûrement tellement la pâleur de ta peau font ressortir les cernes bleutés sous tes yeux de la même couleur. Les sachets qui finissent dans tes bras et la jeune fille aux cheveux corbeaux qui tentent de partir mais qui s’écrasent sur le sol, les lèvres qui s’écartent et tu lâches les paquets, un seul réflexe, l’aider.
« Tu vas bien ?»
Tu demandes, gosses accroupis près d’elle, qui lui tend la main, tend la tête sur le côté, un sourire trop doux sur les lèvres.
« Bonsoir, Marnie c’est ça ? »
Tu ne pourrais pas passer à côté de ce visage vu seulement en photo, parce que Marnie tu la trouves jolie, parce que tu l’imagines pleine de vie, joyeuse, souriante, ton contraire en somme.
« Tu veux un chocolat chaud ? »
Tu demandes alors qu’elle est encore au sol et toi toujours accroupie, t’as vraiment le sens des priorités, et pour l’instant Hazel est derrière, loin dans tes pensées.
Gamine qui se demandait ce qu'elle était en train de faire. Gamine qui se disait qu'il était encore temps de fuir. Elle allait le déranger. C'était tout le temps comme ça, alors pourquoi ça changerait. Et s'il n'avait pas pris la peine de la connaître, c'était sans doute qu'il ne le voulait, qu'il ne voulait pas connaître cette inconnue qui s'est incrustée dans cette famille. Peut-être que ce qu'elle était en train de faire était tout simplement stupide, qu'elle allait se ridiculiser plus qu'autre. Il était de partir, de s'enfuir lâchement une fois de plus. Et pourtant après avoir frappé à cette porte, les jambes de Marnie ne bougeaient pas. Elle restait planter là, sans bouger d'un pouce. La peur lui faisait perdre absolument tous les moyens de la jeune femme. Cœur qui battait un peu trop rapidement lorsqu'elle entendait les pas au loin qui se rapprochait petit à petit. Elle avait cette sensation que son cœur allait exploser s'il continuait à battre aussi fort. Et finalement, le moment qu'elle avait attendu depuis presque dix ans était arrivé. Nikita, ce demi-frère qui était plus un fantôme pour la brune qu'autre chose, se trouvait devant elle. Sourire béat, légèrement niais sur le visage de la jeune Caufield. Elle prenait le temps d'examiner ce visage où la fatigue était plus que présente, elle ne pouvait que le remarquer. Quelques secondes de silence avant que la panique reprenne possession du corps de la jeune femme. Aucun son qui ne sortait de sa bouche, elle lui avait juste tendu les sacs de nourritures avant de s'enfuir. Ou plutôt dans une tentative de fuite. L'équilibre de Marnie avait, à cet instant bien précis, de décider qu'il était absent, alors à peine que la brune avait mis un pas devant l'autre, qu'elle avait une nouvelle rencontre, avec le sol. Elle qui s'était dit qu'elle ne pouvait pas faire plus ridicule comme rencontre après l'avoir fixé pendant de trop nombreuses secondes avant de s'enfuir sans un mot, elle s'était prouvée le contraire. Il fallait vraiment que sa maladresse décider de se manifester. Marnie qui reste au sol durant quelques secondes, essayant de se reprendre ses esprits. Marnie qui essaye d'essuyer les larmes naissantes qui se trouvaient aux coins de ses yeux. Il ne manquerait plus que Nikita la voit pleurer. Si c'était le cas, elle était certaine que par la suite, il ne voudrait plus entendre parler d'elle. Et il aurait sans doute bien raison. Pourtant, quelqu'un était venu près d'elle. La jeune femme releva doucement la tête pour voir ce demi-frère absent qui s'était accroupi à sa hauteur. « Tu vas bien ?» Sourire doux qui était apparu sur le visage de ce presque inconnu. Marnie qui avait toujours ce regard un peu perdu, qui avait mis du temps à comprendre ce qu'il lui avait demandé. Marnie qui avait tenté d'ouvrir la bouche pour sortir un mot, mais là encore pas un seul son en était sorti. Alors, la jeune femme s'était juste contenté d'acquiescer la tête avec un faible sourire pour lui dire qu'elle allait bien. Après tout, ce n'était pas la première fois qu'elle faisait une rencontre légèrement violente avec le sol. « Bonsoir, Marnie c’est ça ? » Une fois de plus aucun son n'était sorti de la bouche de la jeune femme. Sans doute à cause de la peur. Une peur complètement stupide, elle le savait. Elle continuait juste d'acquiescer. Son sourire qui s'était un peu agrandi. Il connaissait son prénom. Il savait qu'elle existait. Il s'en était rappelé. Un sourire qui était resté quelques secondes avant de commencer à disparaître légèrement. Il savait qu'elle existait et pourtant, il n'avait pas pris la peine de la connaître. Peut-être qu'il n'avait pas envie de la voir plus que ça. « Tu veux un chocolat chaud ? » Question simple qui demande une réponse tout aussi simple : oui ou non. Et pourtant, la jeune femme ne savait pas. Oui, sans doute qu'elle aurait aimé,ce qui signifiait qu'elle allait passer un peu plus de temps avec lui. Mais elle peut tout aussi bien répondre non. Comme ça, elle allait partir, le laissant à ses occupations. « Désolée. » Réponse qui était sorti faiblement de sa bouche. Réponse qui n'avait rien à voir avec la question qu'il lui avait posé. Désolée d'être venue, de l'avoir dérangé pour l'embêter. Désolée, parce que maintenant, elle sait sans doute qu'elle ne recommencerait plus à l'infortuner de la sorte.