Se perdre peut,apporter de chouettes choses [Micah]

Le premier spectacle de la journée s’était déroulée on ne peut mieux. Premièrement, les animaux dont je m’occupais avaient obéi à mes demandes sans aucun problème, sans faire de caprice quelconque, comme ils avaient envie de faire une fois de temps en temps. Ensuite, et ça, pour moi, c’était le mieux dans mon métier, le public avait été réceptif, émerveillé, et en somme, ils semblaient avoir grandement apprécié le spectacle. Plus que satisfait, je ne m’étais clairement pas fait prier pour donner une récompense à mes dauphins, histoire de leur signifier que j’étais fier d’eux. Puis, sachant que j’avais un autre spectacle qui ne tarderait pas à avoir lieu, bien que nous avions tous droit à un petit répit entre-temps, ce qui était parfaitement normal, je crus bon de prendre ce moment pour me sécher quelque peu. Inutile de faire une chose pareille ? C’était fort possible, mais j’estimais que ce n’était pas vraiment mieux de me balader complètement trempé, laisser des gouttes d’eau sur le sol, et prendre le risque que quelqu’un glisse et se blesse. Évidemment, ça arrivait inévitablement à certains moments, mais généralement, des panneaux l’indiquaient, sauf que si moi, je marchais en pensant que ce n’était pas grave que je trempe le plancher, il me faudrait avoir un stock de panneaux pour moi seul. Et puis, mine de rien, cela ne me faisait pas de tort de me sécher quelque peu. Dans la salle des employés, j’allai donc attraper ma serviette, puis je m’essuyai vite fait. Puis, désireux de marcher un peu, aller voir comment les autres se débrouillaient, je sortis de la petite salle, bien discrète à la vue des autres, d’autant plus que normalement, c’était un endroit où peu de gens du public passaient. Et pourtant, une personne fit exception à la règle, une personne que je n’avais pas vue précédemment, l’apercevant que lorsque ce fut inévitable, en l’occurence lorsqu’elle vint à me heurter directement. Persuadé que c’était ma faute, je lui dis sitôt, en toute politesse:  « Oh, désolé. » Cependant, je me retrouvai à le dire en même temps qu’elle, ce qui m’arracha un sourire nerveux qui, heureusement, ne fut pas des plus prononcés, puisque sinon, je n’aurais pas su entendre ce qu’elle me dit par la suite. Désireux de l’aider, j’aurais voulu lui demander où elle souhaitait aller, mais je n’en eux pas le temps, puisqu’elle reprit la parole, en venant à tenir un propos qui m’arracha un froncement de sourcils. De la chance ? Pour quoi en fait ? N’étant pas du genre à comprendre les sous-entendus, je décidai de ne pas me mettre dans les pieds dans les plats, simplement lui sourire, puis finalement revenir à ce que je voulais lui demander, soit:  « Vous, vous désirez aller quelque part ? » Après tout, peut-être ne cherchait-elle pas que la sortie. Peut-être voulait-elle aller aux toilettes, trouver la cantine, la boutique souvenirs, je ne savais trop, alors je préférais lui demander plutôt que de dire n’importe quoi.

Comme si la question que je me posais précédemment était miraculeusement apparue dans mon front, la demoiselle ne tarda pas à me préciser sa pensée, ce qui, sitôt, m’arracha un sourire soulagé et un rire un peu nerveux. Soulagé parce que je n’avais pas à me faire de fausses idées, nerveux parce que bon, pour sûr, j’étais probablement demeuré stoïque, un air particulièrement stupide au visage, qui n’avait sûrement rien de glorieux aux premiers abords. Cependant, je choisis de ne pas trop m’y attarder, préférant jeter mon dévolu sur ce qui était le plus important, soit comment je pouvais aider la demoiselle. Rapidement, celle-ci me confia qu’elle s’était trompée de direction en cherchant la sortie, d’où le fait qu’elle s’était retrouvée en ces lieux et désormais, elle ne savait pas comment en sortir. Compte tenu que ce n’était pas la première fois que cela arrivait, même si plus souvent qu’autrement, c’était plutôt des enfants que nous sortions des coulisses, puisque trop curieux, ils avaient semé leurs parents pour venir ici en espérant voir davantage d’animaux, je ne m’en fis pas trop, me contentant d’esquisser un sourire amusé, mais que je voulus quand même garder poli, histoire que la demoiselle ne pense pas que je me moquais d’elle, parce que ce n’était pas le cas, mais pas du tout. De ce fait, je gardais une retenue, ce qui ne fut pas très difficile à faire dans un premier temps. Cependant, quand la jeune femme en vint à soulever l’idée que si jamais elle voulait profiter de la situation, elle demanderait à voir les dauphins, ne pas rire me fut tout simplement impossible. Bien sûr, je ne le fis pas de façon déplacé, me surprenant à trouver cela limite adorable venant d’elle. Encore une fois, en temps normal, c’était plutôt les adultes qui faisaient une telle demande, mais la demoiselle semblait avoir un peu un côté enfantin qui n’était pas immature de quelconque façon. C’était quelque chose qui, en mon sens, lui faisait bien, à mon avis. En tout cas, une chose était certaine, c’était que demandé ainsi, je ne pouvais pas vraiment refuser de lui venir en aide et ce, sans rien en échange. C’était simple pour moi, pourquoi demanderais-je quoi que ce soit en retour ? Enfin, je demandai quand même un truc, soit qu’elle ne dise pas des bêtises comme celle qu’elle put dire concernant les requins. Mais encore là, je ne le lui imposai pas, me contentant de simplement secouer la tête avec un air plus posé, plus poli. Ce fut par la suite que je finis par lui dire:  « Ce n’est pas grave, ne vous en faites pas. Après, je ne dis pas que je serai un sauveur, mais je peux vous montrer le chemin sans problème. » Pendant un bref instant, j’hésitai à faire un détour vers le bassin des dauphins, mais craignant de me faire griller et avoir des ennuis, ou bien provoquer des ennuis à la jeune femme de quelconque façon. Cependant, ne voulant pas me montrer malpoli non plus, et parce que j’en avais le temps, je me ravisai sur l’idée de simplement lui pointer la bonne direction, et je lui dis:  « En fait, je vais vous accompagner, si vous le voulez. Est-ce que vous souhaitiez poursuivre votre visite ailleurs, ou aller vers la sorite ? » Après tout, je ne savais pas vraiment ce qu’elle avait l’intention de faire, et je ne voulais pas la jeter à la porte non plus, donc autant lui demander pour être sûr de mon coup, encore une fois.

Malgré mes propos, la demoiselle insista pour que je sois son sauveur, et même si encore et toujours, je pensais que je ne méritais pas ce titre, je décidai de ne pas argumenter. Après tout, qu’est-ce que cela m’apporterait ? Certainement un mauvais commentaire auprès de la direction, ou juste quelque chose dont je n’avais pas vraiment envie ni besoin. J’aimais mon boulot, et je ne tenais pas à le mettre en danger. Et parce que le client était roi, il me fallait demeurer poli, alors non seulement, je ne dis rien, mais de plus, je me portai volontaire pour venir en aide à la jeune femme. Et ça, je comptais le faire aussi bien que possible, au vu de ce que je lui demandai, désireux de faire la bonne chose ou du moins, la conduire au bon endroit. Et puisque c’était là mon simple but, et non pas de tenter d’en savoir davantage sur sa situation, situation qui ne me regardait pas, je me contentai de simplement acquiescer, puis commencer à marcher en direction de la sortie de cette zone généralement réservée aux employés. Une fois que nous fûmes de retour parmi les autres visiteurs, qui n’étaient pas tant nombreux à cette heure en fait, j’aurais pu simplement la laisser aller sans rien dire de plus, ou peut-être en lui indiquant un minimum les directions à prendre, mais sans ajouter quoi que ce soit. Sauf que de nouveau, je fus pris de court par une nouvelle demande de la demoiselle, me demandant si je pouvais marcher avec elle un peu, peut-être faire une visite guidée, si j’avais bien compris le tout. Jamais personne ne m’avais demandé une chose pareille précédemment, et je n’étais pas convaincu que j’étais le mieux placé pour cela, comme je le prouvai en lâchant un petit rire nerveux et en disant:  « Ça ne fait pas une éternité que je travaille ici, je ne connais pas un paquet d’anecdotes… » Quelque peu gêné, je passai une main dans mes cheveux, puis soupirant, je réfléchis. Après tout, j’avais encore un bon moment de pause, et il n’y avait pas vraiment moyen que je sois appelé à faire quoi que ce soit d’autre, au vu du faible achalandage. Qu’allait-on penser de moi toutefois ? Je ne savais pas trop par contre, mais je ne pensais pas faire quoi que ce soit de mal, alors autant prendre le risque. Au final, je décidai donc de dire:  « Mais bon, pourquoi pas. » Un sourire timide apparut sur mes lèvres, devenant plus franc lorsque finalement, mon interlocutrice se présenta, me permettant aussi de faire de même par un simple:  « Moi c’est Micah. » pendant lequel je ne m’attardai pas concernant le verre. Je voulais bien ne pas m’opposer, mais encore une fois, ce n’était pas grand-chose, ce que je faisais, alors en mon sens, je ne méritais pas tant de reconnaissance. Tentant alors de passer outre le tout sans paraître malpoli, je demandai alors, une fois qu’elle me fit comprendre que nous ferions mieux de bouger:  « Vous voulez commencer par quoi ? » De là où nous étions, nous pouvions aller soit payer une visite aux poissons, soit repasser par le bassin des dauphins. À elle de voir ce qu’elle préférait pour le coup, parce que pour moi, l’un ou l’autre, je connaissais l’aquarium par coeur, ça ne changeait pas grand-chose.

Il était vrai que la jeune femme qui se trouvait devant moi ne manquait pas de locution, et à côté de moi, qui n’était pas le plus bavard qui soit, ça faisait vraiment un contraste important et plus que visible. Honnêtement, ce n’était pas quelque chose qui me gênait vraiment. Au contraire, je préférais que mon interlocuteur soit plus loquace que moi, parce qu’ainsi, je pouvais me contenter de simplement fournir des réponses, et non pas devoir constamment trouver de quoi engager et poursuivre la conversation. Non pas que je n’en étais pas totalement incapable, mais les sujets de conversation, les questions et tout ce qui venait avec, mais parce que ce n’était pas ce qui me venait le plus naturellement. De ce fait, je préférais toujours tenir une conversation par des réponses, et c’est ce que je fis suite aux propos de la jeune femme. En effet, au moment où elle en vint à s’excuser de trop parler, de ses exigences, de me parler du fait qu’elle craignait que je pourrais avoir des soucis avec mes supérieurs si jamais je lui offrais ce traitement de saveur, je secouai la tête, et ce fut sans trop de mal que je vins à lui répondre:  « Ne vous en faites pas. Je suis en pause jusqu’au prochain spectacle, alors je peux me balader à ma guise. Et puis, je crois que personne ne pourra me reprocher de rendre un séjour plus agréable. » En effet, il y avait cette politique comme quoi nous devions toujours nous montrer sous notre meilleur jour avec les clients. Et puis, comment pourrais-je être désagréable avec cette jeune femme, alors qu’elle avait été tout sauf impolie avec moi ? Franchement, je n’avais aucune raison de commencer à me rétracter à l’idée de lui offrir cette petite visite, d’autant plus que pour moi, ce serait certainement plus intéressant que de rester dans la salle des employés à attendre la prochaine fois où je pourrais retrouver le bassin des dauphins. De ce fait, ce fut sans trop de problème que je me présentai aussi à la demoiselle, recevant son commentaire concernant mon prénom avec un petit sourire poli et timide. Que pourrais-je lui dire par rapport à cela après tout ? Je n’avais pas choisi mon nom, même si je l’aimais bien, alors je pouvais difficilement m’en vanter, ou même me montrer humble par rapport à celui-ci et clairement, je ne me voyais pas vraiment commencer à expliquer son origine non plus. De ce fait, je préférai de loin demander à la jeune femme ce qu’elle préférait faire pour commencer, et c’est là que je pris en considération sa demande, qui était plus que convenable, voire même pratique, au vu de la forme du zoo et de la disposition de tout ce qui s’y trouvait. Acquiesçant d’un signe de tête, je lui dis alors:  « C’est parti, dans ce cas. » Sur ces mots, je commençai à marcher, doucement, à un rythme qui me permettait de rester non loin de Kayla, histoire de pouvoir poursuivre la discussion, ou plutôt, continuer de répondre à ses questions. Amusé qu’elle en vienne à dire que ces lieux étaient un endroit magique, alors que de mon côté, c’était devenu une habitude de travailler ici, je n’en fis toutefois pas plus, me contentant de lui répondre alors:  « Ça fait environ trois ans que je travaille ici. » J’aurais pu préciser que je n’avais pas été assigné au bassin des dauphins dès le début, mais je n’en vis pas l’intérêt et surtout, je n’en eus pas l’occasion, puisque la demoiselle vint à passer un commentaire qui m’arracha un nouveau sourire, mais auquel je ne vis pas l’intérêt de répondre, puisque je ne me voyais pas lui demander quoi que ce soit concernant les raisons de son arrivée. Après tout, j’étais là pour lui faire visiter les lieux, pas pour l’obliger à me raconter sa vie. Après, si elle en avait plus long à dire, j’avais pour habitude d’être une oreille attentive, mais autrement, je n’étais pas celui qui allait chercher l’information bien souvent. Cela ne sembla pas la gêner pour le moment, puisqu’elle ne tarda pas à renchérir avec une nouvelle question, question qui n’aurait peut-être pas lieu d’être si jamais je m’étais étalé plus tôt, mais à laquelle j’étais quand même ravi de répondre, puisque là, je savais que ce serait intéressant pour elle, et non pas un simple monologue que je me serais permis de faire. De ce fait, je lui dis:  « Avant je me baladais un peu partout, je m’occupais de donner à manger aux animaux et de l’entretien, mais depuis que j’ai terminé ma formation de soigneur animalier, donc depuis deux ans, je suis assigné aux dauphins. » Et franchement, cela ne me déplaisait pas, bien loin de là. J’adorais interagir avec eux, je prenais plaisir à les voir faire les tours que je leur apprenais et je ne changerais pas de poste pour rien au monde, même si là, temporairement, j’étais devenu un guide touristique en quelques sortes, et je me sentis comme tel au moment où nous arrivâmes finalement là où il y avait plusieurs types de poissons, comme Kayla me l’avait demandé En effet, d’un signe de main, je lui présentai la section, lui disant:  « Nous sommes dans la section des poissons, les plus petits sont à l’entrée, et dans le bassin au bout, ce sont les plus gros. » Que pourrais-je dire de plus ? Franchement, je ne savais pas, j’espérais juste que pour le moment, ce soit suffisant pour satisfaire la curiosité de Kayla, parce que je n’étais pas certain que je saurais en dire davantage à leur sujet, sauf peut-être parler de la nourriture qu’ils avaient l’habitude de manger.

Alors que la jeune femme semblait quelque peu embêtée de me demander tant de choses, me concernant, ça ne me dérangeait pas. En vérité, je préférais de loin répondre à elle plutôt que de répondre à ces gens qui posaient des questions dans le seul intérêt de te coincer, te faire sentir mal ou quoi que ce soit du genre. Parce que pour ça, j’étais une victime parfaite. Je savais quand même me défendre quand la situation le nécessitait, mais il m’arrivait bien souvent d’être pris de court et ne savoir que faire, me laissant quelque peu gêné, culpabilisant du fait que je n’avais rien dit, que j’y repensais plus tard, et que je le regrettais. Mais là, dans le cas présent, ce n’était pas du tout ça ou du moins, ce n’était pas du tout ce que je ressentais; Kayla semblait manifester un vif intérêt par rapport au zoo, à ma profession, et pour tout dire, je me surprenais à trouver ça adorable. Et pour cette raison, je pensai qu’il n’y avait pas meilleure réaction à avoir à ses propos que de hausser les épaules et lui adresser un sourire rassurant, histoire de lui montrer que je n’allais pas m’enfuir, je n’allais pas en avoir assez de ses questions, rien de tout ça. De toute façon, ça me faisait pas mal plus plaisir de lui faire visiter le zoo parce qu’elle en avait envie, plutôt que de faire comme certains de mes collègues, soit parfois parler à un groupe, groupe scolaire, d’adultes, qu’importe, et se rendre compte que la moitié n’en avaient rien à faire. C’était chose normale pour eux peut-être, et ça semblait sûrement idiot de s’en vexer, mais personnellement, je trouvais ça quelque peu malpoli. Jamais je ne le dirais ainsi, bien évidemment, mais il n’en demeurait pas moins que me concernant, qu’importe si le sujet m’intéressait ou pas, je ne parviendrais jamais à ne pas écouter quelqu’un, ou du moins, lui faire savoir par quelconque geste, expression ou parole, que ça m’ennuyait. Et pour respecter mes principes, j’allais écouter Kayla jusqu’au bout. Plus encore, je n’allais pas le faire que par politesse, mais aussi parce que ça m’intéressait. Enfin, pas au point de me permettre de poser des questions indiscrètes ou un truc du genre, mais assez pour l’écouter jusqu’au bout et apprécier le fait de la voir aussi fascinée par les aquariums auxquels nous arrivâmes au bout d’un moment. Ne voulant pas briser cet instant, je la laissai donc les considérer, je la laissai prendre son temps, me moquant bien du fait que je les avais vus plus d’une fois, voire même trop souvent. Limite, je pourrais dire aussi que j’avais mis les mains dedans à plusieurs reprises, mais n’étant pas souvent enclin à parler de moi, je me ravisai. Gardant le silence, je repris la parole que lorsqu’elle en vint à me remercier de nouveau, mais d’une façon bien différente, qui me laissa sous-entendre qu’elle avait probablement vécu des choses loin d’être faciles avant d’arriver ici. Encore une fois, je ne m’osai pas à lui demander, mais je ne me permis pas de simplement lui répondre que c’était que mon boulot. À la place, je lui souris chaleureusement, et je lui dis, en toute sincérité:  « Ça me fait plaisir. » Puis, sur ces mots, j’attendis qu’elle soit prête, puis je continuai la visite en sa compagnie pendant tout le temps que je pus me le permettre, ravi, une fois que je retournai à mon poste, d’avoir passé du temps et avoir fait connaissance avec cette jeune femme.