Jealous ? I don't know what you're talking about.

Au point de vue physique, le baiser que nous échangeâmes ne fut pas différent de l’habitude, de ceux que nous avions échangé précédemment. Mais psychologiquement, c’était tout autre, c’était différent, d’une façon dont je ne saurais expliquer. Et il resta étrange même lorsque Josh revint sur le lit, m’y entraînant par la suite, et ça n’avait rien à voir avec le fait qu’il ne chercha pas à aller plus loin. C’était tellement étrange que pendant un instant je me demandais si j’avais pris la bonne décision d’agir ainsi. Si peut-être je ne finirais pas par le regretter. Dans le flou, je ne sus dire quoi que ce soit, le laissant alors prendre la parole, le laissant énumérer ce qui était apparemment une liste de ce qu’il appréciait chez moi. Mon physique, ça, je pouvais le comprendre, ce n’était pas étonnant du moins. Ce que je ne compris pas, ce fut pourquoi je frissonnai quand il mit sa main dans le bas de mon dos, taquinant ma peau au passage. Ce que je compris encore moins, ce fut pourquoi je fus incapable de prendre à la blague ce qu’il me dit par la suite, comment il appréciait ce caractère que j’avais, alors que pourtant, les gens avaient pour habitude de le détester. En gros, il était une des rares personnes qui semblait, et assumait le fait qu’il m’appréciait pour qui j’étais, tant pour mes qualités que pour mes défauts. En tout cas, c’était la première fois que quelqu’un me le disait aussi clairement, et alors que peut-être une fois dans ma vie, j’aurais voulu avoir ce genre de reconnaissance de ma mère, de mes proches, que je l’avais attendue d’une certaine façon, devant celle-ci, j’ignorais comment réagir. Je ne réfléchis plus, ce qui me valut de dire:  « Et pourquoi ç’aurait à te manquer ? », laissant sous-entendre limite que peut-être ça n’avait pas à arrêter là. Pourquoi je disais ça ? Je ne savais pas. Peut-être que je voulais me tirer dans le pied, peut-être que Josh m’avait manqué au final, même si j’avais dissimulé cette réalité avec de la rancune. Irais-je jusqu’à dire que j’étais amoureuse comme lui l’était de moi ? Non, je n’irais pas jusque là, à défaut de savoir c’était quoi, et c’était déjà bien suffisant d’admettre qu’il y avait quelque chose de différent chez ma personne, que je ne saurais plus expliquer, mais qui faisait en sorte que je ne voulais pas que cet échange soit notre dernier.

Exclusive, avec une seule personne, sans la possibilité d’aller voir ailleurs. Voilà quelque chose qui m’avait toujours effrayé, quelque chose que j’avais toujours cherché à fuir. Et même là, tout de suite, ça me rendait nerveuse, même si je l’avais cherché, même si j’avais tenu ces mots qui pourraient faire croire que peut-être, j’étais prête. Mais l’étais-je ? Je ne savais pas, tout se passait un peu trop vite. Il y a peu de temps de ça, je me faisais plaisir avec une connaissance sur mon chemin, voilà que là, Josh me parlait d’exclusivité. Mais Josh avait quelque chose de différent de ce type; il ne me donnait pas l’impression que j’étais là que pour le sexe et le plaisir. Il me l’avait prouvé, il m’appréciait pour autre chose, ce que personne n’était parvenu à me dire, à faire auparavant. Et juste pour ça, juste pour croire que peut-être, ça pourrait marcher, je me retrouvai à hocher la tête, positivement. Non, je n’allais pas m’exclamer dans un grand « Oui, je le veux », je n’allais pas lui sauter au cou et l’embrasser. Ce n’était pas moi, et il devait savoir, s’il me connaissait si bien, que déjà, que je lui réponde, ainsi, c’était beaucoup. Et puis, si ce n’était pas suffisant, j’aurais pu excuser le tout en disant que je n’avais pas eu le temps, Josh se levant pour aller chercher son papier de sortie, comme prévu dans un premier temps, me laissant seule un instant, puisque je ne me voyais pas de l’accompagner, puisque ça me prenait un temps pour réaliser, en quelques sortes, ce que j’avais fait. Et même si c’était difficile à croire que j’avais vraiment fait une chose pareille, je ne me sentis pas de prendre mes jambes à mon cou ou quelque chose du genre. J’attendis donc, patiemment - puisqu’à la vitesse qu’il allait, de la patience, il en fallait - son retour, qui arriva quelques instants plus tard. Il revint avec des mots à la bouche, des mots clichés qui me firent rouler les yeux, et qui eurent pour effet de me dire:  « J’ai dit oui pour être exclusive, pas jouer le petit couple cliché. » Josh ne devait pas le prendre mal. J’étais comme ça, c’était tout, et il le savait. Et puis, amoché comme il était, ce n’était clairement pas le temps d’aller dans un restaurant tout mignon et étroit. Soupirant doucement, j’ajoutai:  « Mais j’ai faim, donc on peut aller manger un morceau. T’aimes les sushis ou pas ? » Personnellement j’en raffolais, je pourrais en manger n’importe quand, mais si lui, ça ne lui convenait pas, alors je pourrais bien prendre autre chose. Ce n’était pas comme si j’étais vraiment difficile.

Je n’avais aucune idée d’à quoi m’attendre pour la suite des choses, mais je savais déjà que se tenir la main, les trucs mignons, les fleurs et ce qui venait avec, ce n’était pas pour nous. Ce baiser par contre que nous vînmes à échanger, contre le mur, sans délicatesse, c’était beaucoup plus nous, c’était à l’image de cette relation que nous avions. Et même si évidemment, celle-ci était destinée à évoluer, que ce soit en bien ou en mal, mais je ne voulais pas perdre cette base, cette tension qui rendait le tout plus amusant, plus excitant, même si ce n’était clairement pas là, tout de suite que nous allions aller plus loin, dans cette chambre. Ce serait un peu abusé, au vu de ce qui s’était passé précédemment, quand même. Manger devenait donc une bonne option, tant que ça ne se transformait pas en rendez-vous un peu trop galant. Déjà, le fait que nous ne pourrions pas nous tenir la main, c’était limite une bonne chose, et le fait que Josh vienne à râler que je trainais, c’était encore mieux. Non pas que j’aimais qu’on me fasse un tel commentaire, mais parce que c’était plus naturel, à mon avis en tout cas. Et du coup, je n’eus aucune gêne à rouler faussement les yeux, me calquant sur son rythme qui, ironiquement, n’était pas bien rapide, au vu de son handicap temporaire. Et tandis que nous marchions, je me surpris à le regarder, du coin de l’oeil, regarder son sourire, cet air beaucoup plus léger qu’il abordait, et qui lui donnait un air presque… mignon. Juvénile, comme un adolescent qui est en train de parader sa première petite-amie dans les rues. Et je n’avais pas envie de gâcher quoi que ce soit, alors je me fis taiseuse, jusqu’à ce qu’il reprenne la parole, me demandant, limite craintif, si j’allais conduire. Là, ce fut plus fort que moi; pince sans-rire, je dis:  « Je pensais te laisser marcher jusque là… » avant de faire un sourire en coin, pour lui montrer que je plaisantais. Et pile à ce moment, nous arrivâmes devant mon véhicule, duquel je déverrouillai les portières à distance. Mais plutôt que de me rendre directement du côté conducteur, j’allai ouvrir la porte du côté passager, laissant Josh s’installer, galante comme je pouvais l’être parfois - et aussi parce que je refusais qu’il abîme mon véhicule avec ses béquilles et sa maladresse. Ensuite, je me rendis du côté conducteur, appuyant sur le bouton pour démarrer la voiture, puis prendre la route vers le restaurant.

La normale des gens serait du genre à tenter de trouver un restaurant susceptible de plaire à tout le monde quand on leur laissait le choix, mais moi, ce n’était pas mon genre. On me laissait choisir, on me laissait faire selon mes envies et préférences, je le faisais, et je ne passais pas par quatre chemins. Ça ne plaisait pas à autrui ? Alors c’était tant pis, puisqu’il était trop tard et j’avais fait mon choix. Sans changer d’avis une seule fois, je conduisis jusqu’au restaurant de mon choix, celui que j’avais en tête depuis le moment où j’avais demandé à Josh, dans cette chambre d’hôpital, s’il aimait les sushis ou non. Évidemment, le restaurant proposait autre chose, mais moi, c’était ce que je visais. Et heureusement, l’éventualité ne sembla pas déplaire à Josh, qui entra dans le restaurant sans montrer quelconque signe comme quoi il voulait faire demi-tour. Plus encore, il vint même à dire que le restaurant lui plaisait quand nous fûmes installés à table, ce qui était suffisant pour me satisfaire, même si je ne me serais pas sentie coupable si ce n’était pas le cas. Regardant le menu, ce ne fut pas pour autant que je n’entendis pas la question de Josh, à laquelle je répondis:  « Parfois. Comme ça j’ai mangé ma portion de poisson pour la semaine. » J’avais tenu ces propos on ne peut plus sérieusement, mais en fait, je plaisantais. Oui, j’aimais les sushis, et je l’assumais parfaitement. Et pour ça, je n’allais clairement pas changer ma commande presqu’habituelle, soit un plateau de sushis variés. Mon choix étant fait, je refermai le menu, demandant ensuite à Josh:  « Tu commandes quoi ? », cherchant à la fois à faire la conversation, mais me surprenant aussi à être curieuse de voir comment il allait s’en sortir en ces lieux, peut-être même, qui sait, en apprendre un peu plus sur ses goûts au passage.