"Tous ensemble, avec toi nous sommes qu'un" ♠ Levi

Il avait donc bien quelqu’un d’autre sur qui compter, ce qui était bien. Cependant, je ne comprenais pas pourquoi est-ce qu’elle fermait les yeux sur ça. Du moins, pourquoi elle ne l’avait pas aidé à arriver ici pour se faire soigner et aller mieux par la même occasion. « Elle sait pourtant, que tu te droguais ? Elle le savait ? Alors pourquoi ? Je n’arrive pas à comprendre comment on peut fermer les yeux sur ce genre de chose. Heureusement que je ne suis pas comme ça avec Derrick. » Je secoue la tête en soupirant. Je n’étais pas en colère contre lui, mais plutôt contre cette fille. D’ailleurs… il me semble la connaître si c’était bien sa meilleure amie, j’allais vite le savoir. « Elle s’appelle Freya ? » J’allais pouvoir avoir une explication et surtout savoir si j’avais vu juste. Du coup, si je la recroise, je ne la louperai pas. Comment peut-on fermer les yeux sur ce genre de choses, vraiment. Je serre les poings et croise les bras pour éviter de montrer ma frustration. « Que tu veuilles embêter personne, soit. Mais elle n’aurait pas dû te laisser dans cette merde pendant tout ce temps. Tu parles d’une meilleure amie. » Je me mordis la lèvre, j’étais peut être aller trop loin, mais savoir quelqu’un aurait pu faire quelque chose bien avant m’énervait. Si je n’étais pas arrivée ce jour-là, qui sait où il serait maintenant ? « Excuse-moi. » Même si je ne l’étais pas vraiment, je n’avais pas le choix que de m’excuser. On ne peut pas dire ce genre de chose des personnes qu’on ne connaît pas. Puis si cette fille voulait vraiment que Haley l’appelle Tata, elle allait devoir faire des efforts pour Levi et envers lui et surtout se comporter comme une véritable meilleure amie. Je l’écoutais à nouveau et souris à ce qu’il venait de dire, c’était touchant. « Tu ne représenterais rien à mes yeux, tu serais resté dans ton appartement à te droguer et tu n’aurais plus vu ta fille sans que je te propose de faire cette cure. » D’accord, c’était assez subtile comme message mais je ne pouvais pas faire mieux pour lui dire qu’il comptait pour moi. C’était tout de même la moitié de notre fille et il n’était pas question que je le laisse tomber maintenant qu’il avait fait tous ces efforts. Je frottais mon bras gauche et observais Haley quelques secondes avant de voir son sourire si vrai quand elle nous voit tous les trois réunis. « Je suis contente, malgré tout, que tu t’en sortes et que tu ailles mieux. Même s’il te reste du chemin. » Puis peut être qu’avec le temps, on arriverait à se voir plus, à essayer de se parler plutôt que de s’échanger Haley respectivement quand on le devait. Je pouvais également faire cet effort, je le lui devais après tout. J’étais heureuse d’entendre qu’il n’allait pas reculer et qu’il allait faire le nécessaire pour ne plus craquer. « De toute façon, j’y veillerai personnellement. » Je lui fis un grand sourire et doublais mon affirmation en hochant vivement la tête. Oui, il s’en sortirait et je l’aiderai, jusqu’au bout, que ça lui plaise ou non. « Si, au début c’était pour le plaisir ensuite c’est devenu une nécessité. » C’est comme l’alcool au début on en prend pour le plaisir et se satisfaire, ensuite ça en devient une obligation. Voilà comment se passe toutes les addictions et à quel point il est difficile de s’en sortir. « En tout cas, si jamais tu en ressens le besoin, tu n’hésites pas à me passer un coup de fil ou bien à m’envoyer un message. » Je répondrai présente et je m’en assurerai puis même s’il faut que je me déplace jusqu’ici, je le ferais. Que ce soit pour lui, pour Haley ou même pour moi. Maintenant que j’étais mêlée à ça, je me sentais entièrement concernée et je ne pouvais plus reculer puis surtout, je ne le voulais pas. Ca nous avait permis, malheureusement, dans ces circonstances, de nous rapprocher et de nous parler. Alors non, je n’allais pas l’abandonner ni même arrêter de prendre ses nouvelles. Puis savoir que ça faisait plaisir à notre fille, ça me faisait plaisir à moi aussi, donc pourquoi arrêter alors que nous sommes sur un si bon chemin.

Je savais que j’en devais beaucoup à Savannah et que par conséquent, il serait ingrat de ma part de me montrer malpoli et ce, qu’importe les circonstances. Par contre, je dus admettre que cela ne me plut pas vraiment de l’entendre parler de personnes qu’elle ne connaissait pas, venant ainsi se mêler de ma vie privée à un niveau que je ne saurais pas vraiment tolérer. Mes relations, mes amitiés, cela ne concernait que moi à mon avis, surtout qu’elles avaient une place bien complexe dans ma vie, alors l’exposer n’était pas fait pour moi. Et ça, j’aurais aimé le lui faire savoir, sauf qu’avant que je ne puisse faire quoi que ce soit, je fus soudainement choqué par le prénom qu’elle prononça, prénom qui était soi-disant celui de son meilleur ami. À ce moment-là, je la considérai pendant un instant, les yeux écarquillés, parce que ce prénom qu’elle venait de prononcer était celui de mon ancien meilleur ami, ce traitre qui m’avait laissé seul dans mon merdier, qui faisait partie des raisons pour lesquelles j’étais coincé ici désormais. Cependant, avant que je puisse demander à en savoir plus, Savannah me surprit de nouveau avec une question, si bien que je ne pus faire autrement que de prendre pour acquis que Derrick était un prénom bien commun et que ça devait être une autre personne, puis lui répondre, sourcils froncés:  « Oui… » Pendant un instant, je me dis que je pourrais lui demander comment elle la connaissait, puis je me ravisai quand je compris que fort probablement Haley l’avait mentionnée ou quoi que ce soit du genre. Après tout, les deux filles s’aimaient beaucoup, Haley l’appelait même Tata, pour mon plus grand plaisir, alors ce serait normal, surtout compte tenu du fait que Savannah avait mentionné que notre fille lui parlait beaucoup des week-ends que nous passions ensemble. Cependant, cela ne voulait pas dire, à mon sens, qu’elle était en droit d’avoir son mot sur cela. De plus, j’avais si peu d’amis, Freya faisait partie des rares en qui j’avais confiance, je ne voulais clairement pas la perdre pour une histoire d’ingérence mal placée. Et comme pour m’en assurer, lorsque Savannah se radoucit et en vint à s’excuser de ses propos, je crus quand même bon de lui dire, en gardant un ton de voix aussi neutre que possible:  « C’est pas grave. Mais s’il te plait, ne la juge pas. C’est pas sa faute, c’est la mienne. » J’aurais pu continuer en venant à expliquer pourquoi, mais puisque ce serait beaucoup trop dur, je choisis d’en faire fi, d’autant plus qu’au final, ça n’aurait fait d’étirer la conversation sur ce sujet de façon bien inutile, sachant qu’il ne fallut pas beaucoup de temps pour dévier la discussion par la suite. Et même si le sujet ne fut pas des plus légers, mais qui fut en mon sens pas mal plus supportable que le fait de parler de mes amitiés, passées et présentes. Enfin, il le fut suffisamment pour qu’à la fin des propos de Savannah sur la signification que je pouvais avoir à ses yeux, je sois en mesure d’esquisser un petit sourire timide. Cela semblait ne pas être grand-chose, mais me concernant, c’était suffisant, parce que je ne voulais pas non plus prendre pour acquis des choses que j’aurais pu mal interpréter. Après tout, même si j’avais compris depuis un moment maintenant que la relation que j’entretenais avec Savannah ne serait plus jamais la même après ce qui s’était passé et ce qui était en train de se passer, que soudainement, elle était passée à une personne à qui je parlais pour le bien de notre fille à quelqu’un qui me savait vulnérable, probablement plus que quiconque, je ne voulais pas non plus me faire de fausses idées susceptibles de provoquer des malaises et tout faire sauf aider le processus, processus qui tait encore et toujours en cours, parce que je savais bien que malgré le sevrage, je n’étais pas prêt à sortir de si tôt et clairement, elle le savait aussi. Soulagé de ne pas devoir le préciser, je me contentai de hocher la tête, toujours avec cet air plus doux et neutre au visage, même si doucement, cet air devint un peu plus triste quand j’en vins à lui avouer que la drogue n’était pas un objet de plaisir me concernant. Puis, sans que j’ajoute quoi que ce soit, elle compléta mon propos, me laissant alors qu’à dire:  « Exact… » en pinçant les lèvres. Évidemment, j’étais loin d’être fier de cette situation, mais compte tenu que je voyais qu’elle comprenait que jamais je n’aurais fait passer la drogue par-dessus la présence et le bien-être de ma fille - j’espérais qu’elle le comprenne en tout cas - je ne jugeais pas utile d’en parler plus longuement. De ce fait, je repris un air plus convenable quand elle manifesta encore une fois son désir de me venir en aide si j’en ressentais le besoin. Là, je crus bon de m’exprimer plus clairement et de lui dire:  « Je n’y manquerai pas, merci encore. » Enfin, quand je disais que je n’y manquerait pas, clairement, je n’allais pas non plus lui envoyer un message ou l’appeler dès que quelque chose clochait, parce que non seulement, elle en aurait marre au bout d’un moment et de plus, ce n’était pas contre elle, mais m’ouvrir et exposer mes blessures, ce n’était pas mon genre à la base. Je savais bien qu’il me faudrait améliorer ça me concernant, mais je n’en étais pas encore là. Après tout, ce n’était pas pour rien qu’il me restait encore beaucoup de chemin à faire avant ma complète guérison.

Donc c’était sa meilleure amie… Elle avait eu raison et pour seule réponse, je hochais la tête à mon tour. Qu’est-ce qu’elle avait fait pour ne pas agir ? Ca me m’était hors de moi car je me retrouvais là-dedans alors que je n’étais pas grand chose à ses yeux… Soupirant, je me frottais la nuque face à sa réponse. Ne pas juger. Oui, c’est vrai, je n’avais pas le droit. C’était ma faute, je ne devais pas juger. Du moins, je ne pouvais pas me le permettre alors qu’il venait de se confier à moi… On ne choisit pas ses amis et ni sa famille, ils arrivent comme ils viennent et on les accepte avec leurs défauts et qualités. J’étais bien placée pour savoir ça. Cependant, jamais je n’aurais laissé Derrick dans une telle situation si je l’avais vu ainsi, même très peu de temps. J’aurais agi. « D’accord. » Je ne pouvais pas dire grand-chose d’autre pour le coup. Je restais à ma fenêre, observant le monde extérieur qui devait lui manquer mine de rien. Il avait tellement de progrès à faire avant qu’il puisse de nouveau sortir comme quelqu’un de normal et sans avoir à replonger dans la seconde. Cela me fit un pincement au cœur mais j’étais contente de voir que Haley était ravie de venir ici même si ce n’était pas un endroit approprié pour son âge. Après tout, je ne pouvais pas l’empêcher de vouloir voir son père, puis je pouvais bien le lui accorder, ce n’était qu’une fois par semaine. Et tous deux en avaient besoin. Moi aussi d’ailleurs. Je venais presque pour le plaisir aussi. Ne pas y aller me faisait mal au cœur mais je m’arrangeais toujours pour que notre fille puisse aller le voir. Pas question de lui priver de son père et de lui priver sa fille. C’était tellement beau de voir leur complicité. Je regardais Levi en souriant et j’aurais pu rester ainsi pendant de longues minutes si notre conversation ne se retourna pas vers son indépendance et comment il en était arrivé là. Je grimaçais en me frottant les bras. « Un cercle vicieux quoi… » Tout ceci n’était que cercle vicieux. Une fois entraîné, on ne s’arrête plus… comme une boule de neige qui descend une piste de ski, une fois lancée, on ne peut plus l’arrêter et elle emmène tout sur son passage. Voilà ce qu’avait dû ressentir Levi et comment il avait pu en arriver à ce stade. Voilà pourquoi je voulais être là à n’importe quel moment pour lui maintenant. Je me rapprochais posant ma main sur son bras en souriant. « Et je serais là. Je te le promets. Pour toi et Haley. » Je laissais ma main quelques instants puis l’enlevais pour me diriger vers ma fille, lui soufflant à l’oreille qu’on était proche du départ. Je revins vers Levi puis repris en fourrant mes mains dans mes poches cette fois. « Je repasserai sûrement la semaine prochaine. Avec ou sans Haley ça dépendra de quand elle veut venir. » Je lui fis un grand sourire et me reculais pour remettre correctement mon manteau, l’attachant et attrapant Haley par les épaules pour lui faire de même. « Aller, dis au revoir. » Je les laissais se dire au revoir et pour ma part je m’en tenais à un signe de la main. Je ne savais pas quoi faire d’autres. C’était encore trop délicat de lui faire la bise ou bien de le tenir dans mes bras. Rien que le fait d’avoir eu ce contact de rapprochement tout à l’heure m’a paru bizarre. Alors je laisse ma main se lever et s’abaisser, avec un sourire sur le visage. Je poussais Haley vers la sortie et tournais la tête une dernière fois vers Levi avec un sourire en coin, gravant son regard dans mon esprit. Je voulais à tout jamais me souvenir de son regard, le même que celui de notre fille. Pourquoi ? Car je me sentais dans le devoir de le retenir et puis, ce regard disait tellement de chose pour moi.