Le rendez-vous chez le dentiste (Kawaii)

Aujourd'hui, je dois faire quelque chose que je n'aime pas. Et depuis mon plus jeune âge, je n'ai jamais aimé me rendre chez le dentiste. Sérieusement, qui aime ça ? Se retrouver en face de ce médecin, la bouche grande ouverte pendant qu'ils ne fait on ne sait quoi là dedans… Enfin, c'est sans doute mieux qu'un rendez-vous chez le gynécologue… Mais cela est une autre histoire ! Je me prépare donc. Super le jour de congé ! Et il n'y a personne à l'appartement pour me soutenir dans cette épreuve. Bon, je sais que je suis une grande fille. Je ne suis plus une gamine, mais je n'arrive pas à me défaire de cette non envie de croiser une dentiste. Surtout parce qu'à chaque fois, je l'entends me dire qu'il faut que je fasse attention. Que j'arrête les sucreries… Quelques chose qui m'est impossible. Je me brosse les dents comme tout le monde mais il m'arrive quand même d'avoir des caries de temps en temps. Et c'est ça que je ne veux pas. Je ne supporte pas qu'on me fasse la leçon sur ma façon de manger, quoi manger ! Ce docteur n'est pas mon père. Et même mon papa avait du mal à me dire d'arrêter de manger des gâteaux.

Du coup, j'attrape mon sac pour partir. J'y vais, mais j'y vais à reculons. D'autant plus que je ne suis là que depuis quelques mois, c'est donc un dentiste que je ne connais pas, autant dire que je vais beaucoup moins rigoler quand je serai sur place. En fait, déjà là, je ne rigole pas tellement. Bon, si je continue de traîner, je vais arriver en retard au rendez-vous. Je ne connais pas le chemin, je vais peut être me perdre, ce serait vraiment idiot que je loupe mon rendez-vous, que je sois obligée d'en prendre un nouveau et que je gâche ma journée à tenter d'aller à ce rendez-vous chez le dentiste, pour au final tout louper.  Je quitte donc l'appartement, mon téléphone à la main pour l'itinéraire, le sac perché sur mon bras et je referme la porte derrière moi. Tournant la clé dans la serrure, j'ai l'impression d'oublier quelque chose. Je n'ai pas cuisiné, ce n'est donc pas le gaz, je n'ai pas utilisé d'eau, donc je n'ai pas oublié un robinet ouvert, mais alors quoi ? Mettant ce sentiment de côté, je m'en vais, regardant le chemin que je dois prendre sur mon téléphone. Tel métro, et puis là et encore là. D'accord, c'est parti.

Arrivant enfin sur place, je suis tout pile à l'heure pour mon rendez-vous. À l'accueil, on m'annonce qu'il y a un peu de retard, je vais donc dans la salle d'attente pour patienter. Le médecin viendra me chercher quand mon tour de torture viendra. Ça ne me dérange pas, bien au contraire. Je vais donc là où m'indique la secrétaire mais il n'y a pas de place de libre. Tant pis, j'attendrai donc mon tour debout. Ça ne me fera pas trop de mal. Je vois une mère et son enfant, ce dernier qui fait un caprice, la mère s'énervant parce qu'il ne s'est pas brossé les dents… Ha, ben voilà ce que j'ai oublié de faire ce matin. Je retourne donc vers la dame de l'entrée pour lui demander comment je peux faire. Elle me donne ce qu'il faut et m'indique un endroit où je peux me brosser les dents. Lorsque je reviens dans la salle d'attente, les têtes ont changés. Mais toujours pas de place pour moi. Il ne faut pas trop longtemps pour qu'une place se libère, je vais donc m'asseoir. C'est étrange, l'homme qui vient de quitter sa place s'éloigne, mais reste debout dans cette salle… Je comprends rapidement en entendant la blondinette à mes côtés mâcher sa gum de façon à faire beaucoup de bruit. La dame de l'autre côté tape du pied. Cela semble l'énerver, ou bien est-ce qu'elle est vraiment stressée… De mon côté, cela m'amuse et me fait oublier la non envie que j'avais à vouloir venir ici. Je souris donc, rigolant presque en l'écoutant mâcher, occupée sur mon téléphone.

Assise aux côtés de cette jeune femme, à qui je donnerai environs mon âge, je pourrai être aussi agacée que l'homme m'ayant laissé sa place, ou que cette dame qui la regarde de travers, tout cela parce que la demoiselle mâche un chewing-gum de manière bruyante. Mais ce n'est pas le cas. Au contraire, cela m'amuse. Elle se fiche pas mal de ce que peut penser cette femme qui se tient en face de nous, et ce n'est pas souvent que les gens se foutent de ce que peuvent penser les autres. J'aime les gens comme ça, car je suis moi-même comme ça. Peu m'importe ce que l'on pense de moi, du moment que je suis heureuse avec mon entourage, pourquoi j'irais vers les gens qui me font de mauvais commentaires ? Être entourée d'accord, mais je veux être bien entourée ! Je tourne un peu sur face de bouc grâce à mon téléphone. Je vois les différents postes que partagent mes amis, rien d'extraordinaire, bien au contraire. Rien d'amusant, rien de nouveau. Le plus intéressant, c'est machin qui a changé son statut pour se mettre en couple. Sa copine a du lui faire des menaces, mais il était temps qu'il le change, après un an qu'ils sont ensemble… Je prends note de l'information et quand on se retrouvera, je pourrai le taquiner à ce sujet. Il me tarde de reprendre l'émission pour retrouver l'équipe. Voir les nouvelles têtes, les anciennes et vivre une nouvelle aventure pour la prochaine saison de danse avec les stars. Je souris, je clique sur j'aime pour lui montrer que j'ai vue. Quand, à son tour, il verra la notification, il saura qu'à nos retrouvailles il aura le droit à ce que je lui tombe dessus.

C'est alors que je vois un paquet de chewing-gum me passer sous le nez. Je coupe alors mon téléphone pour lever un peu le nez sur ce qu'il se passe autour de moi. Puis je me tourne vers la demoiselle qui me propose gentiment de l'accompagner à mâchonner. Je vois l'homme qui m'a laissé sa place rester debout à la mienne. Il me regarde d'un air qui me veut du mal. Il ne semble pas vraiment content d'avoir quitté sa place, mais tant pis pour lui. Et pour le provoquer, j'accepte la proposition de ma voisine.
« Avec plaisir ! Merci. Ils sont à quel goût ? »
J'attrape un dragée que je mets dans ma bouche et que je commence à mâchouiller de la même manière que l'inconnue qui occupe le siège à côté du mien. Je vois également la femme en face de nous pousser un soupire. Et alors je fais encore plus de bruit. Elle va se calmer celle-là ? Elle souhaite que l'on parle de son gamin qui se roule par terre et qu'elle ignore ? Depuis le temps qu'il hurle, personne ne lui a encore rien dit ? Et pourtant, tout le monde nous lance un regard glaciale. Le gamin en question semble se calmer, nos oreilles vont pouvoir se reposer. Je souris, me réjouissant trop vite de cette accalmie. Car l'enfant ne faisait que reprendre son souffle pour mieux repartir dans sa crise.  Il est fatiguant. Mâchonner cette gomme me calme les nerfs, c'était une très bonne idée qu'à eu la demoiselle. Et quand je mâche ce bonbon, j'adore également faire des bulles. Mais je crois que c'est de trop pour la femme en face de nous, puisqu'elle se permet de nous faire un commentaire sur nos manières à toutes les deux. Grosse erreur !
« Pardon vous dites ? On en parle de votre mioche qui se roule par terre en hurlant, cassant les oreilles de tout le monde ici ? C'est des manières peut être d'éduquer un gamin ! »
Je soutiens son regard, mâchant mon chewing-gum pour l'énerver, mais chose sur, je ne baisserai pas le regard la première, car je le sais que ce n'est pas moi qui suis en tort.

On ne se connaît pas vraiment, ni depuis très longtemps avec la blondinette et pourtant, je l'adore déjà. L'entendant mâcher son cheewing gum d'une manière assez bruyante, énervant les gens autour de nous, étant également une petite peste sur les bords quand l'envie m'en prend, je suis très amusée d'être à ses côtés. J'accepte donc volontiers la gum à mâcher qu'elle me propose. Nous sommes à présent deux, pour deux fois plus de bruit et donc deux fois plus d'énervement chez les autres clients. Enfin malgré tout ça, nous n'arrivons à la cheville de ce sale mioche qui hurle à s'en vider les poumons. Le bonbon m'aide donc à garder mon calme face à ce gamin. Je mâche de façon frénétique. Le goût tutti frutti est l'un de mes préférés je crois. Habituellement, je prends un goût simple comme menthe, c'est une valeur sûr. Peut être qu'à l'avenir, quand j'achèterai des cheewing gum je me tenterai de changer de goût. Allé, un peu de risque dans la vie ! C'est vrai que changer le goût d'une friandise, ça c'est du risque. Je rigole en y songeant. Pensant à tout cela, j'oubliais presque cet imbécile qui se roule par terre. Heureusement que je ne suis pas sa mère, je pense qu'avec un tel enfant, j'aurais perdu patience, je l'aurais abandonné sur un parking ou dans un magasin. Quand j'ose enfin lui dire ma façon de penser sur son rejeton, c'est parce qu'elle m'a cherché la première en faisant un commentaire des plus déplacé. Certaine de ne pas être la seule à penser que son gamin nous casse les oreilles. Mais bien sûr, les enfants sont rois de nos jours, il est donc impossible quelqu'un s'ose à le faire taire si il souhaite faire un tel caprice. Mais trop c'est trop. Il ne faut pas abuser quand même. On ne fait que mâcher un cheewing gum, rien de bien méchant en soit.

J'entends la fille à mes côtés faire un commentaire à son tour. Je me tourne vers elle et me retourne en direction de la personne qu'elle regarde alors. Ce n'est autre que l'homme qui n'a pas voulu rester à ses côtés. Je rigole en voyant sa tête déconfite. J'aime vraiment cette jeune femme.
« Et sinon, moi c'est Kawaii, mais tu as l'autorisation de me trouver le surnom de ton choix ! Et toi, comment tu t'appelle ? »
Je souris à la blondinette. On a déjà partagé un cheewing gum, il serait peut être temps de se présenter selon les convenances. Attendant sa réponse, je vois une assistante entrer dans la salle d'attente et appeler le nom d'un patient. Quelle n'est pas ma joie quand je vois la femme au mioche se lever, attrape son gamin et partir avec la dame. Je plains le dentiste, mais je dis merci pour mes oreilles.
« Enfin mes oreilles vont pouvoir profiter d'un peu de silence, j'ai bien crue que j'allais finir sourde ! »
Enfin, le silence, le silence, il ne faut pas trop y compter. Car même si le gamin n'est plus dans cette salle, on l'entend encore pousser ses hurlant d'où il se trouve. Dans un sens, il a la bouche grande ouverte, ce doit être pratique pour le médecin. Je regarde mon téléphone, je n'étais pas tellement à l'heure pour mon rendez-vous, ou du moins tout pile et finalement, c'est le dentiste qui est en retard. C'est ironique, mais me voilà avec un peu de répit.

Son petit caractère, aimant faire chier le monde qui l'entoure, semble tellement proche du mien. Je nous imagine déjà très bonnes copines toutes les deux, et tout comme dans cette salle d'attente, faire gentiment chier les gens croisant notre chemin. Je suis sûre que l'on va bien s'entendre et même plus que ça. Je rougis légèrement quand je l'entends me dire qu'elle adore mon prénom. Ce n'est pas souvent que l'on me complimente sur ce prénom. D'habitude, j'entends plus les gens rigoler, me demander si je ne me fou pas de leur figure, connaissant le mot Kawaii comme ce mot japonais pour désigner quelque chose de mignon et dont la monde fait fureur dans la culture actuel. Je n'ai jamais tellement aimé ce prénom, sans doute à cause des comparaison et jeu que l'on pouvait faire dessus. De ce fait, je n'ai jamais apprécié cette tendance du manga, préférant largement lire un bon comics, ces vrais bandes dessinés, avec de vrais héros et de vrais méchants. Les japonais sont bien trop bizarre dans les histoires qu'ils écrivent, tournant toujours autour du même sujet. Le plus étrange et repoussant c'est peut être cette passion qui tourne autour de l'inceste avec une relation entre frère et sœur. Je la regarde, je lui souris, heureuse de rencontrer quelqu'un qui apprécie simplement mon prénom, auquel il faut dire, il est difficile de trouver un surnom…

« Euh … Et bien merci ! En fait cela vient des mes origines, je suis née à Hawaii et là bas, ça veut dire ''celle qui chante'' »
Je lui adresse un grand sourire, lui donnant les explications, non pas pour éviter qu'elle ne finisse par penser au Japon, mais pensant lui parler un peu plus de moi.
« J'aime bien le tient aussi, simple, mais je trouve ça tellement adorable ! J'ai toujours voulu d'une prénom comme le tient …»
Durant mon enfance, j'ai tant rêvé d'un prénom comme celui-ci. Je rigole en l'entendant être de mon avis quand le gamin quitte enfin la salle d'attente pour foutre la paix à nos petites oreilles fragiles et désormais fatiguées de tous ces hurlements. Je rigole d'autant plus en écoutant la suite. Je suis bien de son avis, et involontairement, je hoche la tête.
« C'est vrai qu'un bouton off, sur certains petits monstres, ce serait pas du luxe ! Enfin, il n'est plus là, on va pouvoir parler ! Tu fais quoi dans la vie ? »
Maintenant que l'on s'entend, autant profiter pour discuter et apprendre à la connaître.

Je n'ai pas pour habitude de donner mon prénom à la première personne que je rencontre. Qui plus ai, dans une salle d'attente chez le dentiste. C'est habituellement, une personne que je ne serais jamais amenée à revoir, alors à quoi bon discuter avec ces gens là qui n'apporteront rien dans ma vie ? De plus, donner mon prénom, c'est donner un peu de moi-même. Surtout que je n'aime pas mon prénom. Enfin non, je l'aime bien, mais je n'aime pas le fait que la plupart des gens fassent le rapprochement avec cette culture manga qui envahit le monde. Qui parle d'américanisation ? Moi je parle plutôt de mondialisation. Tout le monde tente de prendre la culture de tout le monde, des guerres éclatent pour savoir qui a raison, qui a tort. C'est tellement ridicule ! Quand tout sera uniforme, ils trouveront encore autre chose pour se détruire, c'est la nature de l'homme. Mais cette fille est différente. J'ai envie de lui parler. Je pense sincèrement que l'on peut devenir de bonnes amies à l'avenir. J'ai envie de la revoir. Et pour la première fois, j'aime véritablement mon prénom, grâce à elle. Je rigole en l'entendant me dire que j'ai de la chance de venir de là-bas. Je me mords la lèvre inférieure, on ne se connaît pas encore assez pour qu'elle connaisse mon passé, alors je vais simplement continuer de lui sourire.
« Ce qui me manque le plus, c'est de pouvoir me promener pieds nus sur les plages de sable chaud. »
Je deviens pensive, je me souviens de cette journée que j'avais passé quand j'étais encore petite. Quand nous étions encore tous ensemble. Je reviens à moi, rigolant doucement.

« Je ne vois pas en quoi ! Il y a un côté adorable à faire chier le monde. Moi je trouve ça marrant. »
Elena est un prénom simple et connu, bien qu'il ne soit pas si répandu que cela. On croise d'avantage des Chloé que des filles portant le prénom d'Elena.
« En tout cas, tu es la première Elena que je rencontre. »
Ou alors, je ne me souviens pas en avoir déjà rencontré une avant la blondinette. Et si tel est le cas, elle ne devait pas être bien intéressante pour que je l'oublie. Nous continuons de papoter, parlant de ce que nous faisons actuellement de nos vies. Et l'écouter me donne encore plus le sourire. Je me dis que nous étions faites pour nous rencontrer et pour sympathiser. Pas très studieuse, et qui veut profiter de la vie, j'ai l'impression de me reconnaître.
« Je n'ai pas non plus fait d'étude après le lycée. Ho mon père aurait voulu, mais ce n'était pas fait pour moi. Je suis plutôt quelqu'un dans l'action. Alors je suis devenue danseuse. Depuis deux ans, je participe à l'émission danse avec les stars et pour ma troisième participation, j'ai bien l'intention de remporter la victoire ! »
Une flamme anime mon regard, la flamme de la rage de vaincre. La victoire m'a filée sous le nez de si peu l'an passé que cette année, je ne veux pas que cela se reproduise ! L'assistante entre de nouveau dans la salle d'attente pour appeler le patient suivant. Ce n'est pas moi, je regarde sur mon téléphone.
« Tu avais rendez-vous à quelle heure ? Pour moi, il y a déjà 10 minutes de retard. »