you're in my life for ever | Tommy G.

Passer commande pour pouvoir servir plus rapidement, voici ce qui semblait être le mot d’ordre dans ce restaurant, puisqu’à peine avions-nous pu continuer notre conversation, nos plats revinrent. Évidemment, ce ne fut pas plus mal, dans le sens où il était maintenant certain qu’une fois que nous l’eûmes remerciée de son service, nous n’allions plus être dérangés pendant un petit moment, nous donnant alors l’occasion de poursuivre notre conversation sans interruption, conversation dans laquelle mon amie semblait plus que désireuse de se confier. Comprenant que c’était loin d’être simple pour elle, même si je n’étais pas le meilleur conseiller qui soit, je tentai de me montrer oreille attentive autant que possible, même si précédemment, j’avais tenté de l’aider ne serait-ce qu’un peu. Au final, même si mes idées ne semblaient pas si mauvaises, il n’en demeurait pas moins que ce n’était pas infaillible et parfait, comme elle me le fit comprendre en poursuivant son discours, discours qui, je n’avais pas pu m’empêcher de le remarquer, était surtout ponctué de doutes, de suppositions et de craintes concernant une éventuelle rencontre entre la mère et son fils perdu de vue depuis trop longtemps probablement. De ce fait, ou du moins, ce que je comprenais, c’était que trouver la solution infaillible, le discours parfait à le lui dire, c’était un peu difficile. Mais pouvais-je vraiment lui dire ça de façon aussi banale, aussi simple, comme si je posais un diagnostic que je jugeais un peu déplacé ? Fronçant les sourcils, je la laissai poursuivre tout en l’écoutant attentivement, esquissant un nouvel air triste quand elle vint à dire qu’avoir été dans la situation de son fils, probablement qu’elle se serait sentie trahie également, ce qui était, sommes toutes, quand même légitime. Mais encore une fois, je ne pouvais pas me permettre de lui dire de cette façon, mais me disant que ce serait une perte de garder ma pensée pour moi du coup, je finis par lui dire, quand j’eus réfléchi mûrement à mes propos:  « Et si tu commençais par le voir, et après… Tu verras tout dépendant de sa réaction ? » Sentant encore une fois le conseil pourri, cette fois-ci, je décidai de ne pas rester sans m’expliquer, en venant donc à dire par la suite:  « Je veux dire… Enfin… Je suppose que les enfants sont spontanés, et il aura sa réaction à lui de réagir, qui pourrait peut-être te surprendre… Et je me doute bien que c’est difficile, que ça fait peur mais… Peut-être que prévoir ce qu’il pourrait dire ou faire n’aidera pas ? » Après, je m’y connaissais que trop peu, mais je me disais que peut-être un enfant avait besoin de se sentir compris. En tout cas, si je me basais sur le meilleur exemple que j’avais - soit moi quand j’étais gamin - c’était ma meilleure supposition. Enfant, je détestais qu’on me serve le même discours, sans qu’on cherche à comprendre ce que je souhaitais vraiment, et je me doutais que ce n’était pas que mon problème, mais celui de d’autres. Encore une fois, peu certain de ce que je disais, ce fut limite un soulagement d’entendre ma proche amie détourner le sujet. Non pas que je ne voulais pas parler de ses soucis, mais parce que peut-être cela me rendrait moins nerveux, pressé par les mots, et qui sait, peut-être il y avait un espoir que je trouve les bons mots pour plus tard. Et puis, il fallait que je me rende à l’évidence qu’il y avait quelque chose que je ne lui avais pas encore dit, et qui serait pertinent qu’elle sache. Me mordillant la lèvre inférieure, je décidai quand même de ne pas jouer le gamin surexcité, même s’il y avait de quoi l’être à mon avis. Piochant un peu dans mon assiette, je lui dis:  « Oh pas grand-chose… Je suis rentré il y a quelques jours d’un voyage d’affaires. J’y ai emmené Joyce, pour qu’on passe un peu de temps ensemble, que je lui montre où j’ai grandi vite fait, et que je la demande en mariage. » J’avais tenu cette phrase, y compris la dernière partie, comme si je lui racontais une journée bien banale, même si évidemment, tout cela n’avait rien de banal. Mais d’humeur taquine, comme bien souvent, j’étais curieux de voir si Aurora allait le capter, et surtout, comment elle allait réagir du coup, attendant donc de voir, en continuant de manger, toujours comme si de rien n’était.

Venant à faire cette proposition à mon amie à tout hasard, basée sur mes suppositions, sur ce que je pensais, réfléchissant à ce que je pouvais lui dire de mieux dans cette situation plus que délicate, je ne pensais certainement pas que ma suggestion serait prise en considération aussi sérieusement de la part de ma meilleure amie, comme si c’était là le meilleur conseil qu’on pouvait lui donner, alors que celui-ci représentait tout le contraire de savoir quoi faire. En gros, je venais de lui dire de ne pas avoir d’attentes, s’adapter à la situation au fur et à mesure, être spontanée, même si c’était loin d’être quelque chose de simple. Surpris donc qu’elle vienne à dire qu’elle allait suivre mon conseil, que j’avais raison, je n’eus même pas le réflexe de faire une blague comme quoi j’avais toujours raison, parce que jamais je ne pensais avoir le dernier mot dans cette discussion, pas avec un tel propos en tout cas. Tout ce que je sus faire, ce fut de lui sourire doucement, quelque peu timidement même, me disant que je pouvais très bien me contenter d’être content d’avoir pu l’aider d’une certaine façon, sachant que je trouverais certainement un moment pour lui faire une blague afin de lui remonter le moral à un autre moment. Encore mieux, ce moment arriva peu de temps après, quand vint le moment de lui annoncer que j’étais désormais un homme fiancé, je décidai de ne pas le faire de façon surexcitée comme j’aurais peut-être pu, mais plutôt en me jouant un peu d’elle, faisant comme si je lui annonçais un truc tout banal. Évidemment, elle capta la nouvelle malgré tout, semblant limite s’outrer du ton que j’avais adopté pour le lui dire, même si cela ne l’empêcha pas de me féliciter. À ce moment, j’aurais pu lâcher le petit jeu auquel je jouais un peu seul, lui offrir un grand sourire et la remercier de ses félicitations, mais je décidai de continuer un bref instant, gardant mon sérieux comme pour justifier le ton utilisé, venant à lui dire:  « C’est parce que je ne t’ai pas dit si elle m’a dit oui ou non… » Je gardai ma contenance un instant, histoire de faire durer le suspense un bref instant, comme j’aimais tant le faire, surtout avec ceux que j’appréciais. Après tout, qui aime bien châtie bien, non ? Évidemment, je ne l’embêtai pas plus longtemps non plus, d’autant plus que j’en étais incapable. Rigolant, je finis par lui dire:  « Je plaisante, bien sûr qu’elle m’a dit oui. » Laissant mon rire se calmer un bref instant, je repris mon sérieux, histoire de lui dire, en toute sincérité:  « Merci. » acceptant ainsi officiellement ses félicitations, n’ajoutant pas quoi que ce soit d’autre pour le moment, me contentant de prendre une nouvelle bouchée de mon repas, attendant de voir si elle voulait réagir autrement, me poser des questions, quelque chose comme ça, considérant le fait que je ne savais pas trop comment réagir à tout cela, même si je savais l’essentiel; que tout cela me rendait plus qu’heureux.