Ezra & Julian ▬ On fait avec ce qu'on a non ?

> On fait avec ce qu'on a non ?

Julian avait une façon de voir les choses qui me plaisait. A vrai dire, je me retrouvais un peu en lui, lorsque je j'avais été plus jeune bien sûr. Un peu froid, un peu distant, l'air comme ça, de ne rien ressentir et de ne rien vouloir dévoiler aux autres. Je me souvenais de ma jeunesse à force de parler avec lui. C'était toujours amusant de parler à quelqu'un de son âge, ça me changeait aussi un peu des mes élèves qui sont bien plus jeune, et je dois le reconnaître, pour la plupart bien plus cons aussi. Je ne leur en voulais pas après tout ils avaient largement le temps de mûrir. Et d'arrêter de faire des fautes d’orthographes misérables et stupides. C'était curieux, mais la personne dont parlait Julian me faisait terriblement penser à un ami à moi. D'ailleurs il était amoureux d'un Julian. Le hasard était un peu trop poussé pour moi, et je commençais à me demander si il n'y avait pas un rapport entre les deux protagonistes. Si c'était réellement le cas, le rencontrer ici était vraiment trop curieux et trop hallucinant pour moi. Je me demandais si c'était une bonne chose de vérifier en lui demandant le prénom du fameux garçon. Je ne voulais pas qu'il me croit trop curieux et je ne voulais pas non plus le vexer, après tout on était plutôt en bon terme et la soirée que je passais avec lui était tout à fait agréable à mes yeux. « Ah ça, les rares fois où mon cul est posé sur le canapé, c'est bien parce qu'il y en a un second avec moi. » Je ne pouvais pas le nier, le n'étais pas du genre à rester tranquillement chez moi à la maison, et puis mon canapé me servait uniquement de lit quand j'étais trop pressé de déshabiller mes partenaires. Je ne voyais pas pourquoi je me serais privé de lui en parler, il était assez grand et de toute façon, j'ai toujours dit tout ce que je voulais sans me préoccuper de l'avis des autres et ça n'allait sûrement pas commencer maintenant. J'avais repris d'alcool qui traînait sur les tables. Ce n'était pas du tout les meilleures boissons que je l'on pouvais trouver mais j'avais la gorge sèche, et de toute façon quand il s'agissait de boire, je passais tout sans problème dans mon gosier même si ce n'était pas de la grande qualité. Je soupirais doucement, finissant mon verre d'une traite. J'allais en proposer un à Julian et je me suis souvenu que ce soir il tournait plutôt au jus de fruit et autres boissons de goûter d'anniversaire. Essayer d'être sobre c'était bien la dernière chose que je ferais. Depuis toutes ces années, l'idée d'essayer ne m'avait même pas traverser l'esprit pendant une minute. Je n'ai jamais eu personne pour qui arrêter, et même si ça avait été le cas, je préfère la bouteille à une relation normale. Oui je suis alcoolique et j'aime ça que voulez-vous, on ne se refait pas. Je soupirais doucement, les mains dans les poches, le regardant.

« Désolé de te décevoir mais j'aime mes élèves en tant que professeur et rien d'autre. De toute façon je m'attaque pas aux mineurs, sauf quand je suis pas doué pour deviner leur âge. » Sa remarque m'avait fait un peu sourire, sans me vexer. J'avais déjà eu des ennuis sur ce sujet. Souvent, les gens sont pleins de préjugés, et un professeur qui mène une vie nocturne n'a pas toujours bonne réputation. C'est comme si on devait s'arrêter de vivre pour l'éducation nationale. J'ai toujours aimé mes étudiants comme un mentor le devait. Je n'ai jamais dérapé avec eux, ils ne sont que des enfants après tout. Combien de fois j'avais entendu des parents me dire qu'en tant que gay je ne devais pas avoir le droit d'enseigner. Je soupirais longuement, Julian venait de faire remonter des souvenirs en moi qui ne m'étaient pas particulièrement agréables, j'espérais simplement qu'il ne pensait pas à mal en me disant cela. Si j'étais sensible sur un seul point, c'était bien celui-là. « Même les plus craquants après quelques années, ça reste mes élèves pour moi. Je suis là pour les guider dans l'avenir, les aider à tracer leur route et à grandir. » Je faisais toujours comme si je les supportais pas, mais au fond je les aimais toujours, même les pires. J'avais toujours hérité des classes dites à problèmes. Et c'était toujours mes favorites d'ailleurs. Ils avaient du répondant, et j'aimais beaucoup cet aspect des choses, la façon d'enseigner était différente et je pouvais être moi-même. En général j'étais toujours le professeur le plus apprécié, en même temps, je n'avais pas grand-chose en commun avec les autres collègues. Et tant mieux. Je ne voulais pas devenir un enseignant blasé qui venait en cours avec les mêmes livres depuis des années et qui ne voulait plus rien apprendre de neuf. J'avais quand même plus d'ambition que ça. « Je te rassure, je ne me fais pas n'importe qui non plus. Si c'est une fille, elle doit vraiment être parfaite à mes yeux, si c'est un garçon, j'ai mes critères bien à moi, en tout les cas, ça fait des années que j'obtiens qui je veux et je ne compte pas m'arrêter en si bon chemin, même avec ma bonne trentaine. » De toute façon je savais très bien à quoi je ressemble, je n'avais pas du tout de quoi être honteux. Je pouvais aisément séduire bien du monde, et j'avais rarement des refus. « Je comprends, parfois c'est plus simple de tout déballer à quelqu'un qui est externe à tout ça. Je suis bien content de ma soirée moi aussi, finalement, moi qui pensait tomber sur des adolescents stupides qui se rouleraient leur première pelle en dansant. Genre ceux-là. » J'avais désigné un garçon costumé en Bolton et une jeune fille rousse.

> On fait avec ce qu'on a non ?

Parler avec lui, c’était intéressant et amusant à la fois. J’appréciais le fait qu’il ait de la réparti, et qu’il pense la même chose que moi sur la plupart des choses de la vie. En fait, c’est vrai qu’il me faisait penser à moi plus jeune, même si y penser ne m’enchantait pas, puisque ça voulait dire que je vieillissais, et cette nouvelle, ne me rendait pas vraiment joyeux. J’avais toujours eu du mal avec l’idée de grandir, mais alors une fois que j’avais passé mes 23 ans, tout était devenu pire. Je me voyais déjà avec des cheveux blancs, cherchant mes rides dans le miroir. Fort heureusement, physiquement, j’étais loin d’être repoussant, c’était plutôt tout le contraire et de ça, j’étais plutôt fière. Encore maintenant, je n’avais aucun mal à attirer les plus jeunes, et c’est d’ailleurs ce que je préfère pour une histoire d’une nuit. Sans doute parce que quelque part, ça me permet de ne pas vieillir encore chaque jour, je me sens un peu plus jeune, alors que je ne le suis pas, et que je ne le serais jamais plus. Soupirant, je prenais rapidement un verre à un serveur qui passait par là, histoire de rincer ma gorge qui commençait à devenir beaucoup trop sèche pour moi. Les remarques de Julian me firent largement sourire. Décidément, il était plutôt doué pour taquiner les autres, mais moi je le suis aussi, alors quelque chose me disait que cette soirée, n’allait pas s’arrêter en si bon chemin, et qui sait peut-être que cette nouvelle relation non plus. Parfois, les liens se tissent au détour d’un hasard comme celui de notre rencontre, on ne sait jamais, peut-être sera-t-il un nouveau compagnon pour mes soirées. « Comme c’est gentil de ta part pour mes élèves. Mais je ne suis pas sûr que ça les déçoive, quoique…Il y en a bien deux trois qui me regardent avec envie, le fantasme du professeur sans doute. » J’haussai les épaules en souriant, finissant d’une traite le verre d’alcool que je venais de prendre sur un plateau. J’étais capable de boire de grandes quantités d’alcool en très peu de temps. J’avais su développer ce don depuis de nombreuses années, et je mettais beaucoup de temps à être bourré en règle générale. J’étais plutôt fière d’ailleurs de pouvoir en informer les autres dans un bar, quand j’étais un peu attaqué, ce qui du coup, ne me rendait pas vraiment crédible mais qu’importe. « Que tu le pensais ? Pourquoi, tu me voyais comment ? En allumeur qui saute sur tout ce qui bouge ? » Je riais un peu, levant les yeux au ciel. Ce n’était pas totalement faux, mais j’avais quand même mes critères de sélection, moi en sexe et pour tout, je choisis avec certaines sélections. « Ce n’est pas faux, mais je suis très difficile sur la marchandise. » Oui, j’appelais ça de la marchandise, et non, je n’en avais pas honte. J’ai toujours aimé me faire plaisir et le plaisir de la chair était pour moi sans limite. Ça me convenait comme ça, et si on me jugeait tant pis, depuis le temps, j’avais fini par en prendre l’habitude. « Et tu n’inquiètes pas, je m’amuse très bien. » Après tout j’étais encore puissant comme il disait. Et puis si un jour ça devait changer, il me restait toujours la pilule bleue, même si j’étais certain de ne pas en avoir besoin, après tout on parlait de moi. J’haussai alors un sourcil en l’entendant parler couples. C’était plutôt étonnant pour un jeune garçon d’être aussi tranché sur le sujet. « Quoi, à ce point ? T’as un problème avec les relations de couple ? » Je ne suis pas un grand fan mais j’ai quand même connu l’amour, et le mot dégoût me paraissait fort. « Avec plaisir pour une clope mon grand. » Je souriais, essayant tout de même d’en attendre plus sur son fameux dégoût du couple qui m’intriguait.