(Jacaya#1) Une vie privée pas si "privé".

’est drôle, lorsque j’avais évoqué mon salaire qui ne me permettait pas, d’une expression étrange c’était dessinée sur son visage. Comme s’il était surpris ou étonné ; oui bon, je sais, c’est la même chose, mais vous m’avez comprise, c’est l’essentiel. Mal à l’aise aussi et je ne comprenais pas pourquoi. Mais, je me trompais sûrement, j’avais mal déchiffré son visage. Rien d’étonnant à cela, je ne le connaissais pas. Il n’empêche, c’était vrai, mon salaire d’assistante administrative ne me permettait pas de voyager en dehors des Etats-Unis. Et encore, dans les environs de Washington. Si je ne partageais pas mon loyer avec ma meilleure amie, je n’aurais sans doute plus grand-chose pour pouvoir me nourrir à ma faim. Enfin, je n’avais pas le salaire le plus bas de l’entreprise, d’autres avaient moins que moi, mais j’avais les compétences et les qualités pour être autre chose qu’une petite assistante de rien du tout. Je le savais et ça m’énervait de ne pas avoir plus. Surtout que bon, ça faisait bientôt deux ans que je travaillais dans cette boite ! Ce n’est comme si je venais d’y être engagée. Il sembla désolé pour moi, mais je ne répondis pas. De toute façon, ça ne changerait rien de le dire. Finalement, une hôtesse nous apporta nos plats et nous commençâmes à manger. « Merci, vous aussi ! » répondis-je, quand il me souhaita un bon appétit. Que dire d’autres ? J’avais faim et finalement, ce n’était pas aussi mauvais que ce que je croyais. Ça ne valait certainement pas les plats cuisinés par mon père, mais c’était bon quand même. De toute façon, j’avais très faim, j’aurais pu avaler n’importe quoi, c’est vous dire. Le repas avalé, que dis-je, engloutie, je sentie mes paupières s’alourdir. Comme toujours lorsque j’avais finis de manger. D’ordinaire, je ne me laisse pas aller à dormir après avoir mangé, parce que je travaille, mais là, je ne fais rien d’autre qu’attendre que le voyage touche à sa fin, alors je me laisse allée dans les bras de Morphée. Lorsque je me réveille, nous amorçons notre descente vers Washington. Je suis encore toute engourdie de sommeil. J’ai l’impression d’être passé sous un rouleau compresseur. Ce n’est vraiment pas génial de dormir en position assise, sans oreiller, ni couverture.

Jacob & Amaya

orsque j’ouvre les yeux, le jeune homme à côté de moi ; dont j’ignore toujours le prénom ; me demande si j’ai bien dormis. « Ah bon, j’ai dormis ? » fis-je alors. Je me souviens d’avoir mangé, puis d’avoir fermé les yeux, mais je ne pensais pas m’être endormie. Pourtant, les lumières sont allumées dans l’avion et je constate que dehors, il fait nuit. J’aperçois aussi les lumières d’une ville, puis soudain, une secousse. L’homme à côté de moi semble nerveux, pas à son aise. J’en suis toute surprise, il n’a pourtant pas l’air d’être du genre peureux. Rien à voir avec moi. Puis, soudain, une secousse. N’ayant pas entendue l’annonce de l’hôtesse, disant que nous descendons sur Washington, je panique aussitôt, lorsque je sens l’avion piquer du nez. « Oh non ! Ça recommence ! Cette fois c’est sûr on va s’écraser ! » je cris, en me tortillant sur mon siège. Je suis attachée, mais qui diable a pu m’attacher ? Je sais que je ne l’étais pas tout à l’heure … Ou alors, je perds la tête. J’ai bien conscience que quelqu’un me parle, mais la panique aidant, je n’écoute pas et je recommence à parler à toute vitesse, sans m’en rendre compte. « J’ai déjà embrassé une femme, en boîte de nuit alors que j’étais complètement bourrée. J’ai renversé le chat de mes grands-parents avec mon vélo quand j’avais huit ans et je leur ai dit qu’il était parti chasser les souris. J’ai dit à une fille que son mec la trompait pour que le quitte, alors qu’en fait ce n’était pas vrai, j’avais seulement un faible pour ce garçon ! J’ai couché avec un mec dans une baignoire le soir de Noël. Je fais une fixation sur les pieds, c’est moche et en plus, ça sent mauvais. J’ai le vertige ! Je n’aime pas les bonbons … » Je m’interrompe, le temps de reprendre ma respiration, et surtout parce qu’il ne se passe plus rien. Sur le moment, je pense bêtement que l’on s’est écrasé, jusqu’à ce qu’une voit retentisse pour annoncer que l’avion s’est posé à Washington et que l’on va pourvoir descendre. Alors nous étions en train d’atterrir ? Bon sang ! Qu’est-ce que j’ai pu raconter encore ? Je regarde le brun à côté de moi et lui fais un pauvre sourire d’excuse.

Jacob & Amaya

lors, je me suis endormie. Putain, j’aurais préféré éviter ça. Je ronfle et je bave lorsque je dors. Voilà pourquoi il se marre comme un gosse, il n’a rien dû perdre du spectacle, c’est gênant. Je croise les bras, mais je préfère ne pas répondre, je ne voudrais pas qu’il se paye ma tronche gratuitement. Déjà qu’il s’est bien amusé à mes dépends, inutile d’en rajouter. Néanmoins lorsque l’avion commence à descendre sur Washington, bien malgré moi, je me mets à paniquer, persuadée que je suis, que nous allons nous écraser. Je n’ai pourtant pas eu peur à ce point lorsque j’ai atterri à Tokyo. Mais à l’allée, il n’y avait pas eu de turbulence et j’étais assise à côté d’une vielle dame. Je sens, plus que je ne remarque, sa main dans la mienne, pour me rassurée, sûrement. Je l’aurais sentie, je l’aurais sûrement remis à sa place en lui demandant d’aller voir ailleurs si j’y étais, mais je suis trop occupée à avoir peur, alors je ne me rends compte de rien. Je ne m’aperçois même pas qu’il est, lui aussi, en mode panique. Finalement, l’avion se pose et on nous annonce que nous allons pouvoir sortir de l’appareil. Il était temps, je n’aurais pas pu rester là-dedans une minute de plus. Je crois que c’est terminé pour moi, les voyages professionnels. Surtout que mon patron n’est pas venu, donc bon. Mais alors que je m’apprête à me lever, toute pressée que je suis de sortir de là, je l’entends ricaner, et je me dis, qu’est-ce que j’ai encore fait ? Comme s’il pouvait entendre mes pensées, je t’entends clairement me dire que je suis une coquine ! Première nouvelle. Je le regarde avec un air ahuri, je n’y comprends rien. J’ai sûrement dû parler pendant que je dormais, je ne vois pas d’autres possibilités. « Quoi ? » fus le seul mot que je prononçais. Puis, il ajouta qu’il avait été content de me rencontrer, moi qui parle beaucoup lorsque j’ai peur. Nouveau regard ahuri. Nouveau « quoi ? », puis, il se lève avec grâce et me prends la main et y dépose un baisé. Cette fois, c’est plus fort que moi, je me mets à rire. Oh, je ne me moque pas, ce n’est pas mon genre. Mais avec toute sa drague dans l’avion, sincèrement, je ne m’attendais pas à un baisemain. C’est tellement … d’une autre époque. Je me calme, avant qu’il ne fasse un commentaire, puis il m’indique que l’on se reverra sûrement. Nouveau gloussement de ma part, c’est plus fort que moi. Je doute de le revoir un jour, Washington est une si grande ville, mais je me garde bien de lui dire. Je me contente de sourire, d’un sourire crispé, puis je le salue d’un stupide signe de la main. Voilà que je fais ma timide. Je dois dire qu’il m’a tellement prise au dépourvue que je n’ai pas été capable de prononcé le moindre mot.