BANDY ▬ Never let me go

Quelques secondes après qu’Andy eut quitté la chambre pour se rendre dans la salle de bains, je décidai de m’affairer à prendre ma valise et ranger quelques trucs dont je n’aurais pas besoin dans l’immédiat, espérant que cela m’aiderait à me changer l’esprit. Cependant, et à mon plus grand désarroi, cela n’eut pas l’effet escompté. Était-ce parce que je rangeais mes vêtements si machinalement que faire usage de ma tête n’était plus nécessaire ? Parce que chaque fois que j’ouvrais un tiroir, je craignais qu’une souris en sorte soudainement ? Parce que j’étais trop occupée à me rassurer et me dire que ce n’était pas si horrible quand la dite souris ne sortait pas ? Je ne savais pas trop, mais une chose fut claire une fois que mon fiancé revint de sa douche, c’était que je n’avais pas été des plus productives. Enfin, Andy avait fait vite, ça, je ne pouvais pas lui reprocher, mais normalement, ce n’était pas si long, ranger des vêtements, pas pour moi en tout cas… Abandonnant le combat, je m’assied sur le lit, considérant Andy en étant non seulement aussi désemparée que précédemment, mais aussi frustrée. Frustrée parce que nos retrouvailles auraient dû être plus festives, qu’importe si nous n’aurions jamais dû nous séparer ou pas. Frustrée parce que j’aurais dû être en mesure de faire en sorte de reporter le moment où Andy allait enfiler ses vêtements et que je ne le faisais pas, même si ça aurait pu être très facile. Non, à la place, je restai plantée là à le considérer, complètement paniquée à l’intérieur. Heureusement, je ne devais pas le montrer des masses, puisqu’Andy n’en fit rien, me demandant simplement si je voulais aller manger quelque chose. Son attention était gentille, je n’allais pas le nier, mais avec l’estomac aussi noué, il était évident que je ne saurais avaler quoi que ce soit, pas tant que je ne me serais pas départie de ce secret que je n’étais plus en mesure de garder pour moi. Prenant mon courage à deux mains, je secouai négativement la tête pour répondre à sa question, et je lui dis, d’une voix tremblante:  « Il faut que je te dise quelque chose… » Suite à cela, je pris sa main gauche pour l’inviter à s’asseoir non loin de moi, remarquant qu’à ce moment qu’il ne portait pas son alliance, celle qu’il avait décidé d’enfiler après m’avoir demandée en mariage. Je ne m’étais pas départie de la mienne, mais peut-être que lui, en quittant pour New York, était vraiment sérieux à l’idée qu’on ne soit plus ensemble ? Mais qu’est-ce qui avait vraiment pu lui faire changer d’avis ? Allait-il avoir une mauvaise perception de la situation par la suite ? Légèrement paniquée, je me retrouvai à balbutier:  « S’il te plait, ne crois pas que c’est la seule raison pour laquelle je suis venue te rejoindre… Ce n’est pas le cas, je te le jure… » J’aurais pu aussi lui dire que la principale raison, c’était évident, c’était que je l’aimais, que lorsque je lui avais dit oui, c’était parce que je voulais être avec lui et personne d’autre, parce que je ne voyais pas ma vie sans lui. J’en avais eu un petit aperçu ces derniers jours et en toute franchise, ça n’avait rien de joli. C’était sombre, c’était solitaire, c’était tout ce que je voulais éviter désormais. Mais si jamais je venais à lui faire ma confession, allait-il me demander de partir ? Paniquée à cette simple idée, je sentis mon coeur battre la chamade, mais me sachant très bien acculée au pied du mur et incapable de reculer, je fermai les yeux, et je dis finalement:  « Je… Je suis… Je suis enceinte. » Puis, je gardai les yeux fermés, ne m’osant pas à regarder Andy à ce moment là, gardant même les lèvres pincées pour ne pas ajouter quoi que ce soit, et tenter de me faire violence pour ne pas trembler de tous mes membres par la même occasion.

Propre comme un sous neuf, vêtu plus proprement qu’une simple serviette autour de la taille, je posais mon regard sur ma fiancée. Elle n’avait pas broché ni dit aucun mot, je restais donc dans l’ignorance quant au fait si elle désirait manger ou préférait attendre encore. Quant à moi, je sentais mon estomac se réveiller, préparant ses vocalises pour se faire entendre à tout instant. Un phénomène assez courant venant de moi lorsqu’il s’agissait de nourrir la bête ! Observant Baby, je ne savais pas ce qu’elle désirait réellement. Avais-je perdu la faculté de comprendre ma copine sans qu’elle n’ait à parler ? Je commençais à ressentir cela lorsqu’elle parla enfin. Fronçant doucement les sourcils, ne comprenant pas tellement, mais sachant au plus profond de moi que ce genre de phrase n’annonce jamais rien de bon, je venais m’asseoir près d’elle. L’idée qu’elle m’annonce vouloir repartir pour Washington ou bien même Dover me traversait aussitôt l’esprit. C’était une décision qu’elle aurait pu avoir pendant que je prenais ma douche, seule dans cette pièce un peu trop minable. Ça n’avait rien de sécurisant ni de très séduisant. Je ne pouvais rien faire pour le moment, mais je savais que je pouvais aller plus loin, lui offrir une meilleure vie, bien qu’il fallait m’en laisser le temps. Avec tout ceci, cette crainte qui naissait en moi et l’excitation de la savoir ici, je n’avais toujours pas réalisé que je n’avais pas remis mon alliance. Je n’avais même pas fait attention à savoir si elle avait pu remarquer cet infime détail. Tout ce que je faisais, c’était attendre qu’elle parle, qu’elle me dise la raison de ce long silence. Un silence lourd. Le temps semblait prendre un malin plaisir à allonger tout cela, faire paraître la chose plus terrible et augmentant ma crainte à chaque seconde. J’étais presque soulagé en l’entendant parler, mais je ne m’attendais très certainement pas à cela. Oh que non ! Ma bouche s’entrouvrit légèrement, mais assez pour me donner l’air d’un idiot. Je considérais Baby. Enceinte. J’avais mis une fille enceinte. Le temps que mon cerveau analyse le tout, je me mis petit à petit à rire. Doucement puis le poids sur mes épaules s’envolant, je me laissais bercer par mon hilarité. C’était à n’y rien comprendre, mais j’évacuais le stresse des quelques minutes ainsi. Sans ajouter un mot, je déposais ma main sur le ventre de ma fiancée, laissant mon rire s’éteindre pour faire naître un sourire à la commissure de mes lèvres : « Je vais être papa ! » disais-je en relevant mon regard vers Baby. Je me perdais un instant dans ses prunelles océaniques, avant de lui confier : « Je craignais que tu changes d’idée… Quand voyant mon appartement tu préfères me quitter et repartir là-bas. » Je plissais le nez, avant de poser mon regard sur ma main, voyant que mon alliance ne s’y trouvait pas, je me levais d’un bond regardant autour de moi. « Merde j’ai perdu mon alliance ! » disais-je en plongeant pour regarder sous le lit, poussant immédiatement un cri horrifié en faisant la rencontre un peu trop près d’un cafard. Parcouru de frisson, je laissais les draps retomber et portait mon regard vers Baby : « Dès qu’on peut on quitte ce taudis et ces locataires indésirables ! »

Suite à mon annonce, Andy se mit à rire, de façon nerveuse, d’une façon qui m’inquiéta, si bien que je ne sus faire mieux que de relever le regard, dans l’espoir de pouvoir croiser le sien et trouver une interprétation à cette réaction. Riait-il parce qu’il ne savait que faire de plus ? Qu’il se préparait à me dire qu’il était hors de question que nous ayons un enfant ? Qu’il préférait que je reparte si je voulais le garder ? Tendue, je ne compris même pas ce qu’il voulait dire quand il vint à poser sa main sur mon ventre. Ce fut seulement quand je l’entendis dire qu’il allait être papa, que je vis le sourire sur ses lèvres et que je fis le lien entre les trois éléments que je soupirai de soulagement, ce qui fit inévitablement couler les quelques larmes qui s’étaient accumulées dans mes yeux depuis les dernières minutes. Mais là, je ne les versais pas parce que j’étais en panique comme plus tôt, mais parce qu’au contraire, j’étais rassurée qu’il le prenne ainsi. Et comme pour prouver davantage ce soulagement, je secouai la tête à ses derniers propos, je secouai la tête, puis avec un sourire, le premier que j’eus depuis un bon moment maintenant, je lui répondis:  « C’est pour toi que je suis venue, pas pour ton logement, banane. » Banane était bien évidemment un mot d’amour dans le cas présent, même si me concernant, ce n’était pas une marque d’affection suffisante. Je voulus donc que ce soit plus évident, mais avant que je ne puisse ne serait-ce que me pencher pour embrasser Andy, celui-ci s’exclama comme quoi il avait perdu son alliance. Perturbée, je ne sus rien dire, le laissant alors regarder sous le lit, les sourcils froncés, sursautant quand il se redressa en criant, paniqué, comme s’il avait trouvé un requin sous le fameux lit. Ne comprenant pas trop ce qui se passait, je tentai maladroitement de demander:  « C’est quand la dernière fois que tu l’as enlevée ? » Dans un premier temps, je ne réfléchis pas au fait que je n’étais pas certaine que je voulais connaître la réponse, dans le sens où je ne voulais pas vraiment savoir s’il l’avait retirée sitôt qu’il s’était installé ici, comme s’il était bien décidé à oublier notre relation, m’oublier par la même occasion. Mais avant que je ne puisse avoir ma réponse, tandis que je baissais le regard de nouveau pendant un instant, je vis, du coin de l’oeil, ce cafard, qui avait probablement deux fois la taille d’un insecte normal, se frayer un chemin de dessous le lit jusque dans notre champ de vision. Vu du de mon système digestif un peu trop sensible ces temps-ci, il n’en fallut pas plus pour que je m’exclame:  « Oh bon sang, je vais être malade… » Sans demander mon reste, je me précipitai à la salle de bains, et tentant d’oublier l’apparence peu flatteuse de l’endroit, je rendis un peu du sandwich que j’avais mangé dans l’autocar. Rien de dramatique, mais suffisant pour laisser un arrière-goût désagréable qui me poussa à ouvrir le robinet pour me rincer la bouche. Tandis que j’attendais que l’eau coule un peu plus, pour qu’elle soit plus fraîche et qu’elle n’ait plus une couleur jaunâtre un peu louche, je me retrouvai à regarder les environs pour la première fois, et c’est là que je la vis, l’anneau en or blanc. Prenant une gorgée d’eau vite fait que je recrachai une fois que je me fus un peu rincée la bouche, je refermai le robinet, et je m’exclamai:  « Je l’ai trouvée ! » Sur ce, je retournai dans la chambre, et avec un petit sourire aux lèvres, je m’approchai, puis je pris la main gauche d’Andy en lui enfilant la bague à l’annulaire gauche, prenant pour acquis que s’il la cherchait, c’était qu’il avait l’intention de la porter. Cependant, comme pour lui donner une signification supplémentaire, je repris mon sérieux, et je le regardai en disant:  « On ne se séparera plus jamais, n’est-ce pas ? » Sur ce, je me mordillai la lèvre inférieure, attendant ce qu’il me dirait, tandis que je gardais sa main dans les miennes, comme pour lui montrer que si lui, il était partant, alors jamais je ne le laisserais partir, et je ne partirais jamais non plus. Ainsi, qu’importe où nous étions, nous serions ensemble et éventuellement, nous allions former une famille, notre petite famille.