orgueil et préjugés | Olivia

Maximilian & Olivia

« Nous marchons à tâtons dans un univers dont nous ne
connaissons que les apparences les plus grossières. »
- Dalaï Lama

Un épais manteau blanc recouvrait la ville de Washington jusqu’à en gommer la moindre aspérité, la moindre particularité, la moindre couleur. Tout n’était que blanc cotonneux et froid polaire, ce qui ne manquait pas de surcharger les services d’urgence de la ville, entre les chutes sur le verglas, les sans-abris menacés par les températures abyssales et les accidents de la route causés par d’hardis conducteurs un peu trop sûrs de leurs talents de pilote. Derrière cette beauté de contes de fée et ce silence presque surréel tant la neige absorbait le moindre son se cachaient bien des écueils, qu’on oubliait bien vite au profit du froid et des mille et un tracas engendrés par la météo hivernale. Un bord de trottoir ou une borne d’incendie, quand ils se trouvaient entièrement recouverts de poudreuse, parvenaient à se faire totalement oublier, au point de devenir de vrais petits traquenards, eux qui n’étaient en temps normal que de banals détails du quotidien, sans grandes chances de vous causer du tort sauf si vous étiez l’esprit le plus étourdi qui fût.

Maximilian avait un peu cette impression-là en allant à l’entrevue proposée avec entrain par Olivia Ashford : celle de se sentir confortablement installé dans une situation on-ne-peut-plus banale, sans grands risques, alors qu’il n’en était rien. À vrai dire, le critique ne savait plus trop quoi penser de la nièce de son psy, comme d’ailleurs il avait bien du mal à savoir ce qu’Eric représentait pour lui –ou plus exactement comment son thérapeute souhaitait qualifier leur relation au vu des récents évènements, son cœur commençant à entrevoir à quel point il tenait au psychologue plus que ne l’autorisait une simple amitié. Après tout, la jeune femme lui avait envoyé le texto fatidique l’ayant presque téléguidé vers la maison du praticien, afin de lui apporter toute l’aide possible en cette période difficile, elle n’était donc pas si diabolique que ça, pas vrai ? Livie aurait très bien pu l’envoyer importuner son oncle pour rien, alors que ce dernier passait de très bonnes fêtes de fin d’année en famille ou entre amis… Au lieu de cela, et à des années-lumière de son attitude à la fois exaspérante et irrespectueuse de leur première rencontre, la rouquine avait fait montre de sincérité en l’appelant à l’aide, en quelque sorte, comme la princesse Leia en son temps avait envoyé un message désespéré à Obi-Wan Kenobi. Loin de pouvoir régler tous les problèmes de la galaxie, Max avait néanmoins fait de son mieux, et aussi étrange que cela lui fasse, une part de lui éprouvait de la gratitude envers l’étudiante pour s’être montrée si investie.

Cependant, que lui réservait-elle à présent ? Hale allait-il retrouver une demoiselle paisible tout aussi différente de l’impertinente créature dont il avait fait la connaissance que la personne lui ayant envoyé un sms, inquiète pour son père de substitution ? Ou bien redeviendrait-elle le petit démon adorant se mêler de ce qui ne la regardait pas, prompt en jugements aussi hâtifs que déplacés et fondamentalement blessants ? En proie au doute, Maxim avait malgré tout accepté l’invitation reçue la veille, et l’enjoignant à retrouver Olivia dans une des galeries marchandes du centre commercial de Georgetown, si le temps le permettait, mais à présent que les boutiques l’entouraient de toute part, le Californien se demandait s’il ne s’apprêtait tout simplement pas à se jeter dans la gueule du loup. Il ne se voyait pas particulièrement comme rancunier, mais d’un autre côté, il attendait toujours des excuses relatives à la conduite déplorable de l’étudiante, à qui s’aventurer sur les sentiers des suppositions calomnieuses et autres gestes inconvenants ne faisait pas froid aux yeux. Se remémorer avec quelle facilité elle l’avait mis mal à l’aise la dernière fois le mettait déjà mal à l’aise, alors se dire qu’elle pourrait très bien recommencer en public sans même en rougir… Leur affection mutuelle pour Eric, de nature certes différente mais au moins tout aussi profonde, suffirait-elle à, pour ainsi dire, enterrer la hache de guerre entre eux et à enfin leur permettre d’interagir comme des adultes responsables ?

Toutes ces questions sans réponse, si elles semblaient faire débuter leur rendez-vous sous des auspices pas franchement bons, n’avaient cependant en rien entamé le bon vouloir de l’adversité, qui pour une fois avait décidé de ne pas prendre Maximilian comme bouc émissaire : celui-ci, en sortant de chez lui, était parti du principe que si aucun moyen ne lui permettait de rejoindre le centre commercial, il renverrait un message à miss Ashford pour la prévenir qu’il leur faudrait remettre ça à une autre fois, une excuse parfaite qu’il n’aurait nullement moyen de dégainer, sauf à faire preuve d’un niveau de mauvaise qu’il aurait bien eu du mal à assumer. Le métro de la ville, par définition sous-terrain, lui permit malgré quelques changements de rejoindre sans grand mal la station la plus proche, et le zèle des employés municipaux lui permirent d’emprunter des trottoirs globalement bien dégagés et salés suffisamment pour lui éviter toute glissade intempestive ; ce fut donc parfaitement à l’heure que Max rejoignit le point de rencontre dont ils avaient convenu, sur une des coursives du premier étage surplombant une place centrale, un des centres névralgiques du complexe marchand.

Aucune chevelure rousse n’était en vue parmi le nombre tout de même impressionnant de flâneurs venus se dégourdir les jambes en faisant du lèche vitrine bien au chaud malgré les conditions extérieurs peu engageantes, ce qui lui fit soupçonner un retarde malencontreux de la part de la demoiselle –elle avait sûrement dû composer avec des soucis de transport… partir du principe qu’elle avait oublié qu’ils devaient se voir ou qu’elle n’avait pas réussi à se lever ne lui fait que plus regretter le fait de ne pas avoir menti sur son impossibilité à se déplacer. Beau joueur, Maximilian lui accorda le bénéfice du doute, et se donna entre cinq et dix minutes avant de lui passer un coup de fil, voire du tout simplement, si la patience lui manquait, tourner les talons sans plus de procès. Accoudé à la balustrade vitrée, il se laissa absorber par le spectacle des va-et-vient des clients, juste en dessous.

avatars (c) fleurdeneige & even
Titre : Jane Austen

InvitéInvité MY BOOK COVER

orgueil et préjugés

Olivia tourne en rond depuis maintenant cinq bonnes minutes mais pas une seule place en vue. Plus précisément : pas une seule où elle, piètre conductrice et reine des incapables du créneau, ne puisse se glisser sans efforts. Elle jure allégrement contre la météo, l'impitoyable temps qui continue sa course perpétuelle sans égard pour l'emploi du temps de la jaune Ashford, mais surtout, elle jure contre sa propre bêtise.

Olivia tente de rationaliser, un retard cela arrive à tout le monde. De plus, elle peut affirmer sans la moindre culpabilité que c'est de bonne heure qu'elle s'est glissée sous ses couettes la nuit précédente. Elle avait même préparé son réveil ! Enfin, son téléphone, parce qui sur terre utilise encore un réveil ?

Ce dernier, réglé à une heure pas trop matinale mais tout de même convenable pour ne pas manquer son rendez-vous était soigneusement placé comme toujours sous son oreiller. Seulement voilà. Fière de ces décisions si matures et responsables qui lui aurait sans doute rapportées un paquet de bons points dans un scénario à la The Good Place, elle s'est octroyée le plaisir d'un petit épisode Netflix de ladite série, afin de terminer sa journée en beauté et se détendre par la même occasion. C'était sans compter sur les esprits tordus voire sadiques des réalisateurs et autres écrivains du petit écran. Après un épisode riche en rebondissements c'est sans se poser de question et sans égard pour ses obligations du lendemain qu'Olivia clique sur l'épisode suivant. Malheureusement pour elle, ce dernier n'était pas moins palpitant que son prédécesseur ne laissant pas d'autres choix à Olivia que de se ruer sur la suite. Les scènes s'enchaînent et les épisodes aussi, le temps perd une quelconque signification et épisodes après épisodes, Olivia s'éloigne toujours plus des bras de Morphée.

Cependant chaque chose ayant une fin, c'est avec désespoir qu'Olivia atteint l'ultime épisode de la saison et à sa plus grande horreur elle ne peut que constater l'absence d'une saison suivante. Plus par obligation que par envie, elle laisse enfin l'écran de son ordinateur se noircir mais contrairement à ses attentes, sa chambre ne se trouve pas du tout plongée dans le noir. Non, le dégât est fait : l'heure bleue pointe déjà ses faibles couleurs par la fenêtre. Son fidèle téléphone lui indique qu'il est une heure que certains pourraient considérer acceptable pour commencer la journée et Olivia se maudit, elle, et l'intégralité du staff de Netflix.

L'idée d'annuler lui traverse l'esprit mais même dans sa brume ensommeillée elle s'y refuse. Non. Même maintenant, cherchant désespérément une place de parking et ingurgitant ce qui doit être son cinquième café, elle est persuadée d'avoir prit la bonne décision. Ce rendez-vous c'est une chance à ne pas gâcher. Depuis son arrivée à Washington, la jeune rousse ne peut que constater le manque de vie sociale de son oncle et elle s'est résolu à rectifier la mise par tous les moyens nécessaire. Le destin a voulu qu'elle choisisse de répondre au message de ce Hale en cherchant à pimenter la vie de son oncle et lorsque l'homme en question a pointé son nez... Et bien, Olivia n'avait plus aucune raison de douter que son oncle n'était pas encore une cause perdue. Aucune doute sur la question, il y a quelque chose entre les deux amis. « Ami. » Le mot ne semble pas tellement correspondre à la relation entre les deux hommes ou du moins, à ce dont elle a été témoin. Elle a compris qu’officiellement les deux ont une relation professionnelle, mais officieusement quelque chose se trame, elle en est certaine. Oh, bien sûr le duo n'a pas pipé mot mais n'importe qui avec deux globes oculaires en bonne santé peut voir une attirance entre les deux. Après tout, son oncle est loin d'être laid, elle est bien placée pour le savoir vu qu'elle partage ses gênes. Cependant, ce qui était aussi clair c'est qu'aucun des deux hommes ne semblent vraiment prêt à faire avancer la situation. C'est à ce moment qu'Olivia entre en scène. La stagnation, ça la barbe et elle veut inséminer un peu de mouvement dans cette relation. Pour cela elle doit prendre en compte tous les facteurs et notamment la grosse inconnue : Maximilian Hale.

Dans un premier temps, Olivia ne peut qu'approuver les goûts de son oncle. Cet homme est un régal pour les yeux. Quel dommage qu'il est aussi clairement indiqué son dédain pour la rousse, enfin, cela en laisse plus pour son oncle il faut croire. Sa première rencontre avec Hale a été des plus froides, la franchise et le manque de limite d'Olivia ayant poussé le brun à insérer plus de distances que nécessaire entre eux et aujourd'hui elle espère bien changer cela. Elle doit se montrer sous son meilleur jour si elle veut glaner des informations et juger la situation. Elle ne doit pas se précipiter et tout faire capoter.

La vision d'une voiture reculant d'une place est quasiment biblique pour Olivia et la jeune femme manifeste avec agressivité son monopole sur celle-ci. Elle se gars plus ou moins gracieusement, moins que plus, avant de se ruer à l'intérieur. Une fois les portes franchies, elle tente de calmer son allure et de paraître dégagée. Elle ne veut pas sembler trop désespérée. Elle aperçoit l'homme avec qui elle a rendez-vous bien avant qu'il ne la repère et se donne tout le loisir de l'observer. Vraiment, il est canon. Elle n'a aucune idée de sa profession, Eric ayant refusé de discuter d'un de ses patients même avec un membre de sa famille mais Olivia ne serait pas surprise d'apprendre qu'il est acteur ou bien présentateur télé. Elle agite la main afin d'attirer son attention et quand son regard de pose sur elle, la rousse lui adresse son plus beau sourire. Ces yeux bleus se doivent d'être partagés avec le monde, définitivement un acteur.

« Pardon pour mon retard, j'espère ne pas trop vous avoir fait attendre... » Elle se rappelle au combien l'étiquette et la politesse semble compter pour cet homme et elle est capable de tout pour marquer des bons points. « Vous voulez prendre un café ? »

» life is tough but so are you (olivia & eric)
» une bouffée d'air[be] (olivia && noah)
» you break me like porcelain (OLIVIA)
» Olivia ~ At the end of the day, life's a lesson.
» Olivia ~ Friends, family and everything in between