the depth of truth ≡ lowen

Lowen était le frère qu'il n'avait jamais eu. Il ne l'avait pourtant jamais demandé. Son statut d'enfant unique ne l'avait jamais dérangé. Loin de languir d'un partenaire de jeu constant ou d'une âme innocente à manipuler gentiment, Trent s'était toujours plu à être le centre du monde de ses parents. De sa mère, du moins. Puis Lowen avait croisé sa route et il avait pu découvrir les bénéfices d'un amour fraternel sans en subir les mauvais côtés. Enfin, presque. La vague d'agacement que ressentait Trent en cet instant, devait être monnaie courante pour tous ceux s'étant déjà disputés avec un frère ou une sœur. Lowen laissa glisser sa remarque sur Maxence, clairement sceptique mais peu enclin de s'attarder là-dessus. Ça tapait sur le système de Trent. Il était quand même mieux placé pour connaître le degré d'implication de son colocataire dans ces histoires! Mais là n'était pas le sujet. Non, Trent ne se préoccupait plus un seul instant de Maxence en apprenant que Lowen était au courant pour son père. Du moins au courant de sa mort seulement. Trent le regarda un instant, muet. Oh oui, il y avait tellement d'autres choses à savoir. Le pire était à venir. Trent jugeait du mérite de s'arrêter là, de ne pas entrer dans les détails macabres de son enfance. Son père était mort, il ne l'avait jamais avoué. Trent pouvait construire quelque chose à partir de là, bâtir l'histoire d'une honte familiale et d'un drame contenu. Rien ne garantissait que Lowen y accroche. Le connaissant, il suffisait d'une hésitation pour qu'il réalise que Trent cherchait à le berner. Tester la patience de leur amitié était risquée. Mais pouvait-il vraiment tout déballer, en commençant par rectifier cette première erreur : son père n'était pas mort. Il n'en était pas sûr. Lowen, lui, ne lâchait pas pris, si prêt du but. Son meilleur ami n'allait lui montrer aucune compassion et il le savait très bien. Le Chef se rapprocha de lui, s'engageant sur un discours qui s'approchait douloureusement du chantage émotionnel.  Trent ne releva pas l'énième pique au sujet de Maxence, se contentant de lui lancer un regard noir entre deux montées de panique.  Lowen continuait sur sa lancée, impitoyable, et Trent souhaitait juste qu'il se taise. Ils étaient dans une foutue piscine municipale, bon sang. Un mot sur sa femme et Trent était soudainement sur ses pieds. « Ferme-là Lowen, tu ne sais pas de quoi tu parles » s'emporta-t-il, les dents serrées. Non, il n'allait pas faire une scène en public, mais il ne supportait plus les tactiques de son ami pour le faire avouer. « Connaître la vérité ne lui aurait rien apporté! Il était censé ne plus jamais réapparaître dans ma vie! » déballa-t-il, parlant trop dans son hystérie. Il se laissa retomber sur le transat, épuisé. Le silence sembla interminable avant qu'il ne s'exprime, le regard contre le sol humide. « Mon père est allé en taule quand j'étais gamin. Pour meurtre. Alors ma mère a décidé qu'on allait repartir à zéro. » expliqua-t-il d'un ton calme et maîtrisé. Des faits, et rien d'autre. « Il n'est pas mort » dit-il en levant le regard sur Lowen. « Il en cavale. Il m'a retrouvé à San Diego et... ». Il déglutit. Les souvenirs de cette journée réussissaient encore à lui donner des frissons d'horreur. « C'est pour leur protection que Raschelle et Korben ont été délocalisé, qu'ils ont changés de noms...car mon sociopathe de père est dans la nature et qu'il n'a pas fini de ruiner ma vie » conclut-il avec toute l'amertume du monde. Le ridicule et le soulagement le submergeaient en vagues successives. L'embarras de conter une telle histoire à son meilleur ami, au risque qu'il n'en croit pas un traître mot, et le soulagement indéniable de dire enfin ces mots à voix haute pour la première fois de sa vie.

Les limites de Lowen était flou, personne ne pouvait savoir jusqu’où il était prêt à aller. Lui pourtant le savait, il n’avait aucune limite. Il n’en avait plus depuis très longtemps et il se fichait bien des conséquences de ses actes. Face à Trent qui s’était levé pour lui faire face, l’allemand ne brochait pas d’un millimètre. L’italien devant lui avait beau être plus grand, plus imposant, ça n’affectait en rien Lowen. Ses iris bleutées se posaient sur son ami, analysant sa réaction. Il savait que Trent ne ferait pas scandale, pour ce genre de chose, ils étaient bien loin de se ressembler. Le blond n’avait pas peur de s’exprimer haut et fort devant des spectateurs. Il en avait même l’habitude, ce qui lui donnait surtout une très mauvaise réputation. Croisant ses bras sur son torse, il continuait d’observer Trent. Il sentait qu’il était sur le point de tout lui déballer. Laissant ses bras retomber près de son corps, il venait s’asseoir à nouveau sur son transat, mais cette fois, de façon à pouvoir regarder le chirurgien. Pour une fois, il ne disait rien. Aucune réplique sanglante. Aucune répartie. Il le laissait simplement parler, découvrant cette vérité depuis si longtemps enfoui. « Hum. » finissait-il par dire, revenant s’étendre dans son transat, croisant les mains sous sa nuque. Son regard se posant sur le ciel, il restait encore un peu silencieux, comme s’il tentait de réfléchir. « T’aurais quand même dû en parler. T’as été insouciant. » disait-il d’un ton plat, avant de remonter ses lunettes sur son nez. « Tu penses vraiment que Raschelle, ton fils ou même moi, on t’aurait laisser tomber ? T’es pas ton père… Et savoir aurait pu aussi les protéger. » Il sentait son portable vibrer dans sa poche, le laissant vibrer, il continuait : « Mais t’es encore plus con de t’attacher à des personnes ici. Tu penses vraiment que tu vas rester ici indéfiniment ? » Il haussait ses épaules avec nonchalance, avant de sortir son portable de sa poche, voyant le prénom de son associer sur l’écran verrouillé. « Je dois filer, le boulot m’appelle. » Il se levait remontant ses lunettes sur sa tête, posant son regard à nouveau sur le châtain. « Médite sur ça, t’en auras besoin et si tu veux en parler, je t’enverrai l’adresse de mon nouveau resto. » Il le saluait d’un signe de tête avant de tourner les talons. Sans attendre son meilleur ami, il partait comme il était venu. Un coup de vent. Lowen ne savait faire autrement.