[Sheri] Two girls, ducks and bread

Je ne cessais de guetter mon portable en quête d’un sms de la part de Simon. Je savais que ça n’allait pas tarder, une si grande rumeur colporter par Mind Reader… Surtout concernant Rhett et moi, non, Simon ne mettrait pas des lustres à réagir et à venir me voir pour avoir des explications. Je sais qu’à partir de cet instant, je serais fichue. Avalant ma salive, je me passe une main dans les cheveux avant de clore le dossier que j’ai entre les mains. Le procès a été réussi une fois de plus par mes compétences. Je ne peux pas le nier, mes études et mes années de stage ont enfin payés. Je suis récompensée de mes efforts et de ma réussite concernant mon boulot. Même mon père est fier de moi, je le vois dans ses yeux et je suis ravie de savoir qu’il va me laisser le cabinet quand l’heure de la retraite sera venue. Mais pour le moment, j’ai le droit d’aller respirer l’air frais avant de reprendre le boulot. On est en plein milieu d’après-midi mais je m’en fiche, je veux pouvoir m’aérer l’esprit et oublier pendant quelques minutes cette histoire de blog et de ragots. Alors je sors, prenant l’air et mettant mes lunettes de soleil sur mon nez. Je veux aussi pouvoir oublier les lettres qui m’attendent sûrement à mon entrée comme tous les jours depuis un moment. Une par jour, la moyenne. Toujours des menaces et je suis incapable de retrouver de quelle entreprise il s’agit. Rien qu’à y penser, ça me fait grincer des dents. Je soupire et me mets en tête qu’il va falloir que j’en parle à Rhett.. Rhett. Celui avec qui j’ai trompé Simon, celui qui fait chavirer mon cœur à chaque fois que je prononce son prénom ou bien que j’y pense. Ce mec ingrat et qui ne pense qu’à lui, ne cesse de me troubler. Et j’ai bien essayé de l’oublier mais ça n’a pas fonctionné, la preuve, j’étais retombée dans ses bras et bien plus à la minute où il avait franchi le pas de ma porte pour me rendre une culotte oubliée chez lui. Secouant la tête, je soupirai une fois de plus sentant les émotions revenir mais sentant aussi la culpabilité envers Simon. Ce bol d’air frais était vraiment ce qu’il me fallait pour ne pas sombrer dans mon tourment de questions. Je devais arrêter de penser à tout cela et me concentrer sur une chose à la fois. Les lettres avant, les amours après même si c’était plus facile à dire qu’à faire. Je traînais les pieds, en prenant la direction de Lafayette Square. J’y entrai et y trouvai une certaine sérénité en y posant le premier pas. Soupirant, je commence à marcher, regardant à droite et à gauche avant d’aller sur la piste piétonnière et non cyclable. Les cyclistes peuvent parfois être aussi dangereux que les automobilistes. Enfin bon. J’appréciai cet air et ce calme autour de moi que ça me redonnai de l’énergie pour terminer cette journée qui n’était que mauvaise. Cependant, c’était une autre mauvaise journée qui s’ajoutait à d’autres. Bref, je les encaissai. Je regardai l’étendue d’eau en souriant avant de taper dans un caillou pour le voir partir et rouler jusqu’à l’eau avec un petit « plouf » à l’arrivé. Alors que j’allais m’arrêter pour m’asseoir, j’entendis une voix que je reconnaissais assez bien à présent. Une collègue, enfin une partenaire qui pouvait m’aider dans certains procès et qui malgré son jeune âge, était tout à fait remarquable. « Alaska ! » Disais-je en lui souriant et m’approchant d’elle à mon tour. Les canards ? Je regardai autour de moi avant de voir une ribambelle de cannes, canards et cannetons qui suivaient Alaska. « Ce sont tes canards domestiques ? » Demandais-je en riant avant de répondre à sa question. « Je suis venue prendre l’air avant de reprendre le boulot. Et toi ? Que fais-tu ici, à part t’occuper de ta famille à plume ? » Souriante, je passai une main dans mes cheveux avant de la regarder et puis de regarder les animaux qui cancanaient pour avoir un morceau de pain. « Pas de travail aujourd’hui ? » C’était notre principal point commun, le travail et la dépense énergétique qu’on pouvait donner pour lui. Alors autant commencer par des questions tout bonnement professionnelles.

Venir au square me faisait du bien, je pouvais profiter du soleil et m’aérer l’esprit. Si ça continuait ainsi, j’allais finir par consulter un psy ou j’allais devenir folle. Respirer l’air frais venait déjà de m’apaiser même si je sentais mes nerfs encore à vif. C’était juste que je ne savais pas comment faire pour gérer toutes ses situations différentes et n’ayant pas de réponses à mes questions pour l’instant, le mieux à faire était de respirer un bon coup et de traiter un problème à la fois. Perdue dans mes pensées, j’avais à peine entendue cette voix féminine avant que je ne me tourne vers elle pour la regarder. Alaska, cette jolie blonde, qui a énormément de potentielle dans son boulot et que j’admire particulièrement. Je me vois en elle dans sa détermination et son savoir-faire. Puis la voir en dehors du contexte du travail me fait aussi du bien. Et je ne savais pas non plus qu’elle avait une vocation pour devenir dresseuse de canards. « Je vois ça ! En tout cas ils apprécient ton geste. C’est comme s’ils n’avaient jamais mangé depuis des lustres. » Disais-je en les voyant attendre d’autre morceau tomber des mains de la jeune femme. Je relevai la tête en riant face à sa remarque sur Blanche-Neige. « Qui sait, tu as peut être un don avec les animaux et tu viens de le découvrir ! Tu ferais mieux de vérifier chez toi si des souris ou des oiseaux ne sont pas en train de ranger ton appartement. » Je riais de bon cœur et ça me faisait du bien de parler d’autre chose et aussi de voir une personne différente que je peux croiser habituellement. « J’espère que tu le rencontreras prochainement ! » Disais-je en souriant bien que je sache pas si elle avait un copain ou non. C’était des sujets auxquels on n’avait pas encore échangé et dont je n’étais pas sûre qu’on partage un jour, quoi que. Bien que cette jolie blonde puisse aussi devenir une amie proche, je préférais attendre de voir où ça pouvait nous mener ce début de relation amicale. En tout cas, c’était bien partit. Je l’écoutais parler en grimaçant légèrement, je comprenais ce qu’elle voulait dire. Moi aussi j’avais eu ce sentiment en reprenant le boulot suite à mon accident et maintenant je croulais sous les dossiers, mais je préférais cela que de tourner en rond attendant une affaire. « Au moins tu peux profiter, car quand tu deviendras importante pour ton équipe et je sais que ça sera le cas, tiens-toi à ne plus avoir d’après-midi même de week-end. » Et j’étais sincère en disant cela et je voulais aussi lui faire comprendre que son mérite sera récompensé au fur et à mesure. Qu’il fallait être patient comme je l’avais été. Puis j’avais confiance en elle et j’étais sûre qu’elle percerait dans son métier et qu’elle deviendrait importante pour tous ses collègues. « Je vois ça ! » Je regardais son portable en souriant. Alaska était prévoyante ça se voyait sur son visage et elle voulait bien faire aussi. Elle irait loin. Je baissais le regard vers les canards essayant de chiper le morceau de l’autre. Cela me fit rire légèrement avant de répondre à la jeune femme. « Disons que j’avais besoin de respirer et de me remettre l’esprit au clair avant de poursuivre mon dossier. » Je ne mentais pas tellement, je n’arrivais pas à travailler car je pensais à trop de choses. Rhett, Simon, les lettres, les dossiers. « Mais ça peut bien attendre un peu. » A contrario d’Alaska je pouvais partir quand je le voulais du cabinet. Je ne dis pas que j’étais privilégiée par rapport à mon père mais surtout parce que j’étais celle la plus gradée après lui. « Et sinon, je ne t’ai jamais demandé, mais tu es à Washington depuis longtemps ? » Demandais-je en lui souriant. Si j’avais du temps devant moi, autant commencer à apprendre à connaître la jeune femme aux canards !

La discussion sur les canards me faisait rire et ça me faisait penser à autre chose également. Ca me coupait de mon boulot, ça m’évitait de penser à Simon, à Rhett, à ce que j’avais fait et où j’en étais rendue maintenant. De quoi péter une durite, mais rencontrer Alaska et pouvoir discuter d’autre chose me faisait du bien et me faisait sourire. « Ils se préparent pour l’hiver ! » Disais-je en rigolant avant de me frotter la tête et de sourire face à sa remarque. « Tout à fait, Cendrillon. Après tout, on ne sait jamais ! Ne peut-on pas rêver de vivre dans un conte de fée de temps en temps ? » Soupirais-je avant de penser à mes histoires qui étaient loin d’en être, des histoires de princesse. Je rigolai quand elle m’annonça que les princes, de nos jours et surtout dans notre société, étaient rares. Elle avait plus que raison et vu ma situation, j’étais en train de penser que jamais je ne pourrais trouver chaussure à mon pied. Enfin si, la seule qui m’allait, c’était Rhett mais on était loin de parfaire le grand Amour. « Il vaut mieux être seul que mal accompagné comme dirait mes ancêtres ! » J’en rigolai, mais au fond, c’est ce que je me disais. Est-ce que je ne serais pas mieux de finir ma vie seule et sans personne pour me taper sur le système. Mais à chaque fois que je fermai les yeux, je ne cessai de voir ce brun au regard si passionné me regarder. Rhett. Je secouai la tête pour me l’enlever de mon cerveau, peine perdue, afin de me concentrer sur la blonde qui se trouvait en face de moi en me demandant si j’étais sérieuse par rapport au fait qu’elle deviendrait importante. Souriant, je me rapprochai un peu pour poser ma main sur son épaule et lui offrir un sourire franc. « Je le sens, tu as du talent et tu perceras dans ton métier. Tôt ou tard, on reconnaîtra à quel point tu es douée. » Disais-je en pensant à ma situation, j’avais moi aussi eu du mal à me faire une place. Surtout dans le cabinet de mon père, mais avec du boulot, des efforts et de l’envie, j’y étais parvenue et j’allais prochainement obtenir le cabinet de mon père. Je n’avais pas de quoi être plus fière maintenant, j’allais atteindre mon but ultime à même pas trente ans. « Il faut parfois sortir la tête de dessous l’eau comme on dit. Sinon on passe à côté de beaucoup de chose. » Je la regardais avant de me tourner vers les canards qui continuaient à demander du ravitaillement. Je levai la tête pour la regarder quand elle répondit à ma question et je me contentai de hocher la tête. Elle était donc née et avait vécu ici toutes ces années. Comme moi. Washington était notre ville. « Comme toi, je suis née ici et je n’ai jamais quitté cette ville sauf pour mes études. » Disais-je en haussant les épaules. L’idée de partir me venait de plus en plus à l’esprit vu les circonstances de ces derniers temps, mais j’avais encore pas mal de choses à régler avant de pouvoir prendre du recul et de partir de Washington. J’attrapai le pain qu’elle me donnait et souriais avant de hocher la tête en rigolant. « Je peux toujours essayer. » Je m’accroupissais pour me mettre à la hauteur de ces palmipèdes et tendis la tranche de pain afin de la lâcher en voyant le bec du canard s’approcher trop violemment de ma main. « Je ne pense pas que ça sera pour moi ! » Lâchais-je en me relevant et époussetant mon jean, riant de cette situation un peu bête. « Je suis bien contente de te rencontrer ici. Tu as des frères et sœurs ? » Je m’aventurai sur le chemin de la vie privée mais au fond, je me disais que ça ne pouvait pas nous faire de mal de s’engager la dessus. C’était de simple question sans vraiment d’importance.