LOTERIE DE NOËL ✻ x'mas shopping /w Sasha & Mila

Contrairement à la plupart des gens, Mila n’était pas du genre à trépigner à l’approche de la période des fêtes. Le froid, les pubs diverses insupportables à la télé, la célèbre chanson de Mariah Carey que l’on entendait à longueur de journée… C’était marrant les premiers jours, mais rapidement épuisant. Le pire étant, bien entendu, l’achat des cadeaux. Ou plutôt, la recherche. Chaque année, c’était la même chose. Elle repoussait le moment fatidique (principalement par pure flemmardise) et réalisait qu’elle était vraiment en retard lorsqu’elle voyait les collègues de danse se féliciter pour leurs idées de cadeaux. Mila, elle détestait cela. Offrir et gâter sa famille, ce n’était pas un problème, heureusement. C’était surtout trouver quelque chose qui leur ferait plaisir qui s’avérait être une véritable corvée. Elle avait l’impression que plus les années passaient, plus son imagination s’épuisait. Sa famille n’était pourtant pas bien matérialiste ou difficile (quoique sa mère avait parfois des goûts comme qui dirait… singuliers) mais après avoir usé de tout son stock d’idées, il était de plus en plus compliqué de trouver un cadeau sympathique sans finir par tomber dans les clichés habituels. Ainsi, ayant un après-midi de libre, Mila s’était enfin décidée à s’y coller, déterminée à vite se débarrasser de ce fardeau qui la pesait depuis début décembre. Elle avait poussé un long soupir en voyant la foule dans le centre commercial. Visiblement, elle n’était pas la seule à s’y prendre à la dernière minute. Si ce détail aurait pu la rassurer, se dire qu’elle devrait passer son aprèm à slalomer entre des clients aussi pressés qu’elle l’exaspérait déjà. Un seul mot d’ordre pour aujourd’hui : efficacité. En fin d’après-midi, il ne lui resta plus qu’un cadeau à dénicher : celui de son frère. L’un des plus coriaces. La preuve, cela faisait un peu plus d’une heure qu’elle déambulait, trouvant quelque chose pour tout le monde, sauf son aîné. Elle commençait d’ailleurs à désespérer lorsque, fourrée un peu par hasard dans le rayon des CD, son regard s’attarda sur un présentoir en particulier. Un vinyle de Queen. Edition collector, s’il vous plaît. Elle ignorait s’il pourrait faire quelque chose de ce vinyle, mais elle se rappelait encore de ces soirées à devoir tocquer à la porte de la chambre de son frère pour le prier de baisser le volume. Et puis zut, au pire, il n’aurait qu’à le revendre sur Ebay, il y aurait bien quelqu’un pour le vouloir, non? Mila s’apprêta à s’emparer de l’unique exemplaire, quand un bras frôla le sien. Oh non. Ce n’était décidément pas le moment. Elle ne se démonta pas, agrippant un côté de la pochette tant convoitée. « Hm, excusez-moi? Je crois l’avoir vu avant. » Son ton se voulait le plus diplomate possible, presque trop mielleux pour être sincère. Si elle avait eu affaire à un homme, probablement lui aurait-elle fait les yeux doux et usé de ses atouts pour le convaincre. Malheureusement, c’était une femme qui lui faisait face et elle n’était pas sûre que son charme soit suffisant pour la faire flancher. Mila ne voulait pas déclencher une guerre nucléaire, mais… il était tout de même hors de question de céder. Elle était trop fatiguée, trop blasée, trop impatiente d’en découdre avec cette chasse aux cadeaux.

Si Mila n’avait pas encore trouvé d’explications suffisantes pour démontrer que la période de Noël était bien la plus pénible, voilà qui devrait définitivement lui donner raison. Tomber sur le dernier exemplaire d’un objet visiblement convoité. Allait-elle réellement lutter pour ce fichu vinyle? S’abaisser à ça, au lieu de gentiment passer son tour et chercher un autre cadeau pour son frère? Oui, tout à fait. Elle aurait du en avoir honte, mais à vrai dire, la jeune femme avait été tellement désespérée de ne rien trouver que depuis que ses yeux s’étaient posés sur l’objet, elle ne voyait pas d’autre alternative. C’était soit ça, soit se pointer à Noël sans rien, ou bien retourner plus tard au centre commercial avec le risque de repartir bredouille. Elle écarquilla les yeux quand son interlocutrice lui demanda une preuve, incertaine d’avoir bien entendu. C’est qu’elle était tenace en plus, la petite brune. « Et vous, vous en avez une, peut-être de preuve? » répondit-il, un peu moins calmement que tout à l'heure. Elle avait débuté la conversation en douceur, mais le fait qu’elle n’obtienne pas tout de suite ce qu’elle voulait lui faisait perdre son sang froid. Mila n’aimait pas qu’on lui tienne tête. Surtout dans cette situation, avec la fatigue accumulée des répétitions du spectacle plus celle de cette journée à arpenter les boutiques, elle n’avait pas la moindre patience. Sans qu’elle ne puisse s’en empêcher, elle soupira à son tour face à l’argumentation de la jeune femme. Avait-elle demandé à connaître sa vie? Et pire encore, de quel droit se permettait-elle d’estimer que la valeur de ce cadeau était plus importante pour elle? Elle aurait pu citer sa tante, sa grand-mère, la reine d’Angleterre, Mila ne s’en souciait peu. Ce n’était pas ses affaires, elle ne la connaissait ni d’Eve ni d’Adam. A moins qu’elle ne se ramène avec une histoire larmoyante, Mila ne ressentait pour l’instant que peu d’empathie pour elle. « Je crois que l’on est tous dans le même cas. » déclara-t-elle d’un ton las, déposant ses sacs au sol qui commençaient à peser trop lourd pour ses poignets. « Mais justement, c’est pour votre sœur, vous pouvez bien lui trouver autre chose, non? C’est facile de trouver quelque chose pour une fille, on est toutes pareilles. Un parfum, du maquillage, un bijou… » Et elle, elle devait chercher de quoi contenter un trentenaire qu’elle ne voyait que quelques fois dans l’année. Elle ne comprenait même pas pourquoi la brune en face d'elle luttait alors qu’elle pouvait finir ses courses en se rendant dans le magasin juste à côté. C’était probablement cliché mais honnêtement, elle connaissait peu de filles difficiles au point de refuser un bijou. Suffisait de cibler le bon en fonction de ses goûts et l’affaire était réglée. S’appuyant contre un rayon, Mila croisa les bras, les traits de son visage légèrement tirés à cause de son agacement. « Écoutez, on peut sûrement s’arranger. Vous me laissez le vinyle et je vous aide à trouver un cadeau pour votre sœur, si vous voulez. » déclara-t-elle, sans grand entrain. La perspective de devoir y retourner ne l’enchantait guère, mais elle était persuadée que cette alternative serait beaucoup rapide que celle de rechercher à nouveau un cadeau pour son frère.