Hi, I'm your sister... Or half sister [levi]

Il y avait de cela quelques jours, quelques semaines, je ne saurais même plus le dire, j’avais reçu une lettre bien particulière, comme quoi mon paternel était malade et que si je voulais lui venir en aide, il me faudrait me rendre à l’hôpital pour faire des tests, afin de vérifier ma compatibilité pour une transfusion, un don, je ne saurais pas quoi. C’était perturbant comme lettre, et pourtant, ce n’était pas ce qui m’avait le plus perturbé dans tout ça. Parce que ma réponse à ce genre de procédure était simple; c’était un non catégorique. Non pas que je ne voulais pas être généreux, mais parce que rien ne servait de faire de faux espoirs alors que je savais que je n’étais pas en condition pour ça. J’avais beau paraître en forme au quotidien, je savais bien que mon corps avait été profondément endommagé par ma consommation. Et toujours je craignais que ça me rattrape un jour, mais je remerciais le ciel chaque fois que je voyais que ce n’était pas encore le cas, pas tout de suite. Du coup, j’aurais pu juste me contenter de dire non, ou juste de ne jamais répondre, ne jamais appeler le numéro indiqué au bas de la lettre, mais autre chose avait attiré mon attention; le fait qu’il y avait non pas un, mais deux destinataires sur la lettre. Un autre destinataire, à qui la lettre s’adressait en parlant de son père. Je n’avais pas compris dans un premier temps, et j’avais cru à une erreur, même si ça m’avait tourné dans la tête un moment. Puis, lorsque j’avais reçu un message particulier, d’une personne qui disait être ma demi-soeur, je compris. Je fus perplexe dans un premier temps, mais au final, j’avais baissé ma garde, de sorte que j’avais accepté de la rencontrer. Pour dire quoi ? Pour prendre une décision commune sur notre géniteur ? Ce n’était pas ça qui allait me faire changer d’avis, c’était certain. Dans le flou pendant un temps, ce fut limite avec soulagement que je me rappelai que le rendez-vous était aujourd’hui. Non pas que l’idée de la rencontrer, l’idée de me faire au fait que j’avais une demi-soeur me rendait serein, mais parce que finalement, je pourrais avoir réponse à ses questions qui me tourmentaient depuis que j’avais reçu ce message. Nerveux quand même, je ne reculai toutefois pas quand vint le moment pour moi de me rendre dans le café dans lequel nous avions choisi de nous rencontrer. À l’intérieur, je fus content de voir qu’il n’était pas si bondé, et que peut-être je saurais la trouver avec le maigre descriptif qu’elle m’avait offert. Au final, avant que je ne puisse faire quelconque recherche, ce fut elle qui me trouva, m’appelant par mon nom. Quelque peu pris par surprise - et sans aucune raison vraiment valable - j’hochai la tête, me repris, et je dis:  « Oui… Tu dois être… Lily, c’est ça ? » C’était si je me fiais à la fameuse lettre. Apparemment, elle avait reçu la même, comme je l’avais supposé précédemment, d’où le fait qu’elle connaissait mon nom complet. Et moi, je n’avais pas pris la peine de lui demander, prenant pour acquis que c’était celui sur le fameux document. C’était un nom, à quel point celui-ci pouvait-il être différent de celui qu’elle avait en réalité ?

J’essayais tant bien que mal de me conforter en me disant que mon interlocutrice, Lily, me semblait tout aussi nerveuse que moi je l’étais en ce moment. Mais elle, au moins, elle eut le courage de me proposer de prendre un café. Ce n’était pas parfait, peut-être même que d’une certaine façon, c’était inutile, compte tenu du fait que nous étions dans un café, et que je ne me voyais pas vraiment rester là sans rien prendre, rien consommer. Du coup, j’acquiesçai, avec un petit:  « Pourquoi pas… », peu certain que je pouvais dire quoi que ce soit d’autre, sauf confirmer que j’avais devant moi la bonne personne, même si encore là, c’était bien peu utile de le faire. Ou bien l’était-ce ? Parce que plutôt que de simplement me confirmer son identité, la jeune femme vint à se lancer dans un discours comme quoi je ne devais pas l’appeler selon le nom qu’il y avait sur ce document, mais bien un autre nom, Kayla. Dans un premier temps, je n’aurais pas été perturbé d’une telle chose, considérant que moi-même, j’avais changé mon prénom par le passé. Enfin, pour des raisons bien particulières, probablement pas celles de la jeune femme, mais bon. Prêt à acquiescer, je ne m’attendais clairement pas à ce qu’elle vienne me dire que c’était une question de vie ou de mort, rendant à mes yeux la chose troublante, avec une touche de drame. Était-elle une criminelle en fuite ou un truc du genre ? Peu certain que je voulais être dans la confidence, capable de me rassurer qu’elle n’allait pas me le raconter compte tenu que c’était d’une importance si capitale, je me contentai de dire:  « D’accord… Kayla… » Intimidé, si je pouvais le dire ainsi, et surtout confus, maintenant que j’y repensais, je ne me vis pas demander, dire quoi que ce soit d’autre. Et clairement, je ne m’attendis pas à ce qu’elle vienne me suggérer de me l’expliquer. En fait, dans ma tête, ce n’était même pas logique, dans le sens où le terme « de vie ou de mort » et une explication ouverte n’allaient pas ensemble. Mais ça, c’était dans ma tête, dans cette tête où parfois, je me faisais trop de scénarios incongrus. Cherchant un peu quoi dire, je finis donc par répondre:  « Si c’est une question de vie ou de mort, je ne veux surtout pas t’y obliger… » Je ne cherchais pas à être ironique, bien loin de là. Je cherchais juste à lui montrer qu’elle n’avait pas à se forcer pour moi, même si je n’étais pas tout à fait persuadé que je m’y prenais de la bonne façon. Après, il fallait dire aussi que peut-être j’étais plus nerveux que je voulais l’admettre, comme je me trahis en ajoutant:  « Je vais prendre un simple café. » d’un ton encore une fois peu convaincu, choisissant de me taire à ce moment, voir ce qu’elle voulait m’expliquer, si elle tenait vraiment à s’ouvrir, espérant juste que le cas échéant, elle n’allait pas m’obliger à faire de même, puisque me concernant, j’étais peu certain que j’étais prêt à faire une telle chose. Pas tant sur mon nom, mais bien sur les points tournants de ma vie, comme ce changement semblait en être un pour Kayla, selon ma perception, encore une fois.

Pouvais-je vraiment dire à la jeune femme ce que j’avais sincèrement pensé en voyant cette lettre et ce, sans la vexer ? Je me retrouvai quelque peu entre deux chaises, gêné, ne sachant pas vraiment quoi répondre exactement. Je ne me sentais pas tant à l’aise de lui mentir et d’un autre côté, si je lui disais la vérité, je craignais de l’insulter. Mais au final, je choisis d’être honnête avec elle, sans être trop cru, venant donc à lui répondre:  « Je ne l’ai pas vu une seule fois et j’ai appris à vivre sans. Donc je n’en ai pas eu grand-chose à faire de cette lettre. Je pensais sincèrement la jeter aux poubelles. » En fait, ce qui m’avait empêché de le faire, c’était son message qui était arrivé peu de temps après. Et encore là, j’avais hésité une nouvelle fois, puis finalement, j’étais parvenu à me convaincre d’être là, ici et maintenant, pour apprendre à la connaître. Ou peut-être pour me donner bonne conscience ? Je ne savais pas trop. Jamais je n’avais entendu parler de mon paternel, et j’étais si neutre à l’idée que je ne me considérais pas comme une victime. Mais estimant que c’était plus simple de jouer de tact, j’approuvai quand même les propos de la demoiselle dans un haussement d’épaules. Je n’en fis pas trop, me contentant d’un simple  « Ouais. » Je n’étais pas bien doué pour lire l’état d’esprit des gens, mais Lily, elle, semblait particulièrement frustrée contre notre géniteur commun, me faisant comprendre que songer à lui parler de mon indifférence par rapport à lui n’était pas vraiment bien placé, pas pour le moment en tout cas. Et par la même occasion, je lui laissai l’occasion de parler comme elle le voulait, de me raconter son histoire si elle le souhaitait, même si je ne me voyais pas l’y obliger, surtout si c’était délicat. Apparemment, elle avait pas mal plus de courage que moi, puisqu’alors qu’elle me connaissait à peine, elle déballa tout, ou du moins, ce qui semblait être tout. Dans son discours, je compris toutefois bien des choses; le changement de nom, la rancune qu’elle tenait envers notre paternel. Et comment je me sentais par rapport à ça ? Je ne saurais pas le dire, mais je ne me sentais pas à l’aise, je ne me sentais pas libéré de tout savoir ça sur elle. Au contraire, c’était comme si elle venait de me transférer un fardeau et moi, je ne savais que faire avec. Déjà à la base, je n’avais jamais été doué pour écouter les gens quand il était question de choses délicates, mais plus encore, je ne la connaissais pas, je ne saurais même pas dire comment elle se sentait par rapport à tout ceci. Et idiot comme je pouvais l’être, je fis preuve de grande maladresse, et je me trouvai qu’à dire:  « Je suis désolé… Kayla… » Bon au moins, j’avais fait l’effort d’utiliser ce prénom qu’elle voulait que j’utilise, n’était-ce pas là un bon début ? Non, absolument pas. C’était juste une façon tout à fait pourrie de tenter de me conforter et de dire que je faisais quelque chose de correct, mais ce n’était même pas venir me rassurer, pas une seule seconde. Mais que pouvais-je faire d’autre ? Je ne savais pas. Et dans ce silence, je cherchais désespérément, un peu paniqué à l’idée de mettre un malaise dans la discussion et ce, dès le début, même si, il fallait le dire, la jeune femme ne m’avait pas tant épargné.