« Ils ont disparu en mer » Il n'avait fallu que ses quelques mots. Quelques mots pour chambouler définitivement ma vie. À l'époque, je venais à peine d'avoir huit ans, et j'avais encore toute l'innocence d'un enfant. Un peu tumultueux, un peu bagarreur et surtout assez naïf pour ne pas croire ce que l'on venait de m'annoncer. Mes parents avaient disparu en mer et n'avaient plus donner signe de vie depuis des heures. Pour les gendarmes, cela ne pouvait signifier qu'une chose : qu'ils étaient morts, probablement tombés de leur bateau qui avait été retrouvé vide au large des côtes. Je me rappelle encore d'avoir pleuré des heures et des heures à l'annonce de cette nouvelle. Je ne saurais même pas dire combien de temps, mais assez pour que je n'arrive plus à faire couler une seule larme de mes yeux. Cette nouvelle m'avait totalement anéanti, mais le plus dur dans tout ça avait été de trouver la force pour soutenir ma sœur cadette Jesabel. Cette dernière avait été en effet autant affectée que moi de la disparition de nos parents. Notre petite sœur Allie, c'était elle heureusement moins bien rendu compte de la situation contenu de son jeune âge.
Bien, vite, il avait alors fallu trouver une solution. Trois enfants en bas âge ne pouvaient décemment pas vivre seules et c'était chez nos grands-parents vivants sur le continent que nous avions trouvé refuge. Autant dire que cela avait été un sacré changement pour nous qui avions toujours vécu sur une petite île. Brooklyn ne ressemblant absolument pas à l'île de Nantucket où nous étions nés. Ici, tout était plus démesuré. Des énormes buildings, aux grandes affiches publicitaires en passant par l'agitation des rues. Tout ceci avait eu un côté fascinant pour l'enfant que j'étais à l'époque.
Petit à petit, j'avais perdu l'espoir de revoir un jour mes parents vivants et grâce au soutien de mes grands-parents, j'avais tenté de me reconstruire, de devenir un homme. C'était d'ailleurs à cette époque-là que j'avais rencontré Jada, une amie de ma sœur, qui bien vite était devenu sa meilleure amie. À ce moment-là je ne m'en préoccupais pas, d'autant plus qu'elle était bien plus jeune que moi. Autrement dit totalement inintéressante. Du coup, je préférais encore mieux retrouver mes copains en bas de la rue pour une partie de base-ball improvisé. Seulement en grandissant mon attrait pour la jeune femme avait commencé à se modifier. Parfois, je me surprenais à lui sourire plus longuement qu'à l'accoutumée ou bien à rentrer bien plus tôt quand je savais que Jesabel devait la retrouver à la maison. Je me rappelle d'ailleurs d'une conversation que j'avais eue avec mon grand-père à ce sujet. L'homme avait vite compris ce qui se tramait sous yeux, et il avait fait en sorte de me mettre en garde tout en me donnant quelques conseils avisés. Le genre de conversation d'homme à homme que j'aurais dû avoir avec mon père, mais que le destin m'avait empêché d'avoir. Enfin en ce qui concernait Jada, rien ne s'était finalement passé entre nous et ça malgré toutes les avances que je lui avais faite. Bien des années après alors que je ne pensais jamais la revoir, la jeune femme était finalement réapparue dans ma vie, en larmes, et totalement terrifiée. Ce jour-là, jamais je n'avais réussi à comprendre la raison de son mal-être. Je m'étais senti totalement impuissant et désemparé, alors sans réfléchir, je l'avais embrassé. C'était probablement con, même totalement stupide, mais je l'avais fait, appréciant la douceur de ses lèvres jusqu'à ce que la jeune femme mette brutalement un terme à cet échange avant de me gifler. Instinctivement, j'avais porté une main sur ma joue, sur la brûlure que la brune venait de m'infliger, avant de lui avouer que je ne savais pas ce qui m'avait pris. Enfin, si je le savais très bien puisque c'était quelque chose que j'avais envie de faire depuis des années, mais jamais je n'aurais pensé que la jeune femme aurait réagi ainsi. Puis après tout était parti en vrille. Jada m'avait insulté, blessé, traité de tous les noms comme si ce que je venais de faire mérité pareil châtiment. Blessé et vexé, je lui avais alors répondu de la même manière. Mes mots dépassant bien trop souvent mes pensées, mais c'était trop tard pour revenir en arrière. Huit années se sont depuis écoulés, et jamais plus je ne l'ai revu.
Mais il y a une autre femme que je n'ai pas revue depuis des années. 11 exactement. Bien plus qu'une décennie et pourtant, je m'étais promis de toujours la protéger. Cette femme, c'est Jesabel, ma sœur. Enfants nous étions pourtant très complices, la mort de nos parents nous ayant fortement rapproché. J'étais toujours là pour défendre ma petite sœur, alors qu'elle était toujours là pour soigner mes blessures. Bref nous étions un peu comme les deux doigts de la même main et jamais je n'aurais imaginé un tel fossé entre nous aujourd'hui. La raison à cela ? Son mari Jake que je n'ai jamais aimé. D'ailleurs si au début de leur relation, j'avais fait des efforts pour l'accepter comme petit ami de ma sœur, apprendre leur futur mariage m'avait rapidement fait déchanté. Cet homme n'était pas du tout fait pour ma sœur, et j'avais tout fait pour faire ouvrir les yeux à la jeune femme. Malheureusement pour moi, de tout cela, il n'était ressorti qu'une multitude de disputes. À tel point qu'au jour d'aujourd'hui je n'avais plus de contact avec ma sœur et cela me peinait énormément. Le manque est indéniable, mais j'ai presque perdu espoir que tout s'arrange avec elle. Tant qu'elle sera avec cet imbécile de Jake tout du moins. Heureusement, je suis toujours en contact avec Allie mon autre sœur, et même si je sais qu'elle déteste ça, je prends énormément de plaisir à lui donner deux fois plus d'amour que nécessaire. Après tout, elle est ma dernière famille, alors je peux bien la couver comme je l'entends et ça même si ça l'agace. D'ailleurs, cela m'amuse de la voir réagir de façon aussi virulente.
En tout cas, si mes relations amoureuses, et familiales sont pratiquement un fiasco, je peux au moins me féliciter d'avoir réussi ma carrière professionnelle. En effet même si après avoir obtenu une bourse pour étudier le droit à Harvard, je me suis finalement rétracté deux années après, j'ai tout de même réussi à entrer dans une académie policière de Boston. Il me fallait un métier d'action et c'est exactement ce que j'ai obtenu en devenant flic. Bien évidemment, dans ce métier, il n'y a pas toujours que des bons côtés, et ça j'en ai fait l'amère expérience dès le début de ma jeune carrière. À l'époque, j'étais encore en observation auprès de mes collègues lorsque ses derniers avaient eu la lourde tâche d'annoncer à une jeune femme de 14 ans la mort de ses parents. Zoya, elle s’appelait. Tout de suite, j'avais ressenti la douleur de la perte de mes propres parents et je n'avais pas eu besoin de croiser le regard de cette jeune fille pour comprendre la peine qu'elle ressentait à ce moment-là. C'était une sensation que je ne souhaitais à personne, pas même à mon pire ennemi. C'est d'ailleurs probablement pour ça que j'ai depuis ce moment-là, j'ai gardé un œil sur elle. Tenant le rôle de grand frère auprès de la jeune femme et veillant à ce qu'il ne lui arrive jamais rien. Bien évidemment, le comportement de son oncle et de son cousin à son égard ne m'a jamais plu, mais au vu de mon métier, j'ai toujours rongé mon frein pour ne pas intervenir moi-même en leur foutant sur la gueule.
Au travail, j'avais ensuite monté petit à petit les échelons, avant de m'inscrire à l'examen pour devenir US Marshals. J'avais toujours eu envie de plus. Peut-être une façon pour moi de rendre fier mes parents disparus ? En tout cas, c'était avec brio que j'avais réussi cet examen et que j'étais devenu US Marshals. Dans un premier temps, cela avait été pour protéger les tribunaux, avant que je ne sois muté à Washington pour cette même mission. C'était il y a trois ans maintenant. Deux ans plus tard, je me suis vu confier une toute nouvelle mission : celle de la protection de témoin. Enfin d'une témoin et de son enfant pour être plus précis. Elle s'appelle Solora Ipkiss, de son vrai prénom Raschelle Donnelly et son fils Percy Ipkiss, de son vrai prénom Korben Donnelly.
Tous les deux ont emménagé chez moi depuis plus d'un an et on ne peut pas dire que les premiers mois se soient extrêmement bien passés avec Solora. C'était même tout le contraire, chacun faisant la guerre à l'autre en se lançant des piques aussi stupides les uns que l'autre. Puis petit à petit chacun en a finalement mis sous ses pieds et la situation s'est gentiment amélioré. Le problème, c'est que maintenant, je commence à ne plus savoir comment gérer la situation avec la brune. Solora est en effet une femme tellement belle, attirante, désirable, attachante, mais surtout Solora est une femme mariée. Chaque jour, je dois me rappeler qu'elle n'est chez moi que parce que je dois la protéger, elle et son fils. Malgré ça, je sens que je perds le contrôle. Je sens que lorsque je la prends dans mes bras, je défaillis encore un peu plus et que mon besoin d'elle est de plus en plus grandissant. L'affection que je porte depuis le début à son fils Percy ne fait rien pour arranger la situation. Pourtant jamais je n'avais envisagé d'avoir un enfant jusqu'à aujourd'hui. Toutefois Percy par son sourire et sa bonne humeur a réussi à me percer à jour. J'adore véritablement passer du temps avec lui. D'ailleurs, je ne suis pas le seul puisqu'il n'a pas perdu de temps pour conquérir le cœur de mon chien Stark.
Solora, Percy, mais à toute cette équation, je ne dois pas oublier Trent et ça même si je n'ai aucune confiance en lui. D'ailleurs, j'essaye au maximum de le tenir écarter de sa famille comme on me la demandait, mais le jeune homme ne semble pas aussi conciliant pour ça.
J'ai peur, oui, j'ai peur parfois que toute cette situation finisse par me dépasser, malgré moi....