Kacey&Daryl + I ain't going home alone tonight {-18}

Je n’allais pas le cacher; je préférais de loin parler de l’éventualité de revoir Kacey pour l’embêter, passer du bon temps en sa compagnie, plutôt que de commencer à parler de mes malheurs, de mes déboires, que je ne me voyais pas exposer. Par conséquent, clairement, je n’allais pas commencer à les raconter, et j’avais pour espoir que me taire à ce sujet allait faire en sorte que celui-ci n’allait pas être abordé. C’était égoïste de penser de la sorte, je le savais très bien, mais je pensais surtout à me protéger, à ne pas flancher, déjà que je me sentais fragile, et que ce verre que j’étais en train de boire était bien loin de me venir en aide, vu la petite quantité, vu le temps que je mettais à le boire. Mais je ne fus pas exaucé; Kacey ne me demanda pas seulement de lui parler de moi en faits divers, mais bien en me demandant ce qui s’était passé dans ma vie depuis. Et même si je pourrais lui mentir, étrangement, je ne me voyais pas le faire non plus, tout simplement parce que je l’appréciais, tout simplement, même si là, tout de suite, j’aurais aimé que ce soit plus simple. Quelque peu embêté, je fis toutefois mon possible pour ne pas le montrer, me torturant mentalement pour savoir quoi lui dire, à un tel point que je me sentis obligé de fermer les yeux pendant un instant. Puis, au final, sachant très bien que je ne pouvais rester sans rien dire bien longtemps sans éveiller quelconque soupçon chez la jeune femme, je répondis:  « Des courses, çà et là… » Ce n’était pas un mensonge après tout, c’était ce qui avait occupé la grande majorité de mon temps ces dernières années. Mais après, quoi d’autre ?  « Oh, et je me suis marié. » Oui, il y avait ça, même si je ne m’en vantais pas. D’ailleurs, je ne songeai même pas à lui montrer mon alliance, que je portais toujours, même si ce n’était qu’une facétie, en gros. Et ça, c’était, étonnamment, moins difficile à cacher. Combiné avec le fait que je lui avais fait ce qui ressemblait à des avances plus tôt, et que du coup, je me devais de me justifier, j’ajoutai, d’une voix plus basse:  « Avec une amie, en fait. » Je choisis de ne pas aller plus loin pour le moment, ne voulant pas passer pour un fraudeur, souhaitant juste me remettre à l’aise dans la discussion, bien que je ne pensais pas avoir laissé paraître tant de choses, pas pour le moment en tout cas.

L’aveu de Kacey m’étonna quelque peu. Pas parce que j’étais vexé ou que je me sentais observé, je savais très bien que ça pouvait arriver, mais bien parce que nous n’avions pas un historique très garni, elle et moi. Nous nous étions rencontrés sur un évènement, et oui, nous nous entendions bien, mais au point qu’après, elle veuille suivre ma carrière, au travers des course qui étaient présentées dans les médias ? Clairement, je ne m’y en attendais pas, à un tel point qu’en soudainement manque de confiance, je lui demandai:  « Vraiment… ? » Mon ton de voix ne s’était pas fait méfiant, comme celui qui croyait qu’elle était en train de me mentir pour flatter mon égo, mais bien parce que j’étais curieux, curieux de voir si c’était vrai, curieux de voir si j’avais raison de peut-être être satisfait de ce qu’elle était en train de me dire. Au passage, je pourrais me sentir bien égoïste, sachant que ça n’avait pas été exactement la même chose. Oui, je souriais quand j’entendais une de ses chansons, mais je ne suivais pas fidèlement sa carrière, ancienne carrière. Mais puisque ce n’était pas mon genre de culpabiliser facilement, je n’en faisais rien, mais je ne dis rien non plus. Puisqu’elle voulait en savoir davantage sur ce qui m’occupait ces derniers temps, je lui parlai de mon mariage, bien que celui-ci n’avait rien de bien intéressant. En fait, j’aurais pu juste ne pas le mentionner que ç’aurait fait pareil, et au final, je regrettai même d’en avoir parlé, puisque la précision que j’avais apporté pour être le plus sincère qui soit parut le rendre quelque peu inconfortable. Avec un sourire en coin maladroit, je tentai de la rassurer, mais comprenant bien rapidement que ce n’était pas suffisant, je décidai d’ajouter:  « Elle avait besoin d’argent et moi, d’un toit sous lequel habiter. Disons que ça nous convenait à tous les deux et on le vit bien. » De plus, ce n’était pas comme si on s’était promis l’exclusivité - même si ce n’était pas ce que les papiers venaient à dire. Elle me laissait vivre ma vie, et je la laissais vivre la mienne. Et puis, je préférais de loin rentrer à la maison auprès d’une personne avec qui je m’entendis un minimum plutôt que de prendre le risque de le faire avec une personne de qui je risquais de me lasser bien rapidement, me connaissant. Je savais bien que ce n’était pas le cas de tout le monde, de très peu de gens en fait, ce qui me laissait deviner que peut-être ce n’était pas vraiment le genre de Kacey, mais je ne lui demandai pas, le gardant pour moi, attendant de voir ce qu’elle allait répondre, histoire d’ajuster mon discours par après.

Est-ce que j’en voulais à Kacey d’avoir suivi ce que je faisais ? Pas du tout, pas un seul instant. En fait, je n’avais aucune raison de lui en vouloir. Au contraire, je devrais me sentir… Flatté qu’elle fasse une telle chose. À la base, je ne courais pas pour la célébrité. Je faisais des courses parce que je me sentais bien à le faire, parce que ça me faisait sentir vivant. Bien sûr, je ne pouvais pas me plaindre du cachet que cela me donnait, je ne pouvais pas me plaindre d’avoir l’attention de maintes personnes autour, mais c’était secondaire. Et pourtant, la jeune femme paraissait en faire soudainement un gros plat, s’excusant limite de faire une telle chose. Histoire de la rassurer, j’eus un petit rire, et je dis:  « Pourquoi je le prendrais mal ? » Je songeai à ajouter quelque chose par la suite, mais au final, je ne le fis pas, estimant que mes propos, dits ainsi, étaient suffisamment clairs. Mais au cas où ce ne le soit pas, j’ajoutai à mes dires un petit sourire, rien de bien méchant, juste pour me vouloir rassurant au passage. Mais ce sourire, je le perdis par la suite, lorsque je dus expliquer les circonstances de mon mariage, sachant très bien que ceux-ci étaient peu conventionnelles. Et je regrettai clairement d’en avoir parlé, conscient désormais que ça venait de jeter un profond malaise, détestant ce malaise. Mais je ne pouvais pas tant faire marche arrière, donc j’allai jusqu’au bout, improvisant au passage avec un peu de désinvolture, comme si cela ne me touchait pas. Et comparativement à bien des choses qui étaient en train de m’affecter dans ma vie actuellement, ça ne me touchait vraiment pas. Celle qui le prenait le plus mal en ce moment semblait être mon amie, en fait. Je ne lui en voulais pas, je savais bien que ce n’était pas trop conventionnel. Je ne lui en voulus pas de ce qui semblait être un jugement, ni de son inconfort, haussant les épaules pour lui montrer que ça ne me dérangeait pas. C’était surtout à elle de voir si ça la dérangeait vraiment, en fait. Histoire de mettre ça vraiment au clair, j’ajoutai:  « C’est pas ce qui me gêne. En fait, ce mariage me convient plutôt bien. Mais si tu préfères que je n’en parle pas, je n’en parlerai pas. » Était-ce suffisamment clair pour le coup ? Je l’espérais en tout cas. J’espérais seulement que je ne venais pas de prendre un risque gigantesque non plus, soit celui de me faire questionner sur des trucs à caractère un peu trop personnels. Je voulais bien m’ouvrir sur cet aspect de ma vie, mais je ne voulais pas non plus que ce soit complètement abusé.

Bien sûr que dans ma tête, je faisais un tri des sujets que je voulais aborder et ceux que je préférais éviter. La progression de ma carrière, ce n’était pas tant un problème, tant et aussi longtemps que ça s’en tenait à des généralités. Mon mariage, encore moins. Évidemment, ce n’était pas tout le monde qui le savait, parce que mes agents de relations publiques et avocats ne voulaient pas que j’en fasse tout un cas, encore moins que je me fasse arrêter pour fraude ou quelque chose dans le genre. Mais je faisais confiance à Kacey, donc je ne voyais pas le mal à le lui dire, surtout si cela pouvait justifier pourquoi je l’avais abordée de la sorte précédemment. Quoiqu’au final, bien des sujets ne me gênaient pas, mais plutôt que de me parler de la pluie et du beau temps, Kacey vint à me rappeler le sujet dont je ne voulais pas parler. Elle ne le rappela pas directement. Elle ne me demanda pas ce qui était arrivé suite à ce fameux accident, que bien des gens avaient vu. Enfin, tous ceux qui avaient regardé la course, et peut-être un peu les nouvelles. Je ne le savais pas vraiment, raison étant que je ne voulais pas le savoir, je n’avais rien voulu savoir par la suite, le stress étant beaucoup trop grand à gérer par rapport à cette histoire. Mais sa question fut suffisante pour soulever le doute chez moi, le doute de trouver la prochaine fois où je serais en mesure de faire une course, parce que pour tout dire, au vu de l’entraînement que j’avais eu plus tôt, je ne le savais pas. Pris au dépourvu, je me retrouvai à lâcher un:  « Euh… » qui n’allait nulle part, qui ne voulait rien dire. Pris d’un moment de panique en quelques sortes, je ne le montrai pas, passant seulement une main dans mes cheveux en me demandant ce que je pourrais lui répondre. Cherchant à toute vitesse, je finis par dire:  « Je crois que j’ai une course dans deux semaines, mais je ne sais plus trop où et quand… Je ne connais pas mon emploi du temps. » Je mentais. Je savais très bien elle était quand, la prochaine course organisée sur le circuit. Je ne savais juste pas si j’allais y participer, si j’aurais le courage d’y participer. Après, il était vrai que je ne connaissais pas mon emploi du temps au quotidien, parce que j’étais trop désorganisé pour ça, mais les courses, je m’en souvenais tout le temps. Heureusement, peu de gens le savaient ça, parce que je passais pour désordonné dans toutes les sphères de ma vie, métier inclus. Mais quand même, j’espérais au fond que ç’allait passer, peu confiant de mon mensonge, et ne me sentant pas nécessairement fier de mentir à mon amie, même si ce n’était pas la première fois que j’omettais la vérité envers une personne plus ou moins proche ainsi.

Kacey avait gobé ce que j’avais dit concernant ma prochaine course, ou plutôt, le manque d’information par rapport à celle-ci. Elle ne semblait pas très heureuse que j’en sache si peu, mais elle ne semblait pas prête à me confronter sur le sujet et m’en demander davantage, ce qui m’arrangeait et me soulageait. Je n’irais certainement pas jusqu’à dire que ça me rendait satisfait, parce que clairement, ce n’était pas le cas. Je savais manipuler les gens quand j’en avais besoin, comme je venais de le faire, mais envers une personne qui n’avait rien demandé, une personne que j’appréciais qui plus est… Évidemment ça ne me laissait pas fier et confortable. Mais pour garder la supercherie intacte, pour ne pas me griller tout seul et ainsi, réduire à néant ces efforts que j’avais faits pour me protéger, pour ne pas faire en sorte de tomber dans cette déchéance qui me guettait chaque fois que je pensais au fait de retourner sur le circuit officiellement, le risque que je prenais de faire un nouvel accident et me sentir coupable pour celui-ci. Du coup, comme si je craignais comme pas possible de dire quelque chose me compromettant, je me contentai d’hocher la tête à son voeu, n’allant pas plus loin, comme elle. Ce mutisme donna à Kacey l’occasion de reprendre la parole, occasion qu’elle saisit pour me poser une question sommes toutes bien banale, mais qui me laissa perplexe, à défaut de ne pas trop savoir quoi répondre. Enfin, je savais quoi répondre, mais voulais-je lui dire la vérité, ou bien me sortir d’une situation qui pourrait ne pas me plaire ? Fronçant les sourcils, je la laissai continuer avec une nouvelle question, toujours aussi vague, mais qui vint m’éclairer un petit peu plus. Ne voyant plus tant pourquoi je lui refuserais ça, je lui dis:  « Non, je n’ai pas de plans pour le reste de la journée. » Bon d’accord, rentrer chez moi, aller voir ma femme, mais ça, on s’en moquait un peu… Beaucoup même, et désormais, elle savait pourquoi, donc inutile de me justifier. Mais toujours un peu craintif sur ce qu’elle avait envie de faire - quoiqu’encore une fois, je ne le laissais pas paraître - je vins à lui demander ensuite, avec toute la confiance que je pus rassembler pour ce moment:  « Tu voudrais faire quoi ? » Je me rendis compte qu’après avoir posé la question qu’en fait, mes craintes étaient quelque peu stupides. Ce n'était pas comme si elle pouvait proposer quelque chose qui saurait me déplaire, sauf peut-être retourner sur la piste, mais ça me surprendrait qu’elle aille jusque là.