Notre chapitre semble fini pourtant le mot « fin » ni est pas :: Rosett

TENUE ▬ Je ne comprends pas. Je n’arrive à rien aujourd’hui. Cela fait plusieurs fois que je relis la même phrase. La même stupide phrase. Je n’arrive pas à me concentrer sur cours de management en ce moment. Mes cours du soir deviennent compliqués à suivre ces derniers temps. Luna étant malade, je tente désespérément de concilier vie de famille, vie professionnelle et vie universitaire. J’ai besoin de repos. Je reste éveillée presque chaque nuit depuis une semaine. Aujourd’hui n’a rien arrangé. Je me suis posée tranquillement dans un café de Capitol Hill, espérant trouver l’inspiration avec une tasse de café. Etudier à mon propre café n’aurait pas été d’une grande aide, j’aurais toujours eu à redire quelque chose aux employés et j’aurais fini par me lever pour donner un coup de main. Prendre l’air, voilà tout ce que je demandais. Aller quelque part de nouveau. C’est dans ce genre de moment que j’ai l’impression d’être une mauvaise mère. Je n’ai pas pu offrir une vie de famille normale à Luna, j’ai travaillé d’arrache-pied pour qu’on puisse mener une vie confortable et je n’ai aucun diplôme. Comment faire comprendre à votre enfant que les études sont importantes si vous-mêmes n’en avait pas faite ? Je me retrouve dans des débats interminables avec moi-même. Je finis toujours par me dire que je fais de mon mieux tout en sachant que je pourrais en faire plus. On m’a dit que c’était normal pour une mère de penser comme ça. Je trouve ça déprimant. Cette journée, je souhaite qu’elle soit rien que pour moi. Est-ce qu’une mère a aussi le droit d’être égoïste ? A côté de mes études, autre chose me préoccupe. Le fait que le père de Luna soit de retour dans ma vie m’angoisse. Je ne sais pas comment réagir. Un coup, je souhaite le tuer. L’autre, je comprends sa réaction. Mon irrégularité me perturbe moi-même. Je tente d’harmoniser la situation pour que ma santé mentale n’en prenne pas un coup. Ma tante m’a déjà fait une scène quant à lui. En aucune façon, elle souhaite le revoir. J’ai été obligée de temporiser la situation pour qu’elle ne détruise pas une autre de ses voitures. Bien que la première, je l’ai aidé à la détruire. Pour ma décharge, il venait de me quitter alors que j’étais enceinte. En me remémorant ceci, je me rends compte que je n’ai définitivement plus la motivation pour étudier. Je repousse du bout des doigts mes livres d’étude et me laisse glisser sur ma chaise. Je m’enfonce un peu plus tout en regardant par la vitre. C’est comme si Washington c’était donné rendez-vous dans la rue. C’est bondé. C’est à peine si les habitants doivent pousser l’autre pour se frayer un chemin. Il est temps de quitter le café. Peut-être que flâner dans les rues et visiter quelques boutiques va me redonner du baume au cœur. Je range mes affaires une par une et paye mon dû. Je descends les escaliers très calmement. Maudits talons hauts. En sortant du café, je m’arrête quelques secondes et regarde autour de moi. Par où y a-t-il le moins de monde ? Je m’engouffre dans la foule. Mes yeux vacillent entre le sol et les gens. Bien évidemment, je ne manque pas une occasion pour percuter quelqu’un. J’entend un juron, puis une remontrance avant d’entendre très distinctement mon prénom. Je lève les yeux vers la dite personne « Rhett ? » Mon cœur s’emballe pendant un moment. Eh bien voilà autre chose. Je dois ajouter à ma liste de choses auxquelles penser : ressentir quelque chose d’étonnant face à son ex. Je reconnais trop bien ce battement de poitrine. Je suis étonnée moi-même. « Je suis contente de te voir, ça fait longtemps qu’on s’est pas croisé » dis-je timidement, un sourire aux lèvres. Notre histoire est finit depuis longtemps alors ne laisse pas ton état émotionnel du moment te mettre sur la mauvaise voie. Rosie, tu as assez à te soucier en ce moment.

TENUE ▬ Mon cœur s’emballe pendant un moment. Je ne comprends pas ce mouvement. Ou plutôt, je ne souhaite pas le comprendre. Qui peut m’en vouloir ? Il semble que de nombreuses choses m’arrivent ces derniers mois. Cela ne s’arrête pas. J’aimerai passer, ne serait-ce qu’un week-end, sans devoir me soucier de quelque chose « En effet ça fait longtemps » Je suis contente de croiser Rhett, cela fait bien longtemps que nous nous étions plus parlé. Je ne peux pas dire que nous avons rompu en mauvais terme. C’était d’un commun accord, c’était nécessaire. Nous le savions. Aucun de nous n’étions disposé à changer. Je ne pouvais pas accepter un nouvel homme dans la vie de Luna. Il ne pouvait pas accepter d’être responsable d’une famille. Je peux comprendre. A l’époque, je ne le souhaitais pas non plus. On me l’a imposé. Seulement, j’ai pris mes responsabilités. J’ai fais avec. Je tente de faire toujours au mieux. Je souhaite être une bonne mère. « Ça me fait aussi plaisir de te voir » C’était en tant qu’amie et en tant que mère que j’avais pris la décision de rompre avec Rhett. Pourtant, ce battement de cœur me fait drôle. C’est inattendu. Je suis encore sceptique. « Alors qu’est-ce que tu deviens ? » Une question me préoccupe. Dois-je être honnête ? Raconter ce qui se passe dans ma vie n’est pas l’une de mes activités favorites. Je n’aime pas beaucoup ça. Je ne comprends pas pourquoi quelqu’un serait intéressé par ce que je fais. Je ne comprend pas pourquoi je devrais savoir tout de la vie de quelqu’un d’autre. Chacun possède son jardin privé. C’est assurément pour cela que je ne suis pas addict aux réseaux sociaux. Comme tout le monde, je poste quelques photos mais c’est seulement pour la famille et les personnes qui me sont le plus proche. Je ne pars pas à la recherche de fans, followers ou je ne sais quoi. Je ne dois pas vivre avec temps. « Rien de particulier, je dirais. La routine. Le café marche bien. Les cours à l’université sont … Disons, que ça pourrait mieux se passer » dis-je dans un sourire. Parfois, j’avais envie de tout plaquer. Surtout l’université. Les cours du soir était une idée à Maggie, ma tante. Je souhaitais pouvoir avoir un diplôme. Reprendre mes études, sans pour autant abandonner mon entreprise. L’idée m’a plu. J’avais son soutien. Mais c’était un rythme soutenu. Certains soirs, je ne pouvais que m’affaler dans le canapé. Je ne pouvais plus rien. Je n’avais plus envie de rien faire. Alors oui, parfois c’est dur « Ta fille … Luna. C’est ça ? Elle va bien ? » Je souris. Il se souvient de son prénom. Elle était la raison de notre rupture, mais il demandait comment elle allait. Je connais son embarras envers les enfants en général. Quand nous étions encore ensemble, il posait des questions sur elle. Je savais que c’était avant tout pour montrer qu’il s’intéressait à moi. Pour faire un effort. Je ne lui en veux pas. Nous avons été ami, avant d’être ensemble « Elle va très bien, je te remercie de prendre de ses nouvelles. C’est sa première rentrée à l’école alors, ça fait tout drôle » C’est étrange la première rentrée scolaire. L’enfant pleure. La mère pleure. Chacun rentre dans son habitat en tentant de se consoler, en se disant qu’on se revoit quelques heures plus tard. Je ne pensais pas que ça allait autant m’affecter « Et toi, dis-moi. Comment ça se passe le boulot ? Ce doit être intense en ce moment. Qu’est-ce que tu deviens autrement ? »

TENUE ▬ C’est toujours étrange de rencontrer une personne qui fait partie de notre passé. Irrémédiablement, on tente de comprendre pourquoi on a perdu contact. Les souvenirs émergent, telles des bulles de savons. On souhaite poser notre doigt sur certaines, oublier. On souhaite la regarder un peu plus longtemps, chaque seconde devenant précieuse, pour d’autres. Rhett est un bon souvenir que pourtant, j’ai tendance à omettre. A oublier. Le rythme de notre vie nous empêche de rencontrer ceux que l’on souhaite plus souvent. De s’intéresser aux autres, plus pleinement. Nous n’avons pas décidé de ne plus nous voir à l’époque. C’est naturellement, que nos chemins se sont séparés. Pourtant, ce mouvement dans la poitrine me fait toujours peur. Je ne comprends pas pourquoi maintenant. Je suppose certaines choses. Mais, je ne souhaite pas y penser. Fixer mon esprit sur cette chose pourrait m’apporter plus de soucis qu’il n’en faut. Il me signale ne pas avoir changé depuis notre dernière rencontre. Toujours seul. Toujours très attaché à son travail. Bien que parfois, c’était une chose qui me dépassais, j’avais toujours beaucoup d’estime pour lui. Il était très impliqué dans son travail. C’est une qualité. Je me surprends à imaginer cet avenir, que nous aurions pu avoir. Si nous avions pris une décision différente. Certaines images me choquent. Et je ne comprends pas pourquoi, je me montre si nerveuse face à un avenir qui n’a pas eu lieu. La politique était son travail. C’est quelque chose qui aurait pu me rebuté. Seulement, bien que je m’intéresse très peu à la politique, j’appréciais qu’il puisse donner son avis, n’importe quand. Il n’était jamais un simple figurant. C’est ce que je reproche parfois à certains de mes employés. Ils s’entêtent à se laisser entrainer par le mouvement de la foule, ne prenant aucune décision par eux-mêmes. Toujours obliger d’être derrière eux pour les inviter à faire quelque chose. Ça va mieux, mais parfois il me faut encore intervenir. C’est un comportement que seuls les enfants puissent avoir. Il faut, en grandissant, s’affirmer et prendre ses propres décisions. Savoir ce qu’on veut. Savoir ce qu’on pense « Oh, figure-toi que j’étudie le management. Ce sont des cours de soir, alors parfois c’est l’envie qui me manque. Surtout en voyant le nombre de pages que comporte un seul manuel » dis-je en souriant. Parfois, je n’ose pas dire que j’ai repris mes études. J’ai l’impression qu’on me portera une étiquette dessus. Comme ce qu’on a fait, lorsque je suis tombée enceinte. Certains visages ne me conviennent pas. J’ai l’impression d’être jugé. Rabaisser par un seul regard. Mais je garde la tête haute. Certains auraient pu abandonner dans ma situation. Certains l’ont fait. Je souhaite faire taire ces racontars. Montrer ce que je vaux, encore aujourd’hui. « Oui, ce serait avec plaisir. Surtout que, je te dois toujours un café » dis-je en référence à celui que je venais accidentellement de renverser. En l’espace de quelques paroles, j’eu presque oublier la raison de notre accrochage aujourd’hui. Je venais de sortir du café, exaspérée par un livre. Pourtant, l’idée de passer un petit moment avec lui ne me déplaisait pas. C’était une occasion pour renouer, même si ce n’était que quelques minutes. Etrangement, je souhaitais en savoir plus sur lui « Je te propose qu’on aille justement dans ce café, il y a encore beaucoup de place au deuxième étage. Cette fois, pas de risque de maladresse » dis-je en souriant. Je m’avance doucement vers le café et monte les escaliers un par un. L’odeur du café, je ne peux jamais m’en lasser. Je propose une table près de la fenêtre, nous nous asseyons dans le plus grand calme « Pour être tout à fait honnête, je passais une journée plutôt médiocre jusqu’à maintenant. Alors, je te remercie d’être un peu mon refuge pour le moment. Bien que ce soit plutôt ton café et la foule que je devrais remercier » dis-je dans un sourire.