Shooting improviser - Carson

Un à la fois, c’était mieux, j’avais l’impression. Mais après, c’était aussi me mentir en quelques sortes, parce que je finissais toujours par en prendre deux au minimum, même si très souvent, c’était pour en manger un sur place, l’autre pour emporter. Mais là, je verrais, tout dépendant du temps que nous allions passer ici, ce que nous allions manger et tout ce qui venait avec. De mon côté, mon choix était pas mal arrêté, mais Bradley, lui, semblait encore hésiter, et je ne pouvais pas lui en vouloir, clairement. Souriant doucement quand finalement, il arrêta son choix, je ris doucement à son commentaire de faire du sport pour s’en remettre le lendemain. J’eus envie pendant un instant de lui passer un commentaire comme quoi du sexe pouvait faire la même chose, donner le même résultat d’une façon pas mal plus plaisante et agréable - à mon avis - mais je ne pus pas vraiment, obligés de passer notre commande. Quelques instants plus tard, ils arrivèrent - ce n’était pas comme si c’était compliqué, considérant que ceux-ci étaient prêts - prêts à manger, prêts à être regardés. Il fallait croire qu’ils aimaient faire dans la fantaisie, limite il fallait une préparation mentale pour pouvoir l’attaquer. Mais ayant terriblement faim, je finis par dire:  « Tout à fait. Bon appétit ! » Heureusement, le mien avait une petite framboise sur le dessus, du coup, ce fut ce que j’attaquai en premier, la prenant, la faisant rouler dans ma bouche. Puis après, lorsque je me décidai enfin à la manger, je finis par demander à Bradley:  « Et toi, quoi de neuf dans ta vie alors ? » Entre les photos et tout ça, je n’avais pas l’impression que nous avions pu discuter vraiment, et je me disais que c’était l’occasion idéale de le faire. Après, Bradley était libre de me raconter ce qu’il voulait, je ne pourrais pas le forcer à quoi que ce soit, d’où le fait que j’avais gardé ma question aussi vague que possible.

Je ne restai pas bien longtemps sans attaquer mon donut. Manger la petite framboise fut suffisante pour m’ouvrir l’appétit et définitivement me convaincre que cette pâtisserie n’était pas faite que pour être regardée. Enfin, je le savais déjà, mais il fallait croire qu’il me faisait une petite poussée pour me convaincre. Après avoir demandé à Bradley ce qui se passait dans sa vie, je pris une première bouchée, l’appréciant, prenant mon temps, refusant de complètement dévorer le donut tout de suite. De toute façon, si je l’avais fait, je l’aurais très certainement regretté, raison étant que je me serais étouffée à l’annonce que mon ami me fit à ce moment. Non pas que je ne pensais pas qu’il était en mesure de trouver quelqu’un de qui tomber amoureux, mais parce que c’était quand même une grosse nouvelle ! J’avais beau ne pas avoir de relation amoureuse et être persuadée que jamais cela pourrait m’arriver, il n’en demeurait pas moins que je pouvais me réjouir du bonheur des autres. Cependant, mon manque d’expérience faisait en sorte que je faisais le contraire de mon habitude; je réagissais toujours un temps en retard. Et là, ce fut pendant ce temps que Bradley fut en mesure de tenter de changer de sujet, me retournant la question. C’était gentil, c’était mignon, mais il était hors de question que je commence à raconter ma vie. Secouant la tête en terminant ma bouchée, je finis par dire:  « Ne parlons pas de moi. Tu dois me donner plus de détails. Il s’appelle comment ? Tu l’as rencontré où ? Et pourquoi tu restes aussi flou ? » J’avais une idée de la réponse à la dernière question, considérant le fait que je le connaissais plutôt bien maintenant, mais je préférais qu’il partage un peu plus, s’ouvre, me donne quelque chose d’intéressant à écouter, parce que moi, je n’avais rien de bien intéressant à lui partager.

Je me doutais bien que je ne rendais pas Bradley confortable. En fait, j’en étais même persuadée, parce que ce n’était pas la première fois que nous nous retrouvions dans une telle situation et au vu de comment il avait tenté de changer de sujet, c’était certain qu’il ne voulait pas nécessairement en parler. Pourquoi je le forçais alors ? Parce que je savais que ça ne pourrait pas lui faire de mal, et aussi, de façon plus égoïste, je voulais, j’avais terriblement envie de satisfaire ma curiosité. Mais ça, c’était secondaire. Je pensais que j’étais suffisamment en contrôle de mes émotions pour faire la différence entre satisfaire ma curiosité et aider mon ami à s’exprimer. Heureusement, je n’eus pas à insister davantage, faire du chantage ou quoi que ce soit du genre pour qu’il commence à m’expliquer. Était-ce parce qu’il savait qu’il ne saurait gagner avec moi ? C’était une possibilité que je n’écartais pas. Attentivement donc, je commençai à l’écouter m’expliquer la situation, les circonstances de la rencontre de cet individu. Et même si je voulais me montrer comme étant l’amie capable de le soutenir plutôt que la commère qui voulait tout savoir, je ne pus m’empêcher de sourire légèrement. Pendant la pause qu’il prit, j’aurais pu lui poser plus de questions, mais je ne le fis pas, le laissant poursuivre à son rythme, selon ce qu’il voulait me dire. Mon sourire s’élargit un peu quand il parla de la personne en question, pour s’éteindre un peu quand je vis son incertitude, son insécurité par rapport à la suite. Et sachant que là, mon boulot en tant qu’amie était de l’aider à reprendre confiance en lui, à ne pas rester dans cette zone d’abstraction qui semblait le rendre si inconfortable, je lui demandai:  « Tu as son numéro ? » Ce n’était pas une question qui allait nous mener bien loin, mais j’avais bien des idées en tête tout dépendant de sa réponse. Il me restait toujours en tête l’idée comme quoi il m’avait dit qu’il l’avait rencontré à son bar, ce qui me donnait une autre option en cas de besoin. Mais je préférais attendre de voir ce que Bradley allait me dire, parce que qui sait, peut-être saurait-il ce que j’avais derrière la tête avant que j’ajoute quoi que ce soit, ce qui ne serait pas tant surprenant, compte tenu du fait que je n’avais pas fait tant d’efforts pour le cacher, et je n’avais pas l’intention d’en faire non plus.

En posant la question que j’avais posé précédemment, je me disais qu’il y avait deux options : oui il avait son numéro, non, il ne l’avait pas. Après, pourquoi, comment il l’avait obtenu, pas obtenu, perdu ou qu’importe, ça m’importait peu pour le moment. Enfin, s’il voulait me partager les informations, je n’allais pas l’interrompre non plus, mais je pourrais me contenter du minimum, pour réfléchir davantage, ou bien pour trouver une alternative à ce que j’avais en tête. Mais finalement, nul besoin de trouver une alternative; il me répondit par la positive, ajoutant le pourquoi du comment il l’avait obtenu. Pour faire des photos. Raison purement professionnelle ou bien une excuse pour le revoir de sa part ? Je ne savais pas, mais la deuxième option, je la trouvais plutôt adorable. Était-ce pour ça que je fis un petit sourire en coin ? Oui et non. L’idée m’avait faite réagir, c’était certain, mais c’était surtout parce que j’avais toujours ce petit plan en tête. Et ça, Bradley le devina, ce qui me fit sourire encore plus. Certainement que j’aurais pu faire comme si je voulais lui cacher quelque chose, mais quel était l’intérêt de faire une chose pareille ? Je m’assumais parfaitement, et le cacher ferait en sorte qu’on tournerait en rond, chose qui était tout à fait ridicule. Sans tarder, je répondis:  « Parce que j’ai l’impression que tu ne lui as pas envoyé de message pour y retourner et que tu as besoin d’un petit coup de pouce. » Coup de pouce comment ? Juste en l’encourageant à le faire, c’était ça ma première idée, mais s’il fallait que je prenne son téléphone pour le faire à sa place, ce n’était pas comme si j’allais me gêner. Pour ça, je n’avais absolument aucun complexe. Prenant une bouchée de mon donut, je continuai à le fixer, sans broncher, comme si j’attendais qu’il le fasse, et c’était, en fait, pile ce que j’étais en train de faire.